Les caricatures assassines !
SOIT DIT EN PASSANT
09 Avril 2016
Les caricatures assassines !
malika boussouf
journaliste, écrivaine
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Par Malika Boussouf
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Il est des jours comme ça où je ne me pose même plus la question de savoir si l’indépendance
justifie l’irrévérence et s’il faut ou non défendre la liberté d’expression à n’importe quel prix !
Parce que lorsque je vois ce à quoi le mot liberté expose parfois et ce à quoi il encourage,
et j’insiste sur le parfois, je baisse les bras, écœurée à la seule idée que l’on puisse
confondre le droit à la parole pour lequel beaucoup d’entre nous se battent avec les agressions
auxquelles se livrent ceux qui sont censés ne pas ignorer à quoi exposent pareilles dérives verbales.
Lorsque la bouffonnerie emboîte le pas au grotesque qui va à son tour déchiqueter la mémoire de ceux
qui ne sont plus ou insulter la souffrance de ceux qui ne sont pas entendus, je n’apprécie pas
la subtilité du message. J’ai trouvé immonde la nouvelle une du journal satirique français Charlie Hebdo.
Pauvre Stromae ! Il a fait quoi pour mériter qu’un caricaturiste dont le cynisme à l’égard d’autrui n’est
plus à conter s’en prenne à son histoire personnelle méchamment inspiré par le titre de l’un de ses tubes ?
Sur l’indifférence du «sans talent» au mal qu’il peut faire aux autres, les avis se disent partagés.
On réagit en fonction de convictions propres à ceux qui soutiennent sans exclusive tous les torchons
commis par les porteurs d’une éthique décrite comme «résistante» et «combative» ou par penchants
islamophobes inhérents à ceux qui se planquent honteusement derrière le droit de tout dire pour ne pas
se poser la question de savoir si ce qu’ils font est susceptible ou non d’atteindre autrui.
Charlie Hebdo, par le trait du même caricaturiste, avait déjà commis l’injure de s’en prendre
à un enfant syrien mort noyé sur une plage turque alors que ses parents tentaient désespérément
de rejoindre une rive aux allures d’indépendance. Je ne veux pas croire qu’il ait vendu davantage
en représentant un petit Aylan promu, à l’âge adulte, au statut de «tripoteur de fesses». A quoi peut bien
rimer cette surenchère qui tue le talent quand la grandeur d’un métier ne vaut plus que par
la course à l’excès ? Et que reste-il à l’éthique de ceux qui survivent ?
M. B.
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