Que sont-elles devenues ?
SOIT DIT EN PASSANT
21 Avril 2016
Que sont-elles devenues ?
malika boussouf
journaliste, écrivaine
Malika Boussouf.jpg
Par Malika Boussouf
[email protected]
II est des jours comme ça où quand le doute vous envahit, vous vous surprenez
à rêver d’un monde qui n’a jamais connu l’horreur. Lorsque je m’étais rendue
pour la première fois à Bentalha, Naziha et ses amies m’avaient longuement
interrogée sur mon vécu dans la capitale, cette lointaine galaxie dont elles
n’avaient jamais foulé le sol. A croire qu’à vingt kilomètres d’Alger, nous étions déjà
dans l’Algérie profonde. Je ressens une profonde tristesse quand me revient
le souvenir de ces mains passées sous mon bras et de ces regards qui ne quittaient
plus le mien dans une communion que je devinais grave et qui me bouleversait.
Comment ne pas partager la détresse et l’accablement ambiants ?
Le même sentiment m’a envahie lorsque, de façon imprévisible, j’ai croisé,
il y a quelques jours, une Naziha rencontrée 18 ans auparavant dans un contexte
des plus rudes et des plus meurtriers. Je ne parlerai pas de ces deux sœurs de
six et dix ans qui avaient vu égorger leur père et leur mère se faire kidnapper.
Nous avions, en 1998, largement commenté les propos de celle qui avait hanté
mes nuits avec son : «Je veux que ma maman revienne !» Je veux juste me souvenir
de ces jeunes filles dont il n’avait pas été question à l’époque et dont Naziha m’a donné
des nouvelles. Auprès de la jeune femme se tenait une adolescente,sa fille, en jeans
et en baskets, cheveux au vent et sourire insolent. Quel bel héritage ! 16 ans et le bac
l’an prochain. C’est aussi pour elle que la jeune femme se tue, dit-elle,à la tâche.
A la couture, elle a préféré la pâtisserie traditionnelle et croule sous les commandes.
Parmi ses anciennes voisines, l’une a, un matin, été retrouvée sans vie. Elle s’était
défenestrée emportant son mal avec elle. Une autre a émigré en Angleterre avec
le cousin qu’elle a épousé ; une troisième a superbement réussi dans la couture et
il y a, aussi, celle qui a fait un mariage d’amour et celle qui attend l’élu de son cœur.
Faut-il dire de ces années obscures qu’elles auraient eu un impact inattendu sur des vies
faites d’enfermement et d’interdits?Auraient-elles, parfois, suscité de surprenantes vocations ?
M. B.
Reposez en paix, Arezki Idjerouidène !
SOIT DIT EN PASSANT
26 Avril 2016
Reposez en paix, Arezki Idjerouidène !
malika boussouf
journaliste, écrivaine
Malika Boussouf.jpg
Par Malika Boussouf
[email protected]
Il est des jours comme ça où marquer un anniversaire reste une occasion
comme une autre de rompre avec le quotidien qui nous porte. Et alors que
je déjeunais ce dimanche avec mon patron et ami, tout en convenant,
joyeusement, qu’il savait, comme personne, faire l’éloge du «lever le pied
pour mieux y retourner», une triste nouvelle lui fut communiquée
le décès d’Arezki Idjerouidène. Comment ? Où ? Pourquoi ? De quoi ?
Des questions que l’on pose le temps de gérer l’émotion et de trouver les mots
qu’il faut pour témoigner de la grandeur d’âme et de la générosité de quelqu’un
qui nous quitte sans crier gare.Vous n’aimez pas les mauvaises nouvelles ?
Moi non plus. Je me suis surprise à raconter comment un jour de 2010, à Paris,
alors que j’étais embarrassée par quelques kilos supplémentaires de livres,
une consœur et amie me suggéra d’appeler le PDG d’Aigle Azur. Nous nous étions
jamais rencontrés Arezki Idjerouidène et moi et au moment où je le contactais,
il n’était même pas au siège de sa compagnie mais en Afrique. Sur un ton
des plus chaleureux, il me rassura en me recommandant d’appeler son assistante.
Que j’ai un supplément de bagages en bouquins le changeait, m’avoua-t-il,
des demandes habituelles.Par les livres, une part de culture entrait en Algérie au lieu
de s’en évader, ajouta-t-il. Autant dire que parler à un PDG de sa stature, qui, au moment
où il me parlait, ne se souciait pas des bénéfices que sa compagnie pouvait engranger
mais de la façon la plus constructive de se montrer solidaire, ça touche profondément.
Au comptoir d’enregistrement, à Orly, m’attendait l’une de ses assistantes qui s’occupa
de mon surplus de bagages mais aussi de me déplacer en classe affaires. J’espérais
le rencontrer à Alger pour le remercier de vive voix. Je n’en ai pas eu l’occasion.
Tout le monde n’agit pas forcément par intérêt. Le défunt avait cette pudeur de ne pas
manifester le besoin de se faire mousser.Témoigner, aujourd’hui encore, au disparu
de mon meilleur souvenir était plus que jamais important !
Mes sincères condoléances à sa famille.
. M. B.
Une mosquée pour loger les fidèles
SOIT DIT EN PASSANT
27 Avril 2016
Une mosquée pour loger les fidèles
malika boussouf
journaliste, écrivaine
Malika Boussouf.jpg
Par Malika Boussouf
[email protected]
Il est des jours comme ça où, le fait de détourner le regard de cet ailleurs,
peuplé de réfugiés ou même de s’offusquer devant ces ombres humaines
qui s’accrochent à la fameuse «jungle de Calais», m’incite à dire que balayer
devant chez soi, c’est bien aussi. Parce que des bidonvilles et autres
baraquements improvisés, ce n’est pas ce qui manque chez nous.
Faute de parer à l’impressionnant exode rural qui a surpeuplé Alger durant
les années 90 et loger tous ceux qui, fuyant les violences terroristes,
sont venus s’implanter aux portes de la capitale, on a laissé faire en
se promettant, sans doute, de remettre de l’ordre dans tout ce bazar,
le calme une fois revenu. Et pendant que l’on fraternisait avec les maquis
et que l’on rétribuait leurs occupants pour leur engagement en faveur de
la «paix» retrouvée, des habitations de fortune ont poussé plus vite que
la décision d’y mettre un terme et se sont imposées dans une espèce
de consensus ambiant, avec la bénédiction d’autorités locales dépassées par
le phénomène. Et voilà que depuis bientôt trois décennies, on ferme
les yeux sur ce qui militerait en faveur d’une consolidation de la réconciliation
nationale.Au vu des sommes colossales à investir pour loger tout le monde et
au rythme auquel la construction de cités-ghettos progresse, il s’avère de
plus en plus impossible de caser toutes les familles. Une fois bien ou
mal installé dans la proche banlieue, personne ne veut plus en déloger
Les petites villes de l’intérieur se vident à un rythme effarant, tandis que
tous ceux qui ont renoncé à s’y sédentariser pensent, dur comme fer, que
la solution est nulle part ailleurs qu’à Alger.S’il faut s’interdire de blâmer
le fait que ces derniers aient tout abandonné pour courir à la ville, on peut,
par contre, se demander pourquoi aucun responsable n’a eu l’idée
géniale de sauver la campagne et l’agriculture en stabilisant les gens
chez eux ? Il fut un temps où ruer dans les brancards avait peu d’impact
sur les décisions prises, assurait-on, dans l’intérêt de tous. Et aujourd’hui
alors ? Combien de logements a-t-on sacrifiés pour une seule mosquée ?
. M. B.
«Le Silence des Eglises» !
SOIT DIT EN PASSANT
28 Avril 2016 «Le Silence des Eglises» !
malika boussouf
journaliste, écrivaine
Malika Boussouf.jpg
Par Malika Boussouf
[email protected]
Il est des jours comme ça où lorsque vous commencez à regarder un film
et que des nausées vous étouffent à moitié, vous vous interdisez, quand même,
d’aller voir ailleurs ou carrément de décrocher. Parce que quelque part au fond
de vous, vous pensez que refuser de s’impliquer dans un combat qui vaut
la peine d’être regardé de plus près est incontestablement injuste pour ne pas dire
culpabilisant. Faire dans le déni ou tenter d’échapper à une situation moralement
inconfortable est, pourtant, plus courant qu’on ne le croit.
Il y a quelques jours, je suis tombée sur le début d’un long métrage dont le titre,
«Le Silence des Eglises», annonçait la couleur sans vraiment éclairer sur la suite.
J’avoue cependant le mal que j’ai eu à tenir jusqu’au bout. Les violences sous-entendues
m’ont tellement écœurée que j’ai renoncé à suivre le débat programmé en prolongement
de l’horreur condensée qui l’avait précédé. La force de l’un, le religieux lubrique, confrontée
à la fragilité de l’autre, un enfant qui n’ose rien dire parce que l’on ne dénonce pas un prêtre
et parce que la parole d’un adulte prime toujours sur celle d’un enfant. Comment, en effet,
douter des intentions d’un homme d’Eglise ? Comment décrire le dégoût éprouvé à regarder
cet homme partager le lit d’un enfant, balader une main suspecte sur le corps frêle avec
la bénédiction d’une maman qui lui aurait donné le bon Dieu sans confession ?
D’autres questions se bousculent. Comment peut-on faire vœu de chasteté et céder à
la tentation de la chair ? Une fois adulte et avant même d’avoir la force de laisser le passé
refoulé ressurgir et s’imposer au présent, le jeune garçon se vit plus souvent non pas comme
une victime mais comme le complice de l’homme d’Eglise. Et c’est cette honte-là qui le ronge
jusqu’au jour où quand il ne se donne pas la mort, quand il ne décide pas de s’en prendre
physiquement au prêtre qui a abusé de son innocence, il choisit de passer aux aveux.
Que vaut la réputation d’une institution qui protège ses hommes et nie les abus et les cris
de révolte de ses enfants ? Si elle se construit sur le silence d’un équilibre à jamais perdu ?
. M. B.
Absence de Malika Boussouf
SOIT DIT EN PASSANT
02 Mai 2016
Absence de Malika Boussouf
Bonjour ;son billet pas publié hier pour la raison du 1 Mai par contre
celui du 30 Avril c'était le même que du 28.04.2016 et aujourd'hui aussi
on attend la suite ...
. zadhand