Tunisie ! A l’issue du 1er tour, Essebsi et Marzouki enregistrent
des scores au coude à coude : 39,46% pour le premier. 33,33%
pour le second. Purée ! Un score aussi serré, pour sûr qu’il y a eu…… fraude ! Si je comprends bien, et si je fais tout aussi bien les comptes, grosso modo, l’espoir, notre espoir de changement se résume pour l’heure à deux propositions : une élection anticipée dans un contexte d’Etat voyou qui fraude tout scrutin. Et un appel à l’intervention de l’armée, alors qu’on a passé toute sa vie à revendiquer la démilitarisation de la politique algérienne et l’éradication de l’Etat DRS. Ya Bouguelb ! N’avoir que çà comme issues, ça me met le moral par terre, à plat ! Pour paraphraser librement l’autre, le changement, c’est pas exactement pour maintenant, c’est pour plus tard, apparemment très très tard ! Et puis, là en plein spleen, la tête entre mes mains, le café mauvais refroidissant dans la tasse, qui vient s’immiscer entre les nuages qui me rongent le cerveau et l’assombrissent ? Aung San Suu Khy ! Oui ! La militante birmane ! L’immense figure des droits de l’Homme portés en religion de combat. La Nobel de la paix 1991. Celle qui a fait reculer les baïonnettes, faisant poindre piteusement leurs dards vers le sol par la seule force de ses convictions et de son courage à affronter. A sortir. A refuser de s’alimenter. A sacrifier sa vie, sa famille, son époux, ses enfants. A s’affranchir des biens terrestres, des offres alléchantes, des deals mafieux, et de tout confort pour ne se consacrer qu’à la libération de son pays de la junte. Cette immensité-là humaine, cet univers de femme, ce continent de force de changement ne veut plus quitter ma tête, m’obsédant presque en me murmurant en fond, cette question : qui ? Juste ça : qui, chez toi est capable de sortir du salon, de tout abandonner derrière lui ou elle, de tout bazarder, la scolarité des mioches dans les meilleures écoles et universités d’ici et surtout de là-bas, la limousine, le cabinet carburant à fond, les meetings au chaud dans des salles acquises et même protégées par la police, les négociations à l’approche des changements de gouvernement pour quelques maroquins lancés en miettes comme on balancerait des graines aux pigeons gourmands ou plus primitivement la chaleur d’un bon lit douillet, d’une couette épaisse et d’un sommeil chez soi, tous les soirs ? Qui chez toi peut tenter de rentrer dans la robe de Aung San Suu Khy ? Qui, chez toi peut arrêter de se cacher, tantôt, derrière les journaux amis pour les utiliser comme boucliers humains ou comme compagnies de francs-tireurs chargées d’ouvrir des brèches dans l’édifice, tantôt, derrière les chars et les bidasses pour mener le coup de force ? Qui ? Posez-vous la question. Sans colère. Sans animosité. Sans viser personne. Mais juste avec assez d’attente insistante dans les yeux pour exiger une réponse. Qui se sacrifiera pour être la figure, cette figure capable de faire plier, fondre les grilles du palais, plongeant piteusement vers le sol leurs dards menaçant et ouvrant ainsi le chemin. Quiiiiiiii ? Je fume du thé et je reste éveillé, le cauchemar continue.
H. L. |