Un TGV Chine-Etats-Unis ? Cartes et d�tails d'un projet d�ment

 Les autorit�s de P�kin envisagent de construire une ligne ferroviaire � grande vitesse de 13 000 kilom�tres reliant la Chine aux Etats-Unis. Le plus long tunnel du monde permettrait de relier l'Asie � l'Am�rique.

D�couvrez ce projet pharaonique



Cela pourrait �tre le projet ferroviaire le plus fou de l'histoire. Des officiels chinois r�fl�chissent � la construction d'une ligne de chemin de fer reliant leur pays aux Etats-Unis via le d�troit de B�ring, au nord de l'oc�an Pacifique. La nouvelle a �t� publi�e d�but mai dans le journal gouvernemental Beijing Times. "Nous sommes en phase de discussion" assure Wang Mengshu, le monsieur chemin de fer de l'acad�mie chinoise d'ing�nierie. Le journal China Daily surench�rit sur cette ligne Chine-Russie-Canada-Am�rique en assurant que "la technologie n�cessaire existe", mais que "les d�tails restent � finaliser". Des d�tails ? Il faudra obtenir l'aval des pays concern�s (Russie, Canada, Etats-Unis), mais aussi entamer un chantier dont la dur�e peut se compter en d�cennies.



De Shanghai � P�kin, la voie � grande vitesse existe d�j�. Mise en service en 2011, la LGV, longue de 1318 kilom�tres, est parcourue � 300 km/h par les trains chinois. Sur�lev�e sur plus de 80% du parcours, elle traverse des zones dens�ment peupl�es. C'est au nord de la capitale que tout reste � b�tir. La ligne transcontinentale pourrait traverser Harbin, m�tropole de 10 millions d'habitants du nord de la Chine, avant de franchir la fronti�re. Apr�s avoir crois� la route du Transsib�rien, la voie pourrait continuer sa course vers Magadan, l'un des ports les plus septentrionaux du Pacifique. Direction ensuite le d�troit de B�ring...

Le d�troit de B�ring s�pare l'Asie et l'Am�rique. Largeur minimale : 82 kilom�tres. Les ing�nieurs chinois envisageraient la construction d'un tunnel de 200 kilom�tres de long pour relier les deux continents. C'est quatre fois la longueur du tunnel sous la Manche, qui avait r�clam� sept ans de travaux. Si les eaux du Pacifique nord sont peu profondes, un chantier dans cette zone serait tr�s complexe. D'abord en raison de la faible main d'�uvre disponible dans la r�gion (la population s'�l�ve � 50 000 personnes c�t� russe, soit 0,07 habitant au kilom�tre carr�). Ensuite � cause d'un climat tr�s rigoureux : ici, les temp�ratures sont n�gatives pendant la moiti� de l'ann�e

Apr�s avoir franchi le d�troit de B�ring, la voie pourrait traverser l'Alaska. Les trains emprunteraient ensuite la vall�e s�parant la Cha�ne C�ti�re et les Montagnes rocheuses pour gagner Vancouver. De l�, les grandes villes de la c�te Pacifique am�ricaines sont accessibles : Seattle, Portland, San Francisco ou Los Angeles. Dans cette r�gion du monde, les lignes de trains sont peu denses et quasi exclusivement consacr�es au fret. D�s le d�but du XXe si�cle, le czar de Russie avait envisag� une jonction avec les Etats-Unis. Un si�cle plus tard, des officiels russes �voqu�rent eux-aussi une liaison intercontinentale. Co�t estim� du tunnel russe : 55 milliards d'euros.



La Chine a l'habitude des d�fis ferroviaires. En quelques ann�es seulement, le pays s'est construit le plus vaste r�seau de lignes � grande vitesse du monde. Entam� dans les ann�es 1990, ce programme cherche � r�duire les distances colossales s�parant les villes chinoises. La premi�re v�ritable LGV a �t� inaugur�e en 2007. Aujourd'hui, le pays compte plus de 10000 kilom�tres de voies o� les trains peuvent d�passer les 200 km/h. C'est quatre fois plus que la France. La ligne P�kin-Canton (Guangzhou) est la plus longue du monde : elle traverse zones urbanis�es et rizi�res sur 2300 kilom�tres en huit heures. Les rames, autrefois achet�es � l'�tranger (Siemens, Bombardier...), sont aujourd'hui produites sur place. Comme le CRH380A, capable d'attendre 486 km/h lors d'essais. Selon les chiffres officiels, 1,3 million de personnes circulent chaque jour dans un train � grande vitesse chinois.

La Chine n'a pas encore tranch� entre les diff�rentes technologies ferroviaires. Si pour l'instant, les grandes lignes actuelles sont de conception classique (alimentation �lectrique, sur rail, � l'instar de notre TGV), la sustentation magn�tique pourrait �tre une alternative encore plus rapide pour rapprocher Asie et Am�rique du Nord. Inaugur� en 2004, le Shanghai Transrapid relie le centre-ville � l'a�roport en sept minutes et vingt secondes avec des pointes � 431 km/h. La rame, b�tie par un consortium allemand (Thyssen-Krupp et Siemens), "flotte" au-dessus d'un guide de b�ton, port� par des piliers. Autre hypoth�se � long terme : l'Hyperloop. Promu aux Etats-Unis par le milliardaire Elon Musk, cette technologie qui rel�ve encore de la science-fiction envisage de propulser des capsules dans des tubes � basse pression � plus de 1200 km/h.

Le TGV chinois doit-il freiner sa progression ? En 2011, deux rames entrent en collision pr�s de Wenzhou � cause d'un signal d�fectueux. Quatre voitures tombent d'un viaduc et s'�crasent en contrebas. L'accident fait 40 morts. La catastrophe a aliment� une contestation sans pr�c�dent : les citoyens et m�dias chinois avaient r�clam� la d�mission d'officiels, une chasse � la corruption et un moratoire sur la construction de nouvelles lignes. Les chantiers ont repris quelques mois plus tard, � la m�me allure. Seule concession : la vitesse maximale en circulation commerciale a �t� r�duite de 350 � 300 km/h. La s�curit� du mat�riel ou encore la volont� d'imposer du mat�riel national sur la ligne Chine-Russie-Canada-Etats-Unis pourrait �galement jouer en d�faveur du projet chinois.