Accord de libre-échange Union européenne–SingapourLe 30/12/2016 à 11:22
L’avocat général confirme la nature mixte
L’avocat général Sharpston considère que l’accord de libre-échangeTrès attendues, les conclusions de l'avocat général chargé de se prononcer sur la nature juridique de l'accord de libre-échange conclu entre l'Union européenne et Singapour le 21 septembre 2013 ont été publiées le 21 décembre dernier.
avec Singapour ne peut être conclu que par l’Union et
les États membres agissant de concert.
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Confirmation de la nature mixte des accords de libre-échange
La question est fondamentale tant d'un point de vue juridique que plus largement.
La nature mixte d'un accord international justifie que chaque parlement national soit sollicité pour approbation en plus de celle du Parlement européen quand la nature exclusive d'un accord ne requiert que le seul acquiescement de ce dernier.
En clair, la question relève-t-elle du périmètre des compétences exclusives de l'Union ou des compétences qu'elle partage avec les États membres ?
Le débat est tendu tant il porte de lourdes implications politiques. La Commission européenne soutient que l'Union est exclusivement compétente pour conclure l'accord. Le Parlement européen est globalement d'accord avec la Commission. De l'autre côté, le Conseil de l'Union et les gouvernements de tous les États membres qui ont soumis des observations écrites devant la Cour affirment que l'Union ne peut pas conclure l'accord seule parce que certaines parties de l'accord relèvent de la compétence partagée voire de la compétence exclusive des États membres.
On l'aura compris, les parlementaires européens considèrent avec une aisance compréhensible que leur seul vote suffit ; position qui contrarie les gouvernants des États membres qui doivent se justifier devant leurs parlements nationaux qui voient d'un mauvais oeil d'être évincés d'un débat déterminant.
L'avocat général Eleanor Sharpston considère que l'accord ne peut être conclu que conjointement par l'Union et les États membres. Plus précisément, elle distingue, dans l'accord, ce qui relève de la compétence exclusive de l'Union (le commerce des marchandises, le commerce et les investissements dans la production d'énergie renouvelable, le commerce des services et les marchés publics, les investissements étrangers directs, les aspects commerciaux des droits de propriété intellectuelle, etc.) de ce qui relève de la compétence partagée (les dispositions relatives au commerce des services de transport aérien, des services de transport maritime et des services de transport par voie et plans d'eau navigables, les formes d'investissement autres que les investissements étrangers directs, les dispositions qui fixent des normes de base en matière de travail et d'environnement et qui relèvent du champ d'application soit de la politique sociale soit de la politique de l'environnement, le règlement des différends ainsi que les mécanismes de médiation et de transparence, etc.).
Une position qui ne règle rien
Mais le point le plus important est ailleurs quand l'avocat général observe qu'une procédure de ratification impliquant tous les États membres et l'Union peut soulever certaines difficultés, ce qui ne l'empêche pas de considérer que cet inconvénient ne saurait avoir une incidence sur la réponse à donner à la question de savoir qui est compétent pour conclure cet accord. Pour reprendre une célèbre formule, le droit est une nouvelle fois au-dessus de la politique ; l'avocat général ne désirant visiblement pas adopter une conception trop molle des concepts pour permettre leur adaptation aux difficultés de la situation actuelle qui a permis à la Wallonie de bloquer, 10 jours durant, le CETA.
Il faut reconnaître que la rigueur de cette position est difficilement contestable en droit même si l'on sait que ses conclusions ne lient pas la Cour de justice de l'Union qui reste pleinement libre de ses décisions. Il est donc toujours possible d'attendre une surprise de Luxembourg même si on connaît sa difficulté (souvent louable) à s'éloigner des textes. Car la question reste entière de savoir comment éviter à l'avenir d'autres "tentations de Namur". Provoquer une réforme du traité de Lisbonne est, en l'état, impossible. Restent deux solutions la première consiste à tordre les clauses de ce traité pour en éviter une utilisation idéologique, la seconde à enjoindre les dirigeants politiques à gagner de la hauteur.
Ce sera notre vœu pour 2017.