Adulte dans un corps d’enfant !SOIT DIT EN PASSANT
18 Décembre 2016
Par Malika Boussouf
journaliste, écrivaine
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Il est des jours comme ça où, alors que vous entendez un jeune s’ouvrir à ses camarades dans un langage d’adultes, vous vous interrogez sur l’absence d’optimisme qui, à son âge, devrait, logiquement, booster ses journées. A l’entendre affirmer que c’était mieux avant, «fi waqt França», vous imaginez aussitôt que son présent dont vous ne maîtrisez aucun contour doit être pitoyable. Comment expliquer, sinon, qu’un gamin en soit à regretter, avec eux, le passé de ses parents et même celui de ses grands-parents ? S’il nous arrive, et même plus souvent qu’on ne l’avoue, de pester contre ce qui perturbe quelques-unes de nos journées et nous pousse à râler contre certains aléas de la vie, cela ne justifie absolument pas que l’on transforme en époque glorieuse ces tristement célèbres années d’occupation durant lesquelles la France, dans les bras de laquelle des milliers de compatriotes courent se lover, était en Algérie en tant que puissance coloniale et certainement pas à titre amical ou encore pour nous faire du bien, comme semblent vouloir l’attester, heureusement qu’ils ne sont pas nombreux, quelques esprits chagrins. Non, ce n’était pas mieux quand la France nous occupait et non, ça ne l’était pas plus lorsque les autochtones-indigènes, dépouillés et asservis crevaient de faim et de froid, qu’ils étaient tout juste bons à obéir, hommes, femmes et enfants confondus, aux maîtres rompus au maniement de la cravache au bout du travail accompli. Il faut dire que ce que m’ont légué mes aînés de la terrible dépossession et du trop long assujettissement où les profondes blessures et violentes douleurs ont accouché d’espoirs silencieux, certes, mais furieusement prometteurs, alors même qu’ils mordaient la poussière, n’a aucun lien avec ce dont d’autres ont hérité en guise de passé. Comment expliquer que des Algériens, au lieu de célébrer une liberté gagnée grâce à celles et ceux qui ont donné leur vie pour leur indépendance, puissent, 54 ans après, regretter leur statut de sous-êtres ? Avant ce jour, je n’aurais jamais pensé à cette manière de polluer le cheminement et les rêves de ces enfants.
M. B.