Une bague au doigt et les fesses à l’air !
SOIT DIT EN PASSANT
03 Avril 2016
Une bague au doigt et les fesses à l’air !
malika boussouf
journaliste, écrivaine
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Par Malika Boussouf
[email protected]
Il est des jours comme ça où, lorsqu’avec une amie nous décidons de nous retrouver pour déjeuner quelque part dans Alger,
je sais que nous commencerons par rendre grâce au ciel d’aller comme nous allons. Quelques petits bobos par-ci, par-là
mais qui n’en a pas ? —, avant de conclure que nous n’avons pas le droit de nous plaindre au regard de la détresse humaine
qui nous entoure.Je lui raconte, quand même, comment, avant de venir la rejoindre, je suis passée par le marché dans l’intention
d’acheter des avocats. Et je lui dis aussi comment j’ai renoncé à en acheter parce qu’ils coûtaient 2000 DA le kilo !
Plus chers qu’un kilo de viande ! Plus chers que 6 kilos de poulet ! En racontant ma brève tournée au marché, je suffoque
à moitié et mon amie avec moi. Nous nous demandons jusqu’où les marchands oseront pousser le bouchon parce qu’il n’y a,
décidément, plus de limites à rien ! Je trouve les prix qui se pratiquent indécents et scandaleux et j’aimerais bien connaître
la catégorie d’Algériens qui ne ressent aucune gêne à consommer à ce prix ! Mais ce n’est pas ce qui m’a le plus fait mal
au cœur. Là où mon sang n’a fait qu’un tour, c’est que ma grimace n’a pas du tout ému le marchand, sans doute vacciné
contre ce genre de réactions. Il sait que d’autres viendront lui acheter sa marchandise sans même lui en demander le prix.
Il a haussé les épaules, tourné les talons et s’en est retourné faire la causette à son voisin d’à côté. Comme il me fallait
impérativement des fruits, je me suis rabattue sur les oranges. C’est vrai qu’il y en a partout, mais à partir de 260 DA
dans un pays où les agrumes devraient être distribuées gratuitement. Les fraises à 400 DA, pourquoi pas ? Mais les roses,
importées du Kenya à 200 DA pièce, c’est le pompon ! A chaque fois que je vais au marché, je ne peux m’empêcher de repenser
à cette période méchante et sévère où le marchand de fruits et légumes, devant votre hésitation, vous regardait de travers
en vous assénant un «eddi wala khelli» (prends ou laisse). Un «laisse» qui voulait, en réalité, dire : «Dégage ! C’est pas pour toi !»
M. B.
De la délinquance au djihad
SOIT DIT EN PASSANT
04 Avril 2016
De la délinquance au djihad
malika boussouf
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Par Malika Boussouf
[email protected]
Il est des jours comme ça où il m’est impossible de détourner les yeux de cette Europe
prise en étau entre courses-poursuites et arrestations. Une Europe empêtrée dans
un terrorisme qui fait chanter les innocents pour galvaniser leur courage et anéantir
la peur. Pour avoir eu largement le temps d’intégrer les visions cauchemardesques
et les conséquences de la tragédie à notre quotidien, nous regardons la France et
la Belgique vivre au rythme des explosions. Et comme nous ne sommes pas
immunisés contre la mort, nous nous demandons si l’Algérie, qui échappe, pour l’instant,
aux calculs meurtriers de Daech, occupé, comme il est, à vouloir mater l’Occident,
ne risque pas, un jour, de replonger dans l’horreur. Au-delà de ces jeunes qui ont tout
à fait le droit de satisfaire leurs propres envies de réussir différemment, d’embrasser
autrement la vie active en allant chercher fortune ailleurs, il y en a qui pensent faire œuvre
utile en allant prêter main-forte à un mouvement terroriste aux visées hégémonistes.
Mais qui sont donc ces jeunes qui ne se sentent bien ni dans le pays qui les a vu naître ni
en harmonie avec celui de leurs parents ? Seraient-ils à ce point en panne d’idéal
pour aller grossir les rangs d’organisations barbares ou en mal de sensations fortes, fascinés
par ce qu’ils pensent être une aventure plus valorisante ?
Aveugles et sourds au danger ? Suicidaires et en rupture avec le monde dans lequel ils évoluent
et qui ne répond pas à leurs attentes ? Autour de Daech, composé d’un noyau dur d’idéologues,
se greffent, régulièrement, des convertis de la dernière heure et une multitude de paumés
en quête de modèles identificatoires.Mais il y a aussi ces jeunes, qui optent un jour, de façon
inattendue, pour le crime. Ils sont si gentils que l’on ignore tout des monstres qu’ils vont devenir.
De jeunes innocents qui se réveillent un matin avec une furieuse envie de tuer et de sacrifier
leur propre vie, ça existe ? La perspective de mourir offrirait plus de frissons à des milliers
d’individus gagnés à la cause de tueurs dont ils pensent qu’ils œuvrent à faire triompher
le bien sur une terre abîmée.
M. B.
Biométrique ? laisse, je s’occupe ! (suite)
SOIT DIT EN PASSANT
05 Avril 2016
Biométrique ? laisse, je s’occupe ! (suite)
malika boussouf
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Par Malika Boussouf
[email protected]
Il est des jours comme ça où, en lisant certains courriers inspirés par notre administration quand elle bat le rappel de
ses troupes, on réalise pourquoi au vu de travers aussi édifiants, nous ne réussissons pas à avancer dans le bon sens.
Est-ce que le consulat d’Algérie à New York n’aurait pas apprécié que l’on rende publics les reproches qui lui sont faits
par une ressortissante algérienne à laquelle il doit, entre autres, sa raison d’exister sur le sol américain ?
Dans un précédent billet, je reprenais un témoignage adressé au journal par une compatriote résidant à Chicago et
contrainte d’aller jusqu’à New York pour son dossier de passeport biométrique. Un autre Algérien m’écrit de Californie pour
me signaler des problèmes de la même veine, ainsi que ceux de sa fille résidant, elle, en Allemagne. Et puis,
il y a eu ce courrier de quelqu’un dont je doute fort qu’il soit un lecteur «ordinaire» comme il l’affirme, qui avoue qu’après
avoir entendu dire beaucoup de mal à propos de l’accueil au consulat, il est allé sur place constater, par lui-même,
le contraire : il nous raconte qu’il a été agréablement surpris par l’excellence du personnel diplomatique. Question
pourquoi devrait-on le croire lui, plutôt que la dame qui nous a écrit pour se plaindre ? En quoi serait-il plus crédible qu’elle ?
Il parle de 1000 dossiers traités par la mission mobile qui s’est déplacée à Chicago. D’où tient-il cette information et
qui l’a mandaté pour parler au nom des 1000 personnes concernées ?
La ressortissante qui nous a contactés s’est également basée sur le témoignage d’un père de famille qui, après s’être rendu
seul à New York, doit y retourner avec son épouse et ses cinq enfants. Pourquoi les deux numéros de la station mobile
ne répondent-ils pas ? A quoi servent-ils ? Cher «Nournourmama» qui tient tant à son anonymat, dans un cri d’orfraie,
vous ajoutez que la station mobile est une faveur pas une obligation. En qualité de qui parlez-vous ?
Seriez-vous le consul ou un responsable du consulat ?
M. B.
Biométrique_mise au point
SOIT DIT EN PASSANT
06 Avril 2016
Biométrique : mise au point
malika boussouf
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Par Malika Boussouf
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Il est des jours comme ça où je trouve bien que l’administration réagisse aux plaintes de nos expatriés dont
nous nous faisons l’écho, notamment pour attirer son attention.
Le ministère des Affaires étrangères nous a transmis une mise au point dont voici l’intégralité.
«Le billet publié par votre consœur Malika Boussouf, dans votre édition du 31/03/2016, sous le titre «Biométrique ?
laisse, je s’occupe», contient de nombreuses inexactitudes. Nous osons croire que cela procède plus d’un manque
d’informations que de malveillance de sa part.
1 : La procédure de collecte des empreintes biométriques est la même que ce soit à Chicago, New York, Alger ou
à Tamanrasset. Les citoyens sont tenus de compléter un dossier au préalable comprenant, notamment, l’acte de
naissance spécial «12 S». Sans ce prérequis, aucun enregistrement ne peut être pris en compte
c’est la règlementation qui s’applique à tous les Algériens sans distinction.
2 : Le déplacement d’une station mobile du consulat général à Chicago les 26 et 27 mars 2016 a été précédé,
comme toutes les opérations du genre et celles à venir, par une large campagne d’information (site internet du
consulat, emails, appels téléphoniques aux citoyens, participation des associations algériennes locales et volontaires)
suffisamment à l’avance. Les 1300 personnes qui ont respecté la procédure ont été enrôlées en seulement deux jours.
3 : Le personnel du consulat général est constamment à l’écoute, à la disposition et au service de l’ensemble de
la communauté algérienne pour clarifier cette procédure et l’ensemble des services consulaires aux citoyens.
Et nous ne doutons pas que votre chroniqueuse, et nous l’y invitons vivement, pourra prendre attache avec notre
nombreuse communauté aux Etats-Unis d’Amérique pour le vérifier.
4 : Les commentaires sur l’architecture de la salle d’attente et sur un supposé comportement de nos agents ne méritent pas
qu’on s’y attarde. Il faut savoir seulement que le consulat général dispose d’un nouveau siège entièrement rénové
en phase de finalisation (au fait, la salle d’attente dispose de 4 fenêtres contrairement à ce qui a été indiqué dans ce billet)
et de toutes les commodités, y compris d’un téléviseur grand écran passant en direct les informations et les programmes de
la télévision algérienne. De plus, un registre de doléances est accessible à l’ensemble des citoyens comme il est loisible
à toute personne de saisir directement les responsables du poste.
5 : Nous invitons Malika Boussouf à prendre la mesure de tous les défis qui se posent dans la satisfaction et la protection
de l’ensemble de notre communauté conformément à la loi et à nos engagements. Elle sera la bienvenue au consulat général
à New York et elle pourra ainsi vérifier si le contenu de son billet a un quelconque lien avec la réalité.
Dont acte ! Nos compatriotes apprécieront !
M. B.
Les caricatures assassines !
SOIT DIT EN PASSANT
09 Avril 2016
Les caricatures assassines !
malika boussouf
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Par Malika Boussouf
[email protected]
Il est des jours comme ça où je ne me pose même plus la question de savoir si l’indépendance
justifie l’irrévérence et s’il faut ou non défendre la liberté d’expression à n’importe quel prix !
Parce que lorsque je vois ce à quoi le mot liberté expose parfois et ce à quoi il encourage,
et j’insiste sur le parfois, je baisse les bras, écœurée à la seule idée que l’on puisse
confondre le droit à la parole pour lequel beaucoup d’entre nous se battent avec les agressions
auxquelles se livrent ceux qui sont censés ne pas ignorer à quoi exposent pareilles dérives verbales.
Lorsque la bouffonnerie emboîte le pas au grotesque qui va à son tour déchiqueter la mémoire de ceux
qui ne sont plus ou insulter la souffrance de ceux qui ne sont pas entendus, je n’apprécie pas
la subtilité du message. J’ai trouvé immonde la nouvelle une du journal satirique français Charlie Hebdo.
Pauvre Stromae ! Il a fait quoi pour mériter qu’un caricaturiste dont le cynisme à l’égard d’autrui n’est
plus à conter s’en prenne à son histoire personnelle méchamment inspiré par le titre de l’un de ses tubes ?
Sur l’indifférence du «sans talent» au mal qu’il peut faire aux autres, les avis se disent partagés.
On réagit en fonction de convictions propres à ceux qui soutiennent sans exclusive tous les torchons
commis par les porteurs d’une éthique décrite comme «résistante» et «combative» ou par penchants
islamophobes inhérents à ceux qui se planquent honteusement derrière le droit de tout dire pour ne pas
se poser la question de savoir si ce qu’ils font est susceptible ou non d’atteindre autrui.
Charlie Hebdo, par le trait du même caricaturiste, avait déjà commis l’injure de s’en prendre
à un enfant syrien mort noyé sur une plage turque alors que ses parents tentaient désespérément
de rejoindre une rive aux allures d’indépendance. Je ne veux pas croire qu’il ait vendu davantage
en représentant un petit Aylan promu, à l’âge adulte, au statut de «tripoteur de fesses». A quoi peut bien
rimer cette surenchère qui tue le talent quand la grandeur d’un métier ne vaut plus que par
la course à l’excès ? Et que reste-il à l’éthique de ceux qui survivent ?
M. B.
Les caricatures assassines !
SOIT DIT EN PASSANT
09 Avril 2016
Les caricatures assassines !
malika boussouf
journaliste, écrivaine
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Par Malika Boussouf
[email protected]
Il est des jours comme ça où je ne me pose même plus la question de savoir si l’indépendance
justifie l’irrévérence et s’il faut ou non défendre la liberté d’expression à n’importe quel prix !
Parce que lorsque je vois ce à quoi le mot liberté expose parfois et ce à quoi il encourage,
et j’insiste sur le parfois, je baisse les bras, écœurée à la seule idée que l’on puisse
confondre le droit à la parole pour lequel beaucoup d’entre nous se battent avec les agressions
auxquelles se livrent ceux qui sont censés ne pas ignorer à quoi exposent pareilles dérives verbales.
Lorsque la bouffonnerie emboîte le pas au grotesque qui va à son tour déchiqueter la mémoire de ceux
qui ne sont plus ou insulter la souffrance de ceux qui ne sont pas entendus, je n’apprécie pas
la subtilité du message. J’ai trouvé immonde la nouvelle une du journal satirique français Charlie Hebdo.
Pauvre Stromae ! Il a fait quoi pour mériter qu’un caricaturiste dont le cynisme à l’égard d’autrui n’est
plus à conter s’en prenne à son histoire personnelle méchamment inspiré par le titre de l’un de ses tubes ?
Sur l’indifférence du «sans talent» au mal qu’il peut faire aux autres, les avis se disent partagés.
On réagit en fonction de convictions propres à ceux qui soutiennent sans exclusive tous les torchons
commis par les porteurs d’une éthique décrite comme «résistante» et «combative» ou par penchants
islamophobes inhérents à ceux qui se planquent honteusement derrière le droit de tout dire pour ne pas
se poser la question de savoir si ce qu’ils font est susceptible ou non d’atteindre autrui.
Charlie Hebdo, par le trait du même caricaturiste, avait déjà commis l’injure de s’en prendre
à un enfant syrien mort noyé sur une plage turque alors que ses parents tentaient désespérément
de rejoindre une rive aux allures d’indépendance. Je ne veux pas croire qu’il ait vendu davantage
en représentant un petit Aylan promu, à l’âge adulte, au statut de «tripoteur de fesses». A quoi peut bien
rimer cette surenchère qui tue le talent quand la grandeur d’un métier ne vaut plus que par
la course à l’excès ? Et que reste-il à l’éthique de ceux qui survivent ?
M. B.