5 multi-redicivistes dans la fraude scientifique
1. Pr Joachim Boldt
Le Pr Joachim Boldt, anesthésiologiste allemand à la Klinikum Ludwigshafen, un grand centre hospitalo-universitaire de la ville du même nom, s’est illustré dans un cas célèbre de fraude ayant conduit à la rétractation d’une étude publiée dans la revue Anesthesia & Analgesia. Les enquêtes devaient conclure à l’absence de documents attestant de l’existence de patients ayant participé à un quelconque essai clinique. De même, aucun résultat d’analyse biologique ne fut retrouvé pour chacun des patients.
Le plus grand nombre d’articles rétractés pour un chercheur en biomédecine
Par la suite, 88 articles firent l’objet de rétractations. Cet anesthésiologiste mondialement connu, qui avait réussi à endormir la vigilance de ses pairs, a depuis quitté l’Allemagne.
Il totalise à ce jour le plus grand nombre d’articles rétractés pour un chercheur en biomédecine. Des millions de patients ont été traités sur la base de résultats fantômes avec probablement pour conséquence la survenue d’effets secondaires indésirables pour nombre d’entre eux.
Le travail frauduleux du Pr Boldt a encore des répercussions aujourd’hui, l’ensemble de ces travaux devant être exclus pour ne pas risquer d’altérer le résultat de certaines méta-analyses. Une méta-analyse est un travail qui, en regroupant toute une série d'études portant sur un problème particulier, permet d'augmenter la puissance statistique du tout et donc de se faire une idée plus juste de la question.
DOSSIER "FRAUDE SCIENTIFIQUE". À l'occasion de la "nouvelle" affaire Séralini qui a vu Food and Chemical Toxicology retirer l'article du chercheur français, Sciences et Avenir fait le point sur le phénomène des rétractations d'articles dans les revues biomédicales.
2. Dr Naoyuki Nakao
Le Dr Naoyuki Nakao est sans doute l’un des chercheurs fraudeurs dont la mauvaise conduite scientifique aura eu le plus de conséquences en thérapeutique. Ce médecin publie en janvier 2003 dans The Lancet un article sur l’efficacité de l’association de deux médicaments antihypertenseurs : un antagoniste des récepteurs à l'angiotensine II (ARAII) et un inhibiteur de l'enzyme de conversion (IEC) dans le traitement de l’insuffisance rénale chez des malades non diabétiques. Cet article donnera lieu à plusieurs autres articles publiés dans d’autres revues scientifiques sur ce thème par ce même auteur. Selon le Wall Street Journal qui cite SDI, firme spécialisée en audit dans le domaine de la recherche, environ 140.000 patients américains étaient traités en 2008 par ce traitement combiné.
Des milliers de patients toujours traités par une association médicamenteuse... jamais justifiée
Cette même année, des médecins suisses trouvèrent que les résultats étaient trop beaux pour être vrais et alerta la direction du Lancet. Une enquête approfondie fut menée à l’hôpital de l’université Showa à Yokomama.
Elle révéla que l’essai clinique rapporté dans l’article paru cinq ans plus tôt dans le prestigieux journal médical n’avait pas obtenu le feu vert d’un comité d’éthique, qu’aucun consentement éclairé n'avait été recueilli auprès des patients participants à cette étude. De plus, cet essai n’avait pas, comme il se doit, été conduit en double aveugle, à savoir que le traitement aurait dû être administré sans que les médecins et les patients ne sachent si le traitement administré était un médicament ou un placebo. Aussi incroyable que cela puisse paraître : aucun statisticien en charge de l’analyse des données n’avait pu être identifié.
Au total, la véracité des données ne pouvait être établie. Trois articles, dont celui paru dans The Lancet, furent rétractés par la suite. Selon un article paru en juillet 2012 dans la revue Pharmacotherapy, des milliers de patients sont encore aujourd’hui traités par cette association médicamenteuse malgré que la publication l’ayant promu a fait l’objet d’une rétractation. Il suffit d’ailleurs d’interroger la base de données biographiques PubMed pour constater que certains articles émanant du fraudeur ne sont toujours pas accompagnés d’une notice de rétractation.
3. Pr Scott S. Reuben
Une autre affaire de fraude scientifique retentissante concerne le Pr Scott S. Reuben. Cet anesthésiologiste à la Tufts University de Boston (Massachusetts, États-Unis) était un expert réputé dans le traitement de la douleur. Ses nombreuses publications attestaient de l’efficacité de certains antalgiques pour lutter contre les douleurs post-opératoires.
Le médecin avait fabriqué la totalité des données de 6 essais cliniques
Il aura fallu une décennie pour qu’un grand nombre de publications concernant l’utilisation de médicaments (inhibiteurs de la cyclo-oxygénase-2) dans la prise en charge de la douleur post-opératoire ne soit finalement retiré. Le médecin avait fabriqué la totalité des données de six essais cliniques. Au total, 24 articles rédigés par cet auteur ont été considérés comme reposant sur des données falsifiées et ont été rétractés.
Ce médecin dut payer une amende de 5.000 dollars et fut contraint de rembourser plus de 361.000 dollars aux compagnies pharmaceutiques qui avaient financé ses travaux et renoncer à 50.000 dollars d’actifs. Il fut par ailleurs condamné en 2010 à six mois de prison, assortis d’une durée de trois ans en liberté surveillée. Cette affaire mit un terme à sa carrière médicale.
4. Noaki Mori
Autre fraudeur notoire : Noaki Mori (université de Ryukyus, préfecture de Okinawa, Japon), dont 36 articles ont été retirés de revues suite à la manipulation de données et trucage d’images. Ce virologue était un expert reconnu du virus HTLV-1, un rétrovirus responsable d’une forme rare de leucémie de l’adulte à lymphocytes T.
Il fut interdit de publier pendant 10 ans
Il travaillait notamment à l’évaluation de plusieurs molécules capables d’inhiber la prolifération du HTLV-1. Cinq de ses articles ont été rétractés par Ferric Frang, rédacteur en chef d’Infection and Immunity, revue publiée par l’American Society of Microbiology (ASM). Au total, 23 articles ont été retirés.
Noaki Mori démissionna du poste qu’il occupait à l’université en 2010 et fut interdit pendant dix ans de publier.
L’an dernier, en mars 2012, ce chercheur publia de nouveau un article scientifique sur son sujet d’ « expertise » : la leucémie de l’adulte à cellules T, non sans que les éditeurs de la revue Biochimica et Biophysica Acta (BBA) - General Subjects (Editions Elsevier) aient cette fois procédé à un minutieux examen des données présentées.
Pour Ferric Fang, il n’y aura pas de pardon, l’Association américaine de microbiologie (ASM) refusant toujours de republier ce chercheur qui a trahi sa confiance et dupé sa vigilance.
Les travaux conduits sous la direction de Noaki Mori, virologue japonais super-tricheur, et de Joachim Boldt, anesthésiste allemand, fraudeur hors pair, présentaient plus du quart (25,9%) de tous les articles biomédicaux rétractés en 2011.
5. Dr Yoshitaka Fujii
Enfin, on peut citer le cas du Dr Yoshitaka Fujii, un anesthésiste japonais dont les données concernant les effets secondaires de différents médicaments ne variaient pas d’un article à l’autre !
Plus d'une décennie entre le soupçon de fraude et les rétractations
Un examen poussé des 168 essais cliniques randomisés publiés par ce médecin permis de démontrer que ses études comportaient des données aberrantes. C’est ainsi qu’il est apparu que la distribution des âges des patients participants dans un vaste essai clinique n’avait rien d’aléatoire mais était bien trop homogène.
Il était rigoureusement impossible d’observer ce type de distribution dans la vraie vie. Au total, le Canadian Journal of Anesthesia retira pas moins de 17 articles du Dr Fujii et considéra comme possiblement suspects de fraude 17 autres.
Dans leur étude parue en juillet dernier dans PLOS One, Grant Steen et ses collègues considèrent comme probable que d’autres articles de cet anesthésiste nippon seront retirés dans l’avenir et soulignent qu’il se sera écoulé plus d’une décennie entre le soupçon de fraude et les rétractations.
Forever HD 7420, Géant 2500 HD
"Quand je me regarde, je me désole. Quand je me compare, je me console"
"Qui que tu sois, viens, viens. Même si tu es un athée, c'est ici la demeure de l'espoir"