La lettre ouverte de Nacer Boudiaf au président Bouteflika

Commémoration du 24ème anniversaire de l’assassinat du président Boudiaf
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Ce jour-là le 29 juin 1992, le président Mohamed Boudiaf est assassiné
09:05 mercredi 29 juin 2016 | Par Nacer Boudiaf
NACER BOUDIAF, FILS DU PRÉSIDENT MOHAMED BOUDIAF, ASSASSINÉ LE 29 JUIN 1992.jpg
Monsieur le Président,
Cela fait vingt-quatre ans que Mohamed Boudiaf, alors président du Haut
Comité d’État, d’une Algérie en tourmente, est tombé lâchement assassiné.
La justice avait considéré cet assassinat comme un « acte isolé ».
Aujourd’hui, je m’adresse à vous à plusieurs titres.
Je m’adresse à vous en tant que Premier Magistrat du pays. L’assassinat
de Boudiaf n’est pas un mystère. Ce n’est qu’une affaire d’injustice. Car
comme le dit Edmund Burk : « Là où commence le mystère, finit la justice ».
Suis-je encore assez naïf pour croire en la justice chez nous, une justice qui
mettra fin au mystère ?Je m’adresse à vous, alors que vous n’étiez pas au
pouvoir au moment de son lâche assassinat. Mais la vérité est que l’écrasante
majorité des Algériens avait compris, dès l’instant de l’assassinat, l’enjeu de
ce crime pour ceux qui ont cru en bénéficier.Malheureusement, depuis la sentence
de « l’acte isolé », c’est le silence qui prévaut car comme le dit Shakespeare
« En vérité, bientôt le rôle qui siéra le mieux à l’esprit est le silence, et il n’y aura
plus que les perroquets qu’on pourra louer de parler ».
Je m’adresse à vous dans le contexte des récents amendements de la Constitution
qui laissent croire à une meilleure considération pour la justice en Algérie.
Pourrais-je espérer que cette meilleure considération redonne à Mohamed Boudiaf
la considération qu’il mérite pour avoir sacrifié sa vie pour l’Algérie.
La considération pour Mohamed Boudiaf ne sera mesurée que par la promptitude
de la justice algérienne à réparer cette injustice qui a trop longtemps duré et entouré l’assassinat de celui qu’on a appelé -de son paisible exil- pour venir sauver l’Algérie.
Seule la réouverture du procès de son assassinat exprimera au peuple les réelles
intentions du pouvoir en matière de justice et prouvera au monde extérieur que nous n’avons pas besoin d’une justice venue d’ailleurs pour mettre fin à l’impunité du lâche assassinat de Mohamed Boudiaf.Le 29 juin 1992, le président algérien est froidement assassiné alors qu'il tient un discours à la maison de la culture d'Annaba. Un espoir disparaît et l'Algérie s'enfonce dans ce qui sera appelé la décennie noire.
Algérie: d'anciens dirigeants au cimetière pour l'hommage à Boudiaf
Le « J'accuse ! » de madame Boudiaf
« Les autres pays nous ont devancés par la science et la technologie.
L’islam… » . Ce sera le dernier mot prononcé par Mohamed Boudiaf.
Une explosion à droite de la tribune où il se tient vient brutalement
d’interrompre son discours. Quelques secondes après il est criblé de balles
par un homme en uniforme armé d’une mitraillette. L’itinéraire de ce combattant
de l’indépendance au visage émacié, qui a consacré sa vie à l’Algérie,
se conclut dans le bruit et le sang.