14 Fonctions militaires et civiles exigent la nationalité algérienne exclusive
Un projet de loi et des interrogations
le 15.09.16 | 10h00
Les personnes nommées à ces postes sont tenues, en vertu de l’article 3, de présenter dans un délai
de 6 mois une déclaration sur l’honneur attestant leur jouissance de la nationalité algérienne exclusive.
Ayant fait l’objet d’une polémique retenant l’attention aussi bien de la
classe politique que de l’Algérien lambda, le projet de loi fixant la liste
des hautes fonctions de l’Etat qui requièrent l’exclusivité de la nationalité
algérienne est désormais connu. Quatre feuillets et cinq articles résument
ce projet de texte dont l’opportunité reste néanmoins une énigme pour les
plus avertis. Selon l’article 1er de ce projet de loi, la liste des hautes
responsabilités de l’Etat et des fonctions politiques dont l’accès requiert la
nationalité algérienne exclusive comprend les postes de président du Conseil
de la nation, de l’Assemblée nationale, du Conseil constitutionnel et ceux de
Premier ministre, de membres du gouvernement, de secrétaire général du
gouvernement, de premier président de la Cour suprême, de président du
Conseil d’Etat, de gouverneur de la Banque d’Algérie, de responsables des
organes de sécurité, de président de la haute instance indépendance de
surveillance des élections, mais aussi de chef d’état-major de l’armée, des
commandants des forces armées, ceux des régions militaires ainsi que toute
autre responsabilité militaire définie par voie réglementaire.Les personnes
nommées à ces postes sont tenues, en vertu de l’article 3, de présenter dans
un délai de 6 mois (à partir de la publication de la loi) une déclaration sur
l’honneur attestant leur jouissance de la nationalité algérienne exclusive. Cette
déclaration est déposée devant le premier président de la Cour suprême, qui
devient ainsi juge et partie, puisque lui-même est soumis à la même procédure ;
toute fausse déclaration expose son auteur à des sanctions non précisées par
le projet de loi, qui n’a pas défini la partie chargée de la vérification de ces
attestations. Cela rappelle étrangement les procédures de la déclaration de
patrimoine imposée aux hauts fonctionnaires de l’Etat dès leur nomination et à
la fin de leur mission, devenues de simples formalités souvent volontairement
ou involontairement oubliées. Mieux encore, le projet de loi cite, parmi les postes concernés par la nationalité algérienne exclusive, ceux de chef d’état-major de
l’armée, de commandants des forces armées, de commandants des Régions
militaires, mais aussi d’autres fonctions «définies par voie réglementaire» dont
on ne connaît pas les détails. L’on ne comprend pas la nécessité de lister ces
postes parmi ceux qui exigent la nationalité algérienne exclusive. Et l’on se
demande comment on a fait par le passé. Le projet de loi évoque les plus hauts
postes, mais laisse le suspense peser de tout son poids en ce qui concerne
«toutes les autres responsabilités militaires» qui, en vertu de l’article 2,
«seront définies par voie réglementaire». En réalité, ce projet de loi suscite plus
de questions qu’il n’apporte de réponses à des situations où l’on a déjà laissé
courir la rumeur sur une prétendue présence de binationaux dans les
gouvernements précédents. Pour les plus avertis, ce projet de loi trouve son
explication dans cette lutte acharnée autour du pouvoir, à l’approche de
l’échéance 2019. Tous nos interlocuteurs s’accordent à dire que l’article 63 de
la nouvelle Constitution, d’où découle le projet de loi, n’existait pas dans les
différentes moutures de la nouvelle Loi fondamentale : «A la surprise de tous,
il a été introduit à la dernière minute. Les détails de sa mise en application
montrent qu’il ne s’agit là qu’un moyen de chantage et/ou de neutralisation
qu’utilisent les uns et les autres contre leurs détracteurs en prévision des
prochaines échéances électorales. Si on laisse les institutions de la République
faire leur travail, les postes sensibles et les fonctions militaires ne peuvent être
occupés que par des Algériens et exclusivement Algériens.»
Salima Tlemçani