Tout casser pour se faire entendre ?

SOIT DIT EN PASSANT
Lundi 9 Janvier 2016

Par Malika Boussouf
journaliste, écrivaine

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Il est des jours comme ça où à force de faire croire que l’on
maîtrise la situation, les choses les plus inattendues peuvent surgir
de là où l’on s’y attend le moins. Des revendications légitimes se sont
exprimées de façon plutôt violente il y a quelques jours à Béjaïa, par
exemple. On craint toujours le pire quand la colère gronde et gagne un
quartier, une ville ou un village. Les révoltes qu’ont connues certains
pays voisins ou du Moyen-Orient au cours de ces dernières années ont
donné la preuve que le calme ne revenait jamais avant d’avoir enregistré
son lot de victimes. L’Algérie n’a pas besoin de martyrs supplémentaires.
Elle n’a pas besoin de prendre feu pour se faire entendre parce que, pour
peu qu’on les mette en pratique, elle dispose de méthodes appropriées
pour venir à bout des conflits socioéconomiques qui l’agitent régulièrement.
On peut s’étonner qu’un chef de gouvernement qui invite à consommer
des oranges locales, à 100 DA, les moins chères, plutôt qu’un fruit importé,
n’ait pas trouvé mieux pour calmer les esprits échauffés par les mesures
d’austérité imposées depuis quelques mois et qui sanctionnent les plus
démunis. Ceux qui devraient inquiéter en premier lieu parce que ce sont
eux qui pourraient ne plus avoir envie d’en déguster davantage. Il est
surprenant que l’on ne puisse pas, en haut lieu, apporter de réponse
réconfortante aux inquiétudes des citoyens. Comment peut-il en être
autrement quand on sait par quelles grosses légumes le jeu de mots est
approprié — est détenu le monopole de l’importation ? On doute fort que
la crise sanctionne les cercles qui gravitent à la périphérie du
pouvoir. Quand le cours du baril de pétrole est à la hausse, il profite à ces
groupes d’intérêts et quand il chute, on répercute le manque à gagner
sur le consommateur. Voilà pourquoi beaucoup d’Algériens ne se bercent
plus d’illusions et n’écoutent les interventions officielles que pour mieux
en démonter le contenu. Quand on pense qu’en haut lieu, on estime, à
propos des oranges, qu’elles peuvent apaiser la faim du citoyen lambda,
on se dit que peut-être l’on n’a pas encore tout vu.

M. B.