Ankara «déterminé» à combattre les Kurdes
Crise syrienne
le 29.08.16 | 10h00

La Turquie considère le Parti de l’union démocratique (PYD) et sa branche armée, les Unités
de protection du peuple (YPG),comme des organisations terroristes.
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Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a déclaré que son pays veut lutter avec
«la même détermination» contre les combattants kurdes et le groupe EI
L’armée turque a mené hier d’intenses bombardements dans le nord de
la Syrie sur les positions des djihadistes de l’Etat islamique (EI) et les Kurdes,
rapporte l’AFP. L’opération turque vise à chasser l’EI de sa frontière et à stopper
la progression des autonomistes kurdes. La Turquie considère le Parti de l’union démocratique (PYD) et sa branche armée, les Unités de protection du peuple
(YPG), comme étant des organisations terroristes. Bien que celles-ci comptent
parmi les alliés des Etat-Unis dans la guerre qu’ils mènent contre l’EI.
En parallèle,
lors d’un discours à Gaziantep, au sud-est du pays, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a déclaré que son pays veut lutter avec «la même détermination» contre
les combattants kurdes et le groupe EI. «Nous avons la même détermination à
combattre le PYD en Syrie que l’EI», a-t-il observé.
Et de poursuivre «Nous
n’accepterons aucune activité terroriste à, ou près de, nos frontières.» En Syrie,
les Kurdes ne sont pas reconnus comme citoyens. C’est avec les soulèvements de
2011 qu’ils ont eu droit à la nationalité syrienne. La création en 2013 d’une
administration autonome par le PYD dans trois cantons du nord-est de la Syrie abandonnés par le régime de Bachar Al Assad est observée avec méfiance par Ankara.

Le syndrome
Avant le spectaculaire rapprochement syro-turc des années 2000, Damas et Ankara se sont retrouvés au bord de la guerre en 1998 en raison du soutien de Damas au Parti
des travailleurs du Kurdistan (PKK) en Turquie. Le mouvement kurde disposait alors de camps d’entraînement dans la Bekaa libanaise et son leader, Abdullah Öcalan,
fréquentait la capitale syrienne.
Damas expulse Öcalan et évite ainsi un conflit armé
avec son voisin avec qui il développe une coopération multiforme qui s’est perpétuée jusqu’aux premiers mois de la crise. Côté Irak, la Turquie a cherché à substituer un
autre interlocuteur au PKK, à savoir le Parti démocratique du Kurdistan (PDK) irakien. Traditionnellement hostile à tout mouvement autonomiste kurde dans la région, le gouvernement turc a longtemps entretenu des relations froides avec le PDK.

Une méfiance d’autant plus grande que le PDK est dirigé par Massoud Barzani, fils
de Mustapha Barzani, l’une des grandes figures historiques du mouvement kurde.
Dès l’été 2012, alors que le PYD se renforce en Syrie, la Turquie se rapproche du PDK.
Ce rapprochement s’est traduit par la visite du ministre turc des Affaires étrangères, à l’époque, Ahmet Davutoglu, dans la ville de Kirkouk, contrôlée par le PDK,
le 2 août 2012. Suit la rencontre de Barzani et d’Erdogan à Diyarbakir, ville kurde de Turquie, en novembre 2013.
Le PDK entretient des rapports hostiles avec le PYD.
Il collabore pleinement avec Ankara pour «endiguer» sa puissance dans la région.
En décembre 2013, Barzani a décidé de fermer le pont de Simalka, joignant le
Kurdistan irakien à la zone contrôlée par le PYD, suite au refus de celui-ci d’entériner
les accords Ebril I, qui prévoyaient une cogestion du Nord-Est syrien par le PYD et les autres partis kurdes de Syrie, proches des révolutionnaires du Conseil national syrien.

Aux yeux d’Erdogan, le caractère modéré du PDK et sa volonté de coopération avec Ankara en font un partenaire idéal pour le règlement de la question kurde en Turquie. L’objectif de l’invitation de Barzani à Diyarbakir, en 2013, consiste à présenter aux
Kurdes de Turquie un nouveau représentant de leur cause et d’en faire une alternative
au PKK. Erdogan a refusé d’intervenir dans la bataille de Kobané contre les djihadistes.

Entre-temps, il a favorisé l’arrivée des peschmergas du Kurdistan irakien dans la ville.
Il s’agit pour Ankara de renforcer par cette décision la position du PDK à la frontière
turque et leur légitimité à incarner la cause kurde, tout en marginalisant le rôle du PYD dans sa lutte face à l’EI. Les Kurdes syriens ont remporté une victoire importante, avec
le soutien de la coalition internationale antidjihadistes, le 26 janvier 2015 en chassant
l’EI de Kobané, frontalière de la Turquie, après plus de quatre mois de violents combats. Aussi, ils ont profité de la déroute des rebelles face au régime pour s’emparer de
localités près de la frontière turque.
La Turquie a bombardé régulièrement les YPG
depuis l’été 2015 jusqu’au cessez-le-feu du 27 février. En Irak, l’effondrement de l’armée en juin 2014 a laissé les Peshmergas en première ligne face à l’EI, aussi avec le soutien
de la coalition internationale antidjihadistes. Le Parlement turc a autorisé le
2 octobre 2014 une intervention militaire en Syrie et en Irak contre l’EI, mais les
forces turques positionnées à la frontière face à Kobané sont restées immobiles.


Amnay idir