Saïd Mekbel, billettiste de talent, a été assassiné le 3 décembre 1994.

Cela s’est passé un 3 décembre 1994, assassinat de Saïd Mekbel. Son dernier billet
(voir ci-contre) paru dans l´édition du « Matin » Ce voleur qui... Les lecteurs du Matin
lisaient la chronique « Mesmar J’ha » pour la dernière fois.
Ce voleur qui, clans la nuit, rase les murs pour rentrer chez lui, c’est lui.
Ce père qui recommande à ses enfants de ne-pas dire dehors le méchant métier
qu’il fait, c’est lui. Ce mauvais citoyen qui traîne au palais de justice, attendant de passer
devant les juges, c’est lui. Cet individu, pris dans une rafle de quartier
et qu’un coup de crosse propulse au fond du camion, c’est lui. C’est lui qui,
le matin, quitte sa maison sans être sûr d’arriver à son travail et lui qui quitte,
le soir, son travail sans être sûr d’arriver à sa maison. Ce vagabond qui ne sait plus
chez qui passer la nuit, c’est lui. C’est lui qu’on menace dans les secrets d’un cabinet officiel,
le témoin qui doit ravaler ce qu’il sait, ce citoyen nu et désemparé... Cet homme qui fait
le vœu de ne pas mourir égorgé, c’est lui. C’est lui qui ne sait rien faire de ses mains,
rien d’autres que ses petits écrits. Lui qui espère contre tout parce que,
n’est-ce pas, les rosés poussent bien sur les tas de fumier.
Lui qui est tout cela et qui est seulement journaliste.