Matière sombre

a matière sombre (dark matter en anglais) est une mystérieuse composante matérielle probablement constituée de particules élémentaires mais en aucun cas de matière normale, c'est-à-dire de protons, neutrons et électrons, et que l’on suppose répartie dans tout l’univers observable. Sans charge électrique et n’interagissant que très faiblement avec la matière normale, elle se signale par son attraction gravitationnelle.On lui donne plus généralement en français le nom de matière noire ou encore de masse manquante. Il ne faut surtout pas la confondre à l’antimatière dont on sait que la curieuse absence au niveau cosmologique, alors qu’elle devrait être aussi abondante que les particules de matière normale, constitue une énigme toujours irrésolue.La question de l'existence de la matière noire

On a de nombreuses preuves concordantes de la présence de la matière noire, que ce soit au niveau des galaxies, des amas de galaxies mais également en ce qui concerne la naissance des galaxies via le rayonnement fossile. Ces preuves sont toutefois indirectes. On aimerait pouvoir fabriquer ces particules non baryoniques en accélérateur, les détecter avec des expériences comme Coupp etPicasso ou encore dans l’espace avec AMS.

Quatre-vingt seize pour cent du contenu de l'univers est de nature inconnue. Les mystérieuses matière noire et énergie noire en sont-elles les composantes ? Ou bien est-ce une erreur dans l'équation d'Einstein ? Des questions auxquelles le futur satellite Euclid de l'Esa répondra. Réalisateur : Pierre-François Didek (Karamoja Productions). Directeur de collection : Vincent Minier (Laboratoire AIM Paris-Saclay). © AstrophysiqueTV-Dailymotion


Mais il se pourrait que l’on fasse fausse route et que l’on doive revoir la loi de la gravitation à l’échelle des galaxies et des amas de galaxies. Diverses théories ont été proposées, en particulier celle connue sous le nom de Mond et ses avatars relativistes. Si le modèle de la matière noire froide (Cold Dark Matter ou CDM en anglais) semble solide et le plus favorisé par l’expérience, il n’est pas exempt de défauts et certains désaccords entre ses prédictions et la réalité sont connus. Il se pourrait donc bien que les deux théories soient nécessaires pour rendre compte des observations. On ne peut totalement écarter l’hypothèse qu’il faille vraiment se passer de la matière noire et considérer uniquement des théories comme Mond.Une toute petite partie de la matière noire est à coup sûr composée de neutrinos. Pour le reste, si elle existe bien, on a proposé des minitrous noirs, des particules supersymétriques, l'axion et assez souvent ce qu'on appelle des Wimps

Les observations des courbes de révolution des étoiles autour du centre de leur galaxie montrent qu'elles tournent trop vite si l'on se base sur la loi de la gravitation de Newton ou sur la masse déduite de la luminosité des galaxies. Le plus probable est qu'il y ait de la matière cachée non lumineuse, de la matière noire



Une des énigmes de la matière noire est peut-être résolue

Les modèles de matière noire sur ordinateur prédisent généralement qu’elle doit se concentrer dans les noyaux des galaxies. Pour tester cette hypothèse, on se servait des mesures des vitesses de la matière dans les galaxies naines. Or, depuis environ 20 ans, théorie et observation ne s’accordent pas. Voilà qui vient peut-être de changer, avec un modèle de la matière noire froide un peu plus étayé
D’après le modèle de la matière noire froide, les galaxies naines contiendraient une masse sous forme de nouvelles particules inconnues mille fois plus importante que la matière visible sous forme d’étoiles et de nuages d’hydrogène (dans le cas de la Voie lactée, ce rapport est de dix environ). Les galaxies naines de la Voie lactée, comme celle du Fourneau (à l’image), sont donc de bons laboratoires pour tester la théorie de la matière noire. Jusqu’à présent, les observations et la théorie étaient en contradiction concernant la répartition de la matière noire dans ces galaxies. Ce problème vient peut-être de trouver un début de solution
Les résultats de Planck ont solidement conforté le modèle de matière noire froide. Celui-ci reste pour le moment indispensable pour comprendre les caractéristiques du rayonnement fossile et la naissance des grandes structures composées d’amas de galaxies dans l’univers. Mais à l'échelle desgalaxies, en particulier des naines, c’est une tout autre affaire.Par exemple, les galaxies naines d’Andromède continuent de défier le modèle de la matière noirefroide parce qu'elles sont rassemblées en un disque, au lieu d’être réparties dans un halo sphérique. Il y a aussi, connu depuis une vingtaine d’années, le fameux « problème de la concentration dans le cœur ». D’après le modèle de la matière noire froide – ou plutôt plusieurs des modèles les plus crédibles basés sur des particules de matière noire bien particulières –, sa concentration dans les galaxies naines ne devrait pas être uniforme.


Des déterminations de densité de matière noire problématiques

Selon les théoriciens et les simulations faites sur des superordinateurs, comme celles de la Dark Energy Universe Simulation (DEUS) Full Universe, la matière noire devrait être plus abondante dans le cœur des galaxies naines, et même dans celui d’autres galaxies comme la Voie lactée. Or, selon les mesures des astronomes, il n’en est rien. Différentes explications ont été proposées. On peut par exemple supposer que les particules de matière noire interagissent fortement entre elles ; ou simplement préférer modifier la loi de la gravitation en utilisant Mond, c'est-à-dire se passer de particules de matière noire.

Une vue du superordinateur Lonestar. On a peut-être résolu grâce à lui une des énigmes de la matière noire. © Université du Texas
Deux astronomes de l’université du Texas à Austin pensent qu’ils ont peut-être résolu le problème. Ils viennent de publier sur arxiv un article qui propose une tout autre solution et dans le cadre dumodèle cosmologique standard. Ils se sont basés sur des observations concernant les galaxies naines de la Voie lactée comme celle de la Carène, du Fourneau et du Dragon, mais aussi sur des simulations numériques avec le supercalculateur Lonestar du Texas Advanced Computing Center (TACC).Ils ont cherché à contourner un écueil rencontré lors de toutes les tentatives de mesure de la quantité et de la distribution de matière noire dans les galaxies naines. D’ordinaire, on considère un modèle basé sur certaines hypothèses physiques avec des paramètres libres. On ajuste ensuite ces paramètres avec les observations. Les deux chercheurs ont utilisé Lonestar pour reconstruire directement, à partir des mesures des vitesses de la matière normale dans les galaxies naines choisies, la distribution de matière noire. Ils espéraient de cette façon éliminer certains biais possibles dans les précédentes tentatives de détermination de la répartition de la matière noire dans les galaxies.


Une matière noire répartie différemment selon les galaxies

Les deux astrophysiciens ont alors découvert que la répartition de la matière noire était, en fait, différente selon les galaxies. Dans certains cas elle était uniforme, dans d’autres elle possédait un pic central prononcé dans le cœur de la galaxie naine, alors que dans certains satellites de la Voie lactée une distribution intermédiaire était mesurée. En faisant la moyenne de ces distributions, on constate finalement qu’il y a bien une concentration de matière noire dans les cœurs des galaxies naines. Le modèle de la matière noire froide est donc correct, pourvu que l’on considère des moyennes et pas des cas individuels.On peut donc dire que le problème de la concentration dans le cœur est résolu, mais il laisse encore des questions en suspens. Il faudra peut-être affiner les modèles de matière noire ou, plus probablement, tenir compte, lors de la formation et de l’évolution des galaxies naines, des interactions entre distribution de matière noire et de matière normale.