Sept questions sur la disparition du vol MS804 d’EgyptAir
Par Adrien Sénécat et Pierre Breteau
Le Monde|19.05.2016 à 11h37
Mis à jour le 19.05.2016 à 13h39
Un Airbus A320 d’EgyptAir qui reliait Paris au Caire a disparu au-dessus de la mer Méditerranée
dans la nuit du mercredi 18 au jeudi 19 mai. Il y avait 66 personnes à bord, dont 56 passagers.
Jeudi en milieu de journée, le président français François Hollande a confirmé que l’avion s’était abîmé.
« Les informations que nous avons pu recueillir (…) nous confirment hélas que cet avion s’est abîmé et
s’est perdu », a déclaré François Hollande, confirmant la présence de 66 personnes à bord dont « quinze Français ».
L’A320 d’EgyptAir qui reliait Paris au Caire « s’est abîmé », confirme François Hollande
1. Dans quelles circonstances a-t-on perdu la trace de l’avion ?
Selon le commandant de l’aviation civile grecque, Constantin Litzerakos, les contrôleurs grecs ont eu un
dernier échange vocal avec l’équipage de l’avion à 1 h 55 (heure de Paris) alors qu’il volait au-dessus de
l’île de Kéa. Le pilote n’a, à ce moment, indiqué aucun incident. Au moment de la sortie de l’espace aérien
grec à 2 h 26, le contrôleur a, comme l’exige la réglementation, tenté d’entrer à nouveau en contact avec
le pilote pour le lui signaler, sans succès. A 2 h 29, une fois entré dans l’espace aérien égyptien,
les contacts radars avec l’appareil ont été perdus.
CARTE - Parcours du vol MS804 jusqu’à sa disparition.
2. Comment un avion peut-il disparaître des écrans radar ?
Un avion est détectable par des radars simplement dans les zones couvertes. Hors des terres émergées et
de la portée des radars, les avions envoient leur position périodiquement par radio, via un système appelé
« Automatic Dependent Surveillance-Broadcast » (ADS-B). Lors du survol de la mer Méditerranée à distance
des îles grecques, c’est ce système qui permet de suivre les avions. Pour le vol d’EgyptAir MS804,
les contrôleurs ont reçu le dernier relevé à 2 h 29 du matin.
Néanmoins, un avion peut aussi disparaître des écrans radar et cesser d’envoyer sa position pour d’autres raisons
le « transpondeur » peut être débranché volontairement ou l’avion peut faire face à des soucis électriques.
3. L’appareil a-t-il été retrouvé ?
Non. Une source anonyme au sein de l’aviation civile grecque, citée par l’AFP, affirme que l’avion s’est écrasé
au large de l’île grecque de Karpathos. Cette affirmation n’a pas été confirmée de source officielle et aucun débris
de l’appareil n’a été retrouvé à ce stade.François Hollande a en revanche annoncé disposer d’informations confirmant
que l’avion « s’est abîmé » et « s’est perdu ».Le ministre de la défense grec, Panos Kammenos, a également donné
des détails sur la chute de l’appareil : « L’image que nous avons et qu’à 0 h 37 GMT [2 h 37, heure de Paris], l’avion,
qui se trouvait à près de 10-15 miles [environ 20 km] dans l’espace aérien égyptien, a effectué un virage de 90 degrés
à gauche puis de 360 degrés à droite en chutant de 37 000 à 15 000 pieds, où son image a été perdue,
à environ 10 000 pieds. »De même, des témoins en Grèce affirment avoir vu une explosion dans le ciel,
qui pourrait être liée au vol d’EgyptAir. Ces témoignages restent également à vérifier par
les autorités avant d’en tirer toute conclusion.
4. EgyptAir est-elle une compagnie fiable ?
EgyptAir, la compagnie nationale égyptienne, a été fondée en 1932. Elle ne figure pas dans la liste noire des compagnies
aériennes de l’Union européenne. Rien n’en fait une compagnie « à risque ».Récemment, elle avait toutefois fait parler
quand un individu était parvenu à détourner sur Chypre un avion qui faisait la liaison Alexandrie-Le Caire le 29 mars.
Le pirate s’était révélé être un homme psychologiquement instable
5. Y a-t-il eu des problèmes techniques sur ce vol ?
François Hollande a indiqué jeudi qu’« aucune hypothèse n’est écartée » pour expliquer cette catastrophe, qu’il s’agisse
d’un « accident » ou d’un acte « terroriste ».Aucun incident technique n’a été signalé sur ce vol MS804. Les données
des sites de suivi des vols commerciaux, ne relèvent aucune anomalie d’altitude ou de vitesse dans les heures qui ont
précédé la disparition de l’appareil. Par ailleurs, EgyptAir a indiqué qu’il n’y avait aucune cargaison particulière à bord.
L’A320 d’EgyptAir, a été mis en service en 2003 et comptait environ 48 000 heures de vol à son actif selon Airbus,
ce qui n’en fait pas un appareil en bout de course. L’A320 est l’un des plus vendus au monde, et est considéré comme
l’un des plus fiables. Selon les données consultables sur le site Flightradar, c’était le cinquième vol de la journée pour
l’avion d’EgyptAir, mais c’est une rotation classique – un avion d’Air France a par exemple effectué sept trajets
entre la France et le Royaume-Uni le même jour.Le pilote de l’équipage était quant à lui expérimenté. Selon EgyptAir,
il cumulait plus de 6 000 heures de vol, dont 2 000 sur cet appareil. Son copilote en totalisait 2 776 sur A320.
6. Y a-t-il eu un message d’alerte ou de détresse ?
Les informations à ce sujet sont contradictoires. EgyptAir a évoqué un signal reçu deux heures après la disparition
de l’avion, qui aurait possiblement été émis par une balise automatique. Information réfutée par l’armée égyptienne,
dont un porte-parole écrit sur Facebook qu’aucun message de ce type n’a été reçu.
7. Que sait-on des passagers ?
Selon la compagnie aérienne, il y avait 66 personnes à bord de l’avion, dont 56 passagers. Elle a également donné
des indications sur la nationalité de ces derniers : 30 Egyptiens, 15 Français, 2 Irakiens, 1 Britannique, 1 Belge,
1 Koweïtien, 1 Saoudien, 1 Soudanais, 1 Tchadien, 1 Portugais, 1 Algérien et 1 Canadien.
Les dix autres personnes à bord étaient des membres de l’équipage : 2 pilotes, 3 agents de sécurité et 5 membres
du personnel en cabine. La présence d’agents de sécurité est une pratique désormais courante dans certaines
compagnies aériennes, lorsqu’elles considèrent leurs vols à risque. Il s’agit en général d’employés de compagnies
de sécurité privées, fait savoir au Monde un professionnel de l’aéronautique.
8. Quels sont les moyens déployés pour retrouver l’appareil ?
L’Egypte, la France et la Grèce ont lancé des recherches en Méditerranée pour tenter de retrouver la trace de
l’Airbus A320 d’EgyptAir. L’armée grecque a dépêché plusieurs avions et une frégate dans une zone se trouvant
à 241 km au sud-est de l’île de Karpathos, située entre la Crête et Rhodes, a précisé le ministère de la défense grec.
Le président François Hollande, s’est entretenu avec son homologue égyptien, Abdel Fattah Al-Sissi.
Les deux dirigeants « sont convenus de coopérer étroitement pour établir le plus vite possible les circonstances de
cette disparition », a annoncé l’Elysée dans un communiqué. « Nous allons évidemment nous mobiliser et nous
sommes à la disposition des autorités égyptiennes pour, avec nos moyens militaires, avec nos avions, nos bateaux,
aider à la recherche de cet avion », a pour sa part déclaré le ministre des affaires étrangères français, Jean-Marc Ayrault.
Une cellule de crise a été mise en place à Paris et à l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle, d’où l’avion est parti,
et des familles de passagers ont été accueilies à l’aéroport du Caire.