Où va l’Algérie ? Je n’en sais rien ! C’est le genre de questions
qu’il faut poser à ceux qui la dirigent. Et qui dirige l’Algérie ?
Ah ! Ça, par contre, je le sais !
Un maçon et un vendeur de puces ! C’est le soir où t’as aucune chance de les joindre. A supposer que tu veuilles les joindre ce soir-là. N’essaie même pas ! Et ne crois pas, sous prétexte que c’est urgent à tes yeux, qu’ils vont faire entorse et te répondre. Walou ! Ce soir-là, tous leurs téléphones sont en mode casher ! Ils ne rateraient pour rien au monde le dîner annuel du CRIF, le Conseil représentatif des institutions juives de France. On m’a raconté que des personnalités font même coïncider leur vaccin annuel contre la grippe avec cet événement afin d’en être, de ne pas le manquer à cause d’un vilain coup de froid, un bobo hautement malvenu et forcément antisémite, bien sûr. Une certaine année, un haut dignitaire français ayant été victime d’une mauvaise chute aux sports d’hiver, avait malgré tout tenu à assister au dîner du CRIF, une jambe dans le plâtre jusqu’au genou et les deux mains dans les plats. J’ai horreur de toute forme de stigmatisation. Je ne supporte pas les gugusses qui vont chercher des traces approximatives d’étoile de David dans les claquettes que nous importons pour aussitôt dénoncer un coup du Mossad israélien, j’ai encore plus horreur des margoulins qui usent et abusent du cliché raciste du «juif avare et détenteur des leviers de la finance». Ça m’insupporte au plus haut point. Le propos n’est donc pas là. Mais je ne peux m’empêcher, sociologiquement, et surtout psychologiquement, de m’interroger sur cette observance nationale française scrupuleuse, féroce et hyper-pointilleuse du rendez-vous dînatoire du CRIF. Y être ou ne pas y être serait devenu un critère fondamental dans la vie hexagonale. Une sorte de tri sélectif. Chaque année, à la même période, le facteur est guetté comme le Messie. Apportera-t-il dans sa besace le fameux carton ? Serais-je parmi les élus ? Ne pas être convié à manger au dîner du Conseil, c’est comme une disgrâce. Le lendemain, aux ministères, aux sièges des grosses entreprises du CAC40 ou dans les couloirs des médias qui comptent, on vous regarde autrement selon que vous y avez été à ce dîner ou pas. Les gens chuchotent dans votre dos si on ne vous y a pas vu. La lettre de licenciement n’est jamais loin après un tel désaveu. J’exagère, bien sûr. Comme tout bon sémite, j’exagère. Mais pas autant tout de même que ces cohortes de fidèles qui, chaque année, qu’il pleuve, qu’il vente ou qu’il fasse beau sur le ciel de la laïcité brandie à tout-va, vont faire queue aux tables garnies du CRIF et de ses signes religieux ostentatoires. Ce doit être un machin, un truc qui m’échappe et qui produit cet effet aimant terrible sur les convives. Peut-être le menu ? Oui, au fond, c’est moi qui dois être parano. Je me fais des idées. Alors qu’il ne s’agit que de bouffe. Paris est la ville de la gastronomie, ne l’oublions jamais. Allez ! Je préfère penser qu’il ne s’agit que de menu et pas d’autre chose. Ainsi apaisé, je peux alors fumer du thé casher et rester éveillé à ce cauchemar hallal qui continue.
H. L. |