http://bleuvif.b.l.pic.centerblog.net/f8d7140a.gifMarc Maury, speaker décathlonien_ 28/05/16 - 09h01
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La voix de Roland-Garros, c'est lui. Marc Maury nous accordé un entretien en plein match pour nous permettre de comprendre le métier de speaker et de connaître l'homme qui se cache derrière les haut-parleurs des événements sportifs majeurs en France. Un timbre chaud, une intonation façon bande-annonce de blockbuster et, surtout, une voix devenue familière des amateurs de sport. Marc Maury est, pour la douzième année à Roland-Garros, l'homme qui annonce les joueurs et joueuses lors de leur montée sur les grands courts de la Porte d'Auteuil ou qui les présente lors l'échauffement d'avant-match. Au four et au moulin durant la quinzaine parisien, l'homme aux 600 fiches manuscrites a accepté de prendre le temps de se dévoiler, de se pencher sur ce métier singulier, qu'il qualifie de "mise en valeurs", et d'évoquer ses excellents contacts avec les Belges. Interview bord de terrain.
Daniel Mangeas, la voix légendaire du Tour de France, disait: "on ne devient pas speaker, on naît speaker". Partagez-vous ce point de vue?
Je pense que oui. On l'a en soi. Il faut être un peu extraverti, il faut avoir envie d'exprimer des choses, avoir envie de parler. Petit déjà, j'étais fou de sport. Vers 8-10 ans, je faisais des statistiques avec des temps de courses en athlétisme. C'est quelque chose qui m'a toujours plu. Et puis, il y a un aspect transmission de passion. J'ai été prof d'EPS (Education Physique et Sportive), j'ai développé un côté pédagogue. J'ai aussi beaucoup travaillé en télévision, comme commentateur ou consultant.
Quel est le secret du métier?
Comme le je disais, c'est une forme de don. Il y a aussi le timbre de voix, notre outil. On travaille le phrasé, l'élocution, on fait attention à notre prononciation, au rythme. En bon touche-à-tout, j'ai suivi des cours d'arts dramatiques. J'ai joué dans des comédies, des séries télé, des pièces de théâtre. Je me suis servi de ces expériences pour "placer" ma voix. Et j'ai dû faire un choix milieu des années 90 entre la comédie et mon métier actuel.
https://youtu.be/Q2dLjiYZXFY
Comment êtes-vous devenu speaker?
Au départ, c'était loin d'être une profession. Une année, blessé, je me présente aux championnats de décathlon, que je pratiquais à haut niveau, en alternance avec le rugby selon les saisons. L'entraîneur national vient me trouver et me dit : Je t'ai entendu parler, tu aimes ça, tu vas prendre le micro et expliquer au public présent ce qu'est le décathlon. Donc j'ai parlé pendant deux jours, durée de la compétition. J'ai expliqué ce sport aux 200 spectateurs présents dans le stade et à un jeune journaliste de l'Equipe qui n'en avait aucune notion. Et je me suis pris au jeu. En 1983, j'ai commencé à monter des animations un peu plus importantes avec la fédération. Quatre ans plus tard, j'étais la voix française (langue officielle de la fédération internationale de l'athlétisme) aux championnats du monde à Rome. Cela m'a ouvert les portes des grands meetings de France époque Bubka, Carl Lewis, etc. Cela représentait quatre mois dans l'année, mais au fur à mesure, mon activité s'est étoffée. Fin 1993, on m'a demandé d'adapter ce format au tennis. L'ATP venait d'autoriser les animations musicales et les interviews des joueurs sur le terrain. La sauce a pris et on est venu me chercher pour d'autres événements: le rugby, le badminton, la natation, le marathon de Paris. Dès 1995, j'en faisais un métier à plein-temps.
Roland-Garros est venu naturellement?
Oui, mais plus tard. J'ai débuté en 1994 au tournoi de Lyon, j'ai enchaîné à Bercy. L'année d'après, Marseille, Toulouse et Monte-Carlo, où je me rends chaque année depuis. Et puis ça n'a pas arrêté. Pour arriver en 2004 à Roland-Garros
https://youtu.be/wXfl5MIUSqs
Votre rythme de travail est effréné en tournoi. Comment se compartimente une journée à Roland-Garros?
Il y a une grosse préparation en amont. J'ai plus de 600 fiches manuscrites détaillées sur le tennis. Je les réactualise moi-même, en manuscrit. Je prépare souvent la veille des matches celles qui vont me servir pour le lendemain. J'arrive assez tôt au stade pour régler les derniers détails ou faire des mises à jour de dernière minute. Ensuite, il y a un travail avec l'équipe marketing ou vidéo, au sujet des annonces éventuelles ou des cérémonies qui peuvent se dérouler en journée sur le court central. Le reste du temps, je suis les matches pour en connaître le déroulement, même si depuis quelques années, à Roland, ce sont Cédric (Pioline), Fabrice (Santoro) et Marion (Bartoli) qui interrogent joueurs et joueuses sur le court. Dans les autres tournois, je m'en charge. Il est donc logique pour les interviewer de suivre un minimum les rencontres. On est partie prenante du début jusqu'à la fin. Il y a un rythme à respecter. Je suis partout, dans mon bureau, devant la télé, ou assis sur le côté du terrain.
Vos notes sont manuscrites. Une aversion contre la technologie ?
Non pas du tout. Je ne suis pas rétrograde (sourire). C'est une question de sensation. En les écrivant, je les retiens plus facilement.
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Vous avez vu passer des générations de joueurs. Avez-vous senti une évolution dans leur approche vis-à-vis du public?
À mes débuts, les joueurs voulaient s'ouvrir. Jusqu'alors, il y avait un mur entre eux et le public. Les médias étaient leur seul contact. Leur tendre le micro à même le court a tissé un lien avec le public. Les joueurs se sont tout à coup ouverts. Les premières fois, je les ai tous vus, pour les briefer, les alerter de la difficulté de l'exercice. Mon objectif n'est pas d'être polémique, sauf si le joueur éprouve le besoin de s'expliquer sur un fait de match. Mais ce n'est pas mon rôle de les mettre en difficulté. On n'est pas dans le journalisme. Mon métier est une mise en valeurs du joueur et faire le lien avec le public.
Jamais eu de soucis?
Non, tout c'est toujours très bien passé à quelques exceptions. Olivier Delaitre, joueur français des années 80-90, avait très peur de parler au micro, par manque de confiance. Il avait vu Henri Leconte se faire siffler à Paris quand il s'était adressé au public. Il a toujours refusé mes interviews avant d'accepter au bout de deux ans. Boris Becker était aussi assez tendu; le public ne l'intéressait pas. Les premières fois, il me fixait du regard. Il comprend le français, donc il suivait ma traduction, mais il n'osait pas décrocher mon regard. Et je ne devais pas le quitter yeux. D'autres, par contre, excellent dans cet exercice. Des Agassi ou Djokovic sont très à l'aise. Avec Rafa, c'est différent: la première fois, en 2003, à Monte-Carlo, il m'annonce méconnaître l'anglais. Je l'ai rassuré, l'ai interrogé avec mes quelques notions d'espagnol et, depuis lors, on continue à parler en espagnol. C'est un vrai bonheur, il y a une connivence qui se crée entre eux et nous.
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Une personnalité plus sympa ou accessible?
Ils le sont tous. C'est rare d'avoir quelqu'un de renfermé. Et puis, je les croise souvent. Sur certains tournois, je suis avec eux dans le vestiaire, on prend le temps, on parle. Cela installe une confiance. Cela se passe très bien avec tout le monde. Djokovic est évidemment très agréable. Nadal a toujours eu une attitude sympa. Et que dire des joueurs belges? J'ai un rapport fantastique avec eux. Avec David, c'est à vie. Cela remonte à son premier Roland, en 2012, et son huitième de finale contre Roger. À la fin du match, je demande à Roger s'il accepte de répondre à des questions en même temps que David. Il me dit "oui" avant de se ressaisir et de s'inquiéter si cela ne dérange pas David. Un geste super respectueux. Et puis, la suite, avec l'anecdote des posters dans la chambre, vous la connaissez. Cela a créé un truc de spécial. Comme avec Justine, j'ai toujours eu d'excellents rapports.
https://youtu.be/xPViRXzqr9s
QUIZZ
Au bout de toutes ces années, Marc Maury a compilé une quantité incalculable d'informations sur le tournoi et les joueurs. Mémoire vivante de Roland-Garros, il a accepté de se prêter au quizz spécial Roland:
Quel est le premier français à avoir remporté Roland-Garros d'après-guerre?
Marcel Bernard qui a été après Président de la Fédération Française de Tennis.
Le nombre de Grand Chelem remportés par Djokovic?
(Hésitation) 11!
Combien de fois Justin Henin a-t-elle remporté Roland-Garros?
3, non 4! J'ai eu un blanc.
La plus jeune gagnante du simple dames?
Monica Seles (16 ans et 6 mois en 1990)
Combien de matches avait remporté Nadal avant sa défaite en 2009 contre Soderling? 38? (Réponse: 31).
Le match le plus long chez les hommes?
6h33 entre Santoro et Clément, mais c'était en 2 jours. Mais il y a aussi Paul-Henri Mathieu me semble-t-il (victoire contre Isner en 5h41 en 2012) .
Finale dames la plus courte? Cela s'est fait il y a pas longtemps...Sharapova ? Non, Steffi Graf contre Zvereva!
Le noms des vainqueurs hommes et dames en 2004, année de votre arrivée? Gaudio et Myskina
Doubles messieurs 2004? Les Belges...Olivier et Xavier!
Finaliste dame l'an dernier? Safarova.
Question subsidiaire:
Qui va gagner en 2016? Alors chez les messieurs, moi je vois bien Djoko. C'est le favori. Chez les dames, il va y avoir une surprise. Je ne suis pas sûr que Serena va aller au bout. J'ai pas de nom, mais il y aura une nouvelle gagnante.