Soins aux émirs : Martin Hirsch ‘assume’ »
Le Journal du Dimanche


Le Journal du Dimanche publie un entretien avec Martin Hirsch, directeur général de l’Assistance Publique - Hôpitaux de Paris, qui « assume […] : l'AP-HP accueillera bien cette année 3.000 riches patients étrangers ». Le journal explique qu’« un émir du Golfe a réquisitionné 9 chambres, du 8 au 13 mai, dans le service de chirurgie orthopédique de l'hôpital Ambroise-Paré à Boulogne, pour s'y faire opérer. Il a aussi demandé des aménagements, l'installation de douchettes et de mobilier. […] Cet accueil VIP dans un établissement public a choqué… ».
Martin Hirsch déclare : « Qu'est-ce qui choque ? Des assurés sociaux ont-ils subi des délais plus longs pour être soignés ? Non. Cela n'a pas été fait au détriment de malades français. Ce type d'opération n'est jamais réalisé en urgence mais planifié et dans ce cas précis lors du pont du 8 mai, car nous savons que des lits sont inoccupés ».
Le responsable poursuit : « L'AP-HP a-t-elle engagé des fonds pour se mettre en quatre pour ce riche patient ? Non. Au contraire ! Ces malades étrangers attirés par la renommée de nos établissements paient 30% plus cher que le tarif de la Sécurité sociale. Et s'ils ont des exigences particulières en termes de nourriture ou de confort, ils les payent eux-mêmes ».
Le Journal du Dimanche interroge : « Combien de riches patients de ce type l'AP-HP soigne-t-elle chaque année ? ». Martin Hirsch précise que « sur les premiers mois de 2014, nous en avons accueilli 1.000, ce qui représente 0,4% de nos patients. On atteindra sans doute 3.000 patients fin 2014, un peu plus que les années précédentes ».
Le responsable relève que « certains établissements accueillent 10 à 15% de malades étrangers de cette nature. À l'AP-HP, en en débattant avec la communauté médicale, nous avons décidé de ne pas dépasser un taux de 1% pour éviter de créer des interférences avec notre mission première de service public. Pas les uns au détriment des autres. Mais à l'inverse, renoncer à ces riches patients étrangers serait contre-productif ».
Martin Hirsch indique ainsi qu’« ils nous ont permis de dégager une marge de 2,5 millions d'euros depuis janvier. D'ici à fin 2014, on peut tabler sur environ 8 millions d'euros de gains. De quoi réduire de 15% notre déficit, qui s'élève à 59,9 millions d'euros en 2013 ».
Le directeur général de l’AP-HP ajoute : « J'assume ce côté "Robin des bois" : à un moment où nous avons besoin de tous les moyens pour soigner les plus modestes, où nous devons maîtriser nos dépenses tout en innovant, gagner de l'argent sur ces patients qui en ont les moyens, cela ne me choque pas. Je préfère que l'AP-HP les accueille plutôt que de voir certains médecins délaisser les patients français et aller opérer dans les pays du Golfe. Je préfère aussi garantir une tarification claire dans le cadre public, et voir cet argent revenir dans les caisses de l'hôpital, plutôt que d'encourager le développement des clientèles privées. Et cela doit aider, dans l'AP-HP, les hôpitaux qui soignent des patients précaires ».
Le Journal du Dimanche note toutefois que « l'AP-HP déplorait une ardoise de 90 millions d'impayés de pays étrangers en 2012, venus de particuliers et d'organismes ». Martin Hirsch explique que « dans l'ensemble, ce montant, avec des dettes parfois vieilles de dix ans, n'a malheureusement pas diminué. Je ne considère pas encore l'argent perdu et j'espère pouvoir vous annoncer des progrès d'ici à un an… ».
« Pour les patients programmés qui ont les moyens, il faut que cela soit une condition préalable. Mais aujourd'hui, cette procédure n'est pas encore complètement au point : nous obtenons le paiement en avance dans 60% des cas en moyenne, avec de grandes disparités selon les établissements de l'AP-HP. Nous devons tendre vers 100%. J'ai recréé cette semaine une direction des relations internationales dont le but sera notamment d'assurer des relations saines avec les autres pays pour éviter de creuser de nouvelles dettes », conclut le responsable.