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  1. #1
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    Re : Hadhith et Dou3ae du jour

    D'après 'Abdallah Ibn 'Omar (qu'Allah les agrée), le Prophète (que la prière d'Allah et Son salut soient sur lui) a dit:

    « Celui qui fait le adhan durant 12 ans, le paradis lui est obligatoire. Il lui est inscrit à chaque fois 60 bonnes actions et 30 bonnes actions pour l'iqama ».

    (Rapporté par Ibn Maja et authentifié par Cheikh Albani dans la Silsila Sahiha n°42)

  2. #2
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    Re : Hadhith et Dou3ae du jour

    Salam
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  3. #3
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    Re : Hadhith et Dou3ae du jour

    Abû Hurayra rapporte ces propos de 1’Envoyé de Dieu -sur Lui la Grâce et la Paix-: “Les devoirs de tout musulman à l’égard de ses frères sont au nombre de cinq: il se doit de lui rendre le salut, de le visiter lorsqu’il est malade, de suivre son cortège funèbre, de se rendre à son invitation et de lui souhaiter que Dieu lui fasse miséricorde quand il éternue.’’ (Rapporté par Bukhari et Muslim). Une version de Muslim comporte ce sixième précepte: “Et donne-lui un conseil s’il te le demande.”

  4. #4
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    Re : Hadhith et Dou3ae du jour


  5. #5
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    Re : Hadhith et Dou3ae du jour

    Le Prophète ﷺ a dit :

    « N'insultez pas les morts car ils sont déjà arrivés à la conséquence de leurs œuvres. » (Al-Bukhârî)

  6. #6
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    Re : Hadhith et Dou3ae du jour

    Assalâmu Alaykum wa rahmatoullah wa barakatouh

    1 même épreuve = 1.000.000 de façon de la vivre et la surmonter

    Et en tant que musulman, la notion d' épreuve revêt toute une importance. Cela est une partie inéluctable de la vie du musulman.

    Allah ta 3ala dit (sens rapproché)

    {Nous vous éprouverons certes afin de distinguer ceux d'entre vous qui luttent [pour la cause d'Allah] et qui endurent} (47/31)

    {Très certainement, Nous vous éprouverons par un peu de peur, de faim et de diminution de biens, de personnes et de fruits. Et fais la bonne annonce aux endurants, qui disent, quand un malheur les atteint : "Certes nous sommes à Allah, et c'est à Lui que nous retournerons". Ceux-là reçoivent des bénédictions de leur Seigneur, ainsi que la miséricorde; et ceux-là sont les biens guidés.} (2/155~157)

    L'on peut vivre les mêmes épreuves mais la gestion est propre à chacun. Cela dépend de beaucoup de paramètres dont nous n'avons pas connaissance et le 1er est la sensibilité de l'autre.

    La sensibilité varie d'une personne à une autre...Je dirais même qu'il y autant de sensibilité qu'il n'y a de personne sur cette terre!
    Si telle épreuve a été facile à surmonter pour X, elle ne le sera pas forcément pour Y. Ce qui amène le 2e paramètre non négligeable : la foi.

    Une personne croyante ne vivra pas son épreuve de la même façon qu'une personne non croyante. Car là où le non croyant prendrait son épreuve pour une injustice, le croyant lui, reconnait cette épreuve comme venant de son Seigneur et s'y soumet , recherchant l'endurance à travers les prières et les invocations.
    Et là encore, même avec la foi, l'épreuve sera vécu différemment selon son degré de foi , son acceptation et sa soumission.

    Anas (que Dieu l'agrée) a dit : "Le messager de Dieu (paix et bénédiction de Dieu sur lui) rapporte que le Prophète (paix et bénédiction de Dieu sur lui) a dit : "La grandeur de la récompense va de pair avec la grandeur de l'épreuve. Dieu (le Très-Haut), quand Il aime les gens, les éprouve. Celui qui accepte l'épreuve avec abnégation aura la satisfaction de Dieu; et celui qui lui oppose son mécontentement, Dieu sera mécontent de lui". (At-Tirmidhi)

    Gardons à l'esprit que l'Autre n'est pas Moi.

    Car si l'épreuve est la même dans la forme , elle ne l'est pas dans le fond.

    -AQ-
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  7. #7
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    Re : Hadhith et Dou3ae du jour

    Le Prophète (sallallahu ‘alayhi wa salam) a dit :

    « Allâh est doux, et Il aime la douceur en toute chose. Assurément Allâh est Doux et Il aime la douceur. Il donne par elle ce qu’Il n’accordera pas par l’usage de la violence. » (Mouslim)

    Ce qui veut dire :

    Vous devez être doux dans vos paroles, dans vos pensées, dans vos orientations, dans vos propositions. La douceur est nécessaire, et Allâh – Djalla wa ‘Ala – est doux, et Il aime que l’on soit doux en toutes choses.

    Voulons-nous autre chose que ce qu’Allâh –Djalla wa ‘Ala- aime ?

    Voulons-nous autre chose que ce qu’Allâh –Djalla wa ‘Ala– agrée ?

    Si tu n’es pas doux dans ce que tu fais, dans ta pensée, dans ton objectif, dans ta thèse, dans ce que tu dis, dans ce que tu laisses, dans tes actes, dans le jugement des choses, le jugement des comportements, le jugement des personnes, alors, tu auras en cela manqué la chose la plus importante qui soit, qui est le fait qu’Allâh – Djalla wa ‘Ala – t’aime.

    [Al-Wassatiyyat ul-I’tidâl du SHeikh Sâlih Âli ash-SHeikh, p.55-56 ]

    -AQ-
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    Re : Hadhith et Dou3ae du jour

    Le port de la barbe est-il sunna ou obligatoire ....

    Le port de la barbe est une sunna qu'il est nécessaire d'observer (fardh ou wâjib). (En effet, le terme "sunna" désigne seulement ce que le Prophète -aleyhi salat wa salam- a enseigné et / ou fait, sans en dire quel est le caractère : or une "sunna" peut être obligatoire, ou fortement recommandée, ou seulement conseillée.

    Certaines sunna sont donc seulement conseillées, mais d'autres sont obligatoires.

    Le port de la barbe ne fait pas partie de ce que le Prophète faisait par habitude culturelle seulement. En effet, car porter une barbe n'est pas seulement ce que le Prophète a fait, c'est aussi ce qu'il a dit de faire : "Dix choses font partie de la fit'ra : (…) le fait de se laisser la barbe (…)" (rapporté par Muslim, Abû Dâoûd,
    at-Tirmidhî et Ibn Mâja).

    Il a également dit : "Laissez-vous la barbe et taillez-vous les moustaches" (rapporté par al-Bukhari et Muslim entre autres). Ibn Hajar relate les différents termes qui ont été employés dans ce dernier Hadîth : "waffirû", "a'fû", "arkhû" et "awfû", tous signifiant globalement qu'il faut garder une barbe. Les ulémas sont donc d'avis qu'il s'agit d'une sunna ta'abbudiyya (dont l'ensemble est également appelé "sunan al-hudâ"), et non pas d'une sunna 'âdiyya (dont l'ensemble est également appelé "sunan az-zawâ'ïd").

    L'impératif employé dans ces Hadîths a amené les ulémas à dire que cela était obligatoire (wâjib ou fardh) : certains sont d'avis qu'il est interdit (harâm) de se la raser, d'autres que cela est mak'rûh tahrîman (cf. Al-Fiqh ul-islâmî wa adillatuh, p. 2659).
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    Post Peut-on réformer l’islam ?

    Contribution 01 Decembre 2014

    Aâm aâm celui qui nous avait taxé de ghachis...

    Peut-on réformer l’islam ?

    Par Nour-Eddine Boukrouh
    [email protected]

    «Si la vérité devait se modeler selon leurs exigences, le ciel, la terre et tout ce qu’ils renferment sombreraient dans le chaos...»
    (Coran, «Al-mû’minûn», 71).
    «Je jure par celui qui détient mon âme entre ses mains qu’il viendra une époque où celui qui tue ne saura pas pourquoi il le fait, et celui qu’on tue n’en saura pas plus.» (Le Prophète).
    Le monde musulman est malade. Il est âgé d’un peu plus de quatorze siècles et sa vie s’est étalée, comme dans le songe de Sidna Youssef (Joseph), sur deux périodes : sept siècles de vaches grasses, suivies de sept siècles de vaches maigres ; une ère de civilisation, suivie d’une ère de décadence. Il est présentement le théâtre d’une guerre intra-islamique qui fait rage dans deux capitales de sa jeunesse, Damas et Bagdad. Est-ce le début de la phase terminale ? Le malade refuse de se soumettre à un bilan de santé, à des analyses, à l’imagerie médicale. Entouré de guérisseurs, d’exorcistes et de sacrificateurs qui le bercent de l’illusion qu’il est toujours «la meilleure communauté sortie aux hommes» (Coran), il nie qu’il est mal en point et rejette toute idée de thérapie, une thérapie qui ne peut être qu’une cure de réformes. Beaucoup de musulmans continuent de croire qu’ils sont l’avenir de l’humanité, nonobstant l’image qu’ils renvoient d’eux et qui est celle de son passé moyenâgeux. Le monde et les cultures qui le constituent ne cessent d’améliorer leurs conditions de vie morales et matérielles, de rénover à chaque étape leurs idées et leur mode de penser, alors qu’eux ne voient aucune raison de changer quelle que soit la situation dans laquelle ils se trouvent. Ils se complaisent dans leur état et sont semblables à ce dernier de la classe d’une sortie de promotion qui se plaint que le titre de major et ses honneurs ne lui reviennent pas de droit.
    Comment faire, quand on est une vieille civilisation percluse de décadence, pour se libérer de l’immobilité et entrer dans une dynamique créatrice ? Que faire pour se mettre au diapason des civilisations contemporaines ? Ce sont ces préoccupations que recouvre la question posée en titre et qui, adressée aux peuples, aux Etats et aux élites, devient : voulez-vous guérir de vos maladies psychosomatiques, des complexes qui vous minent et qui ont pour noms l’obsession du passé, le dédoublement de la personnalité, le sentiment de persécution, le ressentiment envers les autres, la paranoïa, les complexes d’infériorité, de frustration et de dépendance, le tutorat intellectuel, la soumission à des directeurs de conscience aux apparences d’humanoïdes, et mille et un maux ? Lorsque l’imprimerie a été inventée au XVe siècle par Gutenberg, les pays musulmans ont mis quatre siècles à l’adopter parce que leurs ulémas se méfiaient de cette «diablerie». De la même manière qu’ils ont été absents de la révolution industrielle aux XVIIIe et XIXe siècles, de la révolution technologique du XXe, ils sont absents en ce moment de la recherche scientifique fondamentale et appliquée, de la maîtrise des nanosciences, des technosciences, des biotechnologies, du numérique et de la conquête spatiale, et sont pour la plupart d’entre eux réfractaires aux progrès réalisés par le reste de l’humanité dans le domaine sociétal. Si un nombre non négligeable de leurs ressortissants comptent parmi les équipes scientifiques à la pointe du développement des sciences, ils ne sont qu’une infime pincée. Ici nous parlons du milliard et demi de musulmans, pas de la fuite des cerveaux.
    Au Moyen-Age, les Européens ont connu la peur de l’Inquisition et des bûchers, la persécution morale et la torture physique, la cruauté et le despotisme des hommes de religion. Ils ont connu les guerres confessionnelles qui ont conduit à la mort de millions d’hommes et de femmes, de savants, de croyants sincères et d’esprits libres. Pour rien, par ignorance, par fanatisme, mais toujours au nom de Dieu, de la Vérité et de la Justice immanente. Nous sommes sur leurs traces du fait d’une malheureuse coïncidence qui fait que le calendrier hégirien en soit à son XVe siècle. La différence entre eux et nous c’est qu’eux venaient du fin fond des ténèbres, alors que nous c’est en pleine lumière du troisième millénaire que nous nous retrouvons dans le cauchemar, juste au moment où l’humanité se prépare à annexer la planète Mars, où elle envoie des vaisseaux spatiaux et des sondes à des millions et des milliards de kilomètres de chez elle à la découverte de l’univers, à la recherche d’autres formes de vie, d’autres civilisations intelligentes…
    Telles que les choses se présentent, qu’est-ce qui est le plus facile à réaliser : changer le monde dans le sens souhaité par la culture musulmane traditionnelle ou changer les musulmans dans le sens de l’évolution du monde ? La première hypothèse est une impossibilité absolue et la seconde une gageure à laquelle on a donné ici un intitulé, réformer l’Islam, c’est-à-dire changer notre vision de Dieu, de l’univers, de notre raison d’être sur la terre et notre regard sur les autres, les non-musulmans. Cette réforme est la seule chance qui reste à l’Islam car il a épuisé toutes ses ressources, toute son énergie. Telle une étoile en évanescence, il est sur le point de devenir un trou noir.
    Les motifs qui incitent à la réforme sont nombreux et visibles, mais les dirigeants politiques et les autorités religieuses officielles ne veulent pas prendre à bras-le-corps la question car ils n’aiment pas les sujets qui fâchent, qui peuvent mettre en péril le pouvoir des premiers sur les corps et le pouvoir des secondes sur les âmes ; ils trouvent moins risquées les contradictions entre leurs actes et leurs paroles. Ainsi, ils n’appliquent plus les peines d’amputation des membres, de lapidation ou de décapitation, n’imposent pas aux étrangers le statut de «dhimmis» (non-musulmans considérés comme «protégés») et le paiement de l’impôt spécial qui en découle, ne préconisent pas d’éliminer de la surface de la terre les non-musulmans, mais vous leur arracherez la langue qu’ils ne reconnaîtront pas en public que l’application de la chariâ est devenue chose impossible, à moins de faire comme Daech. D’aucuns pourraient objecter que le monde musulman a connu des mouvements de réforme par le passé. Les efforts entrepris sous cette égide théorique pour améliorer l’état des musulmans, d’Ibn Taimiyya à Ben Badis, étaient orientés vers la société jugée tiède ou déviante, comme au temps du maraboutisme, ou depuis que Sayyed Qotb a publié Djahiliyat al-karn al-ichrine (le paganisme du XXe siècle), pas vers les réformateurs eux-mêmes, ulémas et imams, leur «ilm», leur compréhension du Coran et leurs directives morales à la société. Ces efforts n’ont abouti à rien, sinon à aggraver les choses puisqu’ils n’ont pas suscité une amélioration, finalité de toute réforme, mais un approfondissement de la crise vu que seule la violence a droit de cité désormais. Les musulmans ne se sont pas améliorés, ils en sont à s’entretuer. Cet échec répété, généralisé et sanglant ne devrait-il pas inciter à reconsidérer la problématique de la réforme? A se dire que c’est en amont qu’il faut réformer en priorité avant d’en venir à l’aval ? Que ce n’est pas la société qui est revêche mais le postulat qui est dépassé ? C’est à cette réforme précisément que nous appelons tout en nous inscrivant volontiers dans la ligne du principe qui veut que «tout travail de réforme, pour réussir, doit être conforme aux écritures religieuses». S’il n’entrave pas notre démarche, il nous laisse dubitatif quant à un «travail de réforme» qui aurait réussi dans l’histoire de la pensée islamique. Il n’a tout simplement pas existé. Et là, nous aimerions donner un exemple pour mesurer : le recul enregistré par le monde musulman entre le début et la fin du XXe siècle, et en Algérie entre 1971 et aujourd’hui.
    Tous les peuples ont connu dans les temps anciens l’usure, le prêt à intérêt («riba») qui est une pratique aussi immorale que ruineuse. La vie économique contemporaine diffère du tout au tout par rapport à ces temps. Les circuits et les mécanismes se sont complexifiés, la monnaie joue un rôle dans les systèmes économiques qu’elle n’avait pas à l’époque de l’apparition de l’islam. Elle est sujette à des variations quant à sa signification en termes de pouvoir d’achat, de sorte qu’une somme d’argent déposée dans un compte bancaire se trouve un an plus tard diminuée par rapport à sa valeur initiale. Le pourcentage d’intérêts servi au détenteur du compte peut donc être considéré comme une compensation du préjudice subi du fait de la hausse des prix.
    Un réformateur égyptien, Mohamed Abdou, a compris ce phénomène après un séjour en Occident avec Djamal-Eddine al-Afghani et saisi la différence entre l’usure et l’intérêt bancaire. Il a délivré en 1904 une «fatwa» (jurisprudence) autorisant le versement d’intérêts créditeurs et le paiement d’intérêts débiteurs. Lui emboîtant le pas, les autorités algériennes compétentes ont émis en 1971 une «fatwa» se prononçant sur le caractère licite des diverses opérations financières. J’ai consacré dans El Moudjahid du 23 août 1979 un article intitulé «L’islam et l’épargne» et peut donc prendre la mesure du recul en la matière.
    Les pays musulmans qui ont connu le colonialisme ou le protectorat étaient heureux jusqu’à il n’y a pas longtemps de pouvoir compter sur les habitudes de vie héritées de l’occupant qui avait fait plier les mœurs locales à son droit positif et qui ont permis les progrès qui les ont rapprochés de la modernité dont ils ont adopté certaines formes, mais pas les ressorts intellectuels. Une fois souverains, ils ont reconduit en catimini le modus vivendi entre les traditions locales et la modernité imposée en escomptant qu’il durerait. Jusqu’au jour où une subite éruption de fondamentalisme l’a fait voler en éclats, mettant leurs pays à feu et à sang. Actuellement, ils sont sommés d’apporter des réponses aux problèmes pendants comme ceux des institutions démocratiques, de la liberté de conscience, du respect des autres cultes et des droits de l’homme. Ou de prêter allégeance au nouveau calife de Bagdad.
    On rencontre un grand nombre de fois le mot «réforme» («islah») dans le Coran qui présente l’islam lui-même comme une entreprise de réforme des traditions païennes qui se sont opposées à lui et des religions (sur certains points) qui l’ont précédé tout en se proclamant leur héritier. Il doit le faire encore aujourd’hui avec les traditions qui se prévalent de lui mais ne sont plus que des «idées mortes» selon l’expression de Malek Bennabi. Ces soi-disant traditions et «culture islamique» sont devenues des pétitions contre l’Islam.
    Une parole célèbre, confondue parfois avec un hadith, énonce un principe selon lequel «lâ youslahou akhirû hadhihi-l-oumma illa bi ma çuliha bihi awwaluha» (le dernier de cette communauté ne saurait être réformé que par ce qui a réformé son premier). Qui étaient ces «premiers» à être réformés ? Les Arabes païens de La Mecque convertis à l’Islam. Avec quoi l’ont-ils été ? Avec le Coran originel, le Coran dans l’ordre où il a été révélé. Quels sont les «derniers» de la «oumma» ? Ce sont nous, les musulmans contemporains.
    En quoi devons-nous être réformés ? En tant que décadents. Comment ? En rétablissant le Coran dans l’ordre où il a été proposé aux «premiers». Voilà le véritable sens de cet aphorisme qui a échappé à tout le mouvement réformateur : changez l’amont et l’aval changera !
    Le Coran donne le titre de «réformateurs» aux prophètes envoyés aux anciennes communautés, comme il utilise le mot pour flétrir ceux qui prétendent réformer alors qu’ils n’envisagent que le mal, telles les idéologies populistes d’hier et d’aujourd’hui, qu’elles soient d’essence laïque ou religieuse.
    Sans s’en douter, les premières ont fait le lit des secondes puisque l’islamisation de la société est maintenant dictée et menée par la rue, par une nouvelle catégorie de «révolutionnaires barbus». On trouve le mot aussi dans le titre du livre du père du salafisme, Ibn Taymiyya : «Kitab as-siyyaça ach-char’iyya fi islah ar-râ’î wa-r-râ’ihâ» (Traité de conformation des dirigeants et des dirigés à la chariâ). Le mouvement des oulamas algériens au temps de Ben Badis a donné ce nom (Islah) à sa doctrine, comme s’en affublent volontiers les partis politiques islamistes.
    L’idée de réforme défendue ici s’appuie sur la notion d’«ijtihad» (effort d’interprétation) puisée des dialogues entre le Prophète et Moazz ibn Jabal, entre lui et Âli ou encore entre lui et Amr ibn al-Âss. Elle s’appuie sur celle de «tajdid» (rénovation) inspirée de la parole selon laquelle «Dieu envoie à cette nation au début de chaque siècle qui rénove sa religion». Mais qui l’a fait en vérité ? En quel siècle ? Ces deux mécanismes de promotion de la philosophie du droit («maqâcid-ach-chari’a») ont été conçus par le Prophète dans un élan d’encouragement de la liberté de pensée pour pallier les cas non prévus par le Coran. Comme nous comptons exploiter les fenêtres d’opportunité ouvertes par la remise en ordre du Coran et tirer profit des connaissances récemment acquises par la science pour actualiser le contenu de certains versets.
    Poser la question de la réforme de l’islam amène tout de suite une réaction d’obstruction : l’Islam n’est-il pas «valable en tout temps et en tout lieu» ? La pensée traditionaliste a en effet posé des verrous devant toute velléité d’exégèse qui tenterait de sortir des sentiers battus : le Coran est la parole de Dieu ; on ne peut pas accepter une partie de ses dispositions et récuser une autre. C’est tout ou rien, tout étant l’Islam et rien le «kofr» car l’exégèse littéraliste a banni tout esprit critique après l’épisode des Mû’tazila (courant rationaliste dans l’Islam des premiers siècles). Et puis d’abord, pourquoi a-t-on mis le Coran dans le désordre ?
    Il ne s’agit pas d’appliquer la critique au Coran, de lui ajouter ou de lui retrancher quoi que ce soit, mais à la décision prise par un quatuor de compagnons du Prophète, la «commission Zaïd», de remplacer l’ordre dans lequel il est venu par un ordre qui l’a mis à l’envers, chamboulant du coup sa perspective, son architecture et rendant difficile la signification de ses versets sans recourir à la science de «asbab an-Nouzoul» (les causes de la Révélation). C’est tout le sens de notre démarche. Enfin, la question comporte plusieurs compartiments et on ne peut donc y répondre qu’en répondant à toutes : qui est habilité à réformer ? Comment réformer ? Quoi réformer ?
    De toute évidence, ce ne sont pas les ulémas qui réformeront l’Islam car leur formation, leur formatage, leur culture et leurs intérêts matériels (c’est leur gagne-pain) sont liés au modèle classique. Ils l’ont mis sous coupe réglée et se sont arrogé le droit corporatiste de l’interpréter, ce qu’ils ne font d’ailleurs pas, se contentant de diffuser sans nuances le savoir des salaf (les anciens). Ils connaissent peut-être les Textes et le passé mais ils n’entendent rien au présent, à l’imbrication des destins humains et aux mutations survenues et en cours. S’ils savent pertinemment que le «riba» est interdit, ils ignorent superbement les théories monétaristes et le phénomène de l’inflation. Ils raisonnent comme s’ils vivaient au temps idéal et immuable de Médine. Imaginons qu’un «Fadhilat Cheikh» algérien est sollicité par un proche devant aller en pèlerinage afin qu’il lui prête de quoi compléter son pécule, soit 1 000 euros, qu’il s’engage à lui rendre l’an prochain.
    Le «alem» prélève de ses précieuses économies 140 000 DA et s’en va acheter au Square 1000 euros qu’il remet au futur hadji. L’année s’écoule et le taux de change passe à 158 000 DA pour 1000 euros. Le nouveau hadji se présente au jour convenu au domicile du «alem» et, après force bousboussades et saintes évocations, compte les billets ramenés pour honorer sa dette, soit 140 000 DA. Sûr de son droit moral et économique, «Fadhilat Cheikh» proteste qu’il lui faut 18 000 DA de plus pour acheter au cours du jour la somme en devises qu’il lui a prêtée et dont il a besoin pour se rendre à son tour aux Lieux saints de l’Islam. L’autre s’indigne, l’accuse de «riba» et le menace des feux de l’enfer… Qui a raison ? A l’époque de la Nahda, entre la première moitié du XIXe siècle et la deuxième moitié du XXe, un grand nombre d’intellectuels arabo-musulmans (réformistes et modernistes) ont réfléchi et écrit sur le décalage des musulmans par rapport à l’Occident. Mais les penseurs de la «Nahda» ne pouvaient relever un défi dont ils n’avaient pas saisi la nature. Ils estimaient qu’il fallait «revenir aux sources» alors que les musulmans y étaient immergés jusqu’à se noyer. Ils n’ont pas régressé parce qu’ils ont abandonné leur religion, ils ont persisté à être et demeurer ce que leur dictaient dans leur pieuse guidance des hommes de religion. Ils n’avaient pas besoin d’un «supplément d’âme» mais d’une décharge électrique pour les réanimer et leur faire reprendre leur marche dans le monde moderne.
    On ne la leur donna pas, les laissant moisir dans la fausse dévotion et le sous-développement. Remonter aux sources, c’était tourner la tête de l’avant vers l’arrière, chercher derrière soi, farfouiller dans de vieux livres réceptacles d’un savoir obsolète, restaurer l’enseignement «originel», reconstituer un décor social et vestimentaire comme on fait dans les studios d’Hollywood quand on se prépare à tourner un film historique avec une foultitude de figurants.
    Ils sont effectivement remontés qui aux «sources», qui au wahhabisme, qui à l’arabisme, qui au charlatanisme pour se retrouver tous, sans exception, en pleine guerre mondiale islamique. Pour eux il n’était pas question de réformer l’Islam, pensée sacrilège entre toutes, mais juste de voir comment «islamiser la modernité» avec les pétrodollars. L’erreur dans l’évaluation et l’aiguillage a conduit à un recul encore plus désolant. On n’a pas islamisé la modernité, on l’a enlaidie, clochardisée et barbarisée. Force est de reconnaître que le Coran n’a pas islamisé les Arabes, ce sont eux qui ont arabisé le Coran en le pliant à leur mentalité, en le soumettant à leurs inclinations, en le revêtant de leurs défauts et de leurs complexes. Eux qui, avant l’islam, enterraient les filles vivantes, sont revenus à cette pulsion même s’ils ne les enterrent plus sous de la terre, mais sous des étoffes. Si ça ne tenait qu’à eux, ils auraient fait de l’islam une religion nationale, comme ont fait les juifs avec le judaïsme.
    Réformer l’Islam, c’est d’abord amener par des programmes éducatifs rénovés les musulmans à regarder leur religion avec un œil nouveau, non en vue de modifier son credo (les cinq piliers) mais pour réévaluer le sens de l’Islam à la lumière des enseignements du passé, de l’expérience des autres religions, de l’impasse actuelle, du savoir moderne et des évolutions en incubation qui vont bouleverser dans les décennies à venir les bases de la pensée humaine et toutes les croyances religieuses.
    Réformer l’Islam, c’est changer notre culture sociale, notre enseignement religieux et la formation des imams et des ulémas sur la base d’une nouvelle exégèse conçue à partir du rétablissement du Coran dans l’ordre originel. C’est une lourde tâche qui requiert une synergie interétatique, des décennies de coopération entre un grand nombre de pays et des élites très compétentes dans les savoirs ancien et moderne.
    Prendre le chemin de la réforme, c’est se mettre ou se remettre en tête des idées toutes simples qu’on trouve d’ailleurs en filigrane dans le Coran et le Hadith, telles
    que : l’histoire humaine et religieuse n’a pas commencé avec l’Islam ; le Coran est écrit en arabe mais il n’est pas destiné aux seuls Arabes ; l’islam n’est pas la propriété d’un pays, fut-il celui où se trouvent les Lieux saints de l’Islam, ni d’une classe sociale, les ulémas ; Dieu est antérieur à l’Islam ; l’Islam est antérieur au Coran (exemple de Brahim al-Khalil), de même que la plupart de ses rites (pèlerinage, jeûne, interdiction de l’usure, circoncision…) ; l’univers ne peut pas avoir été créé pour les seuls êtres humains ; le paradis ne peut pas être réservé exclusivement aux musulmans ; Dieu ne peut pas privilégier 15% de sa création (les musulmans) et condamner le reste à l’enfer, quoi qu’ils fassent ; l’ordre dans lequel a été révélé le Coran a été changé par les hommes sans que le ciel leur tombe sur la tête ; le Coran confirme et continue les autres Livres sacrés nommément cités (Thora, Evangiles, Livre des Zoroastres) ou visés allusivement.
    Rien qu’en intégrant ces idées basiques, ces lieux communs, énormément de conséquences pourraient en découler sur la pensée et le comportement du musulman moyen, celui qui pose problème justement. Les décideurs qui pourraient mettre un jour *— si un tel jour devait venir — en marche les moteurs de la réforme ne sont pas les intellectuels, les penseurs, mais les Etats dans un cadre multilatéral comme celui de l’Organisation de la Conférence islamique (OCI) s’ils prenaient collectivement l’initiative d’inscrire à l’actif de cette organisation au chômage cette mission, ce plan de charge, cet ordre du jour. Mais c’est aux intellectuels, aux penseurs de frayer la voie avec leurs idées et d’y pousser avec leur travail de sensibilisation la société et les Etats. Les découvreurs de nouveaux horizons, les défricheurs de perspectives, les grands visionnaires en philosophie, en politique, en sciences et en inventions techniques, les créateurs artistiques à travers les âges, sont la crème du genre humain. Combien de milliards d’heures d’ignorance pour quelques minutes de vérité ? Combien de millénaires d’obscurité pour un jour de lumière ou quelques décennies de découvertes décisives? Combien de tentatives infructueuses pour quelques résultats qui ont sauvé in extremis l’espèce d’épidémies dévastatrices? Quatre-vingt milliards d’être humains environ ont vécu sur la terre depuis les origines. Combien de millions d’individus anonymes pour un homme reconnu pour le bien fait à sa nation ou, mieux encore, à l’humanité ? 80 milliards de vies pour combien de destins recensés par l’Histoire, dont se souvient la mémoire universelle ? Combien de millions d’hommes pour un seul savant (dans le domaine scientifique s’entend) ? Combien de médecins pour un Ibn Sina ou un pasteur ? Combien de physiciens pour un Einstein ou un Lemaître (qui était un prêtre) ? Combien de penseurs de la Nahda pour un Kawakibi ? Combien de millions de moutons de Panurge pour un héros dans les grandes avancées politiques ? Combien de faux moudjahidine pour un Larbi Ben Mhidi? Combien de faux dévots et d’illuminés pour un réformateur sincère ?
    N. B.


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    Dernière modification par zadhand ; 22/12/2014 à 10h04. Motif: Peut-on réformer l’islam ?
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    Contribution 08 Decembre 2014

    Aâm aâm celui qui nous avait taxé de ghachis...

    Réflexion : Remettre le coran à l’endroit


    Par Nour-Eddine Boukrouh
    [email protected]

    «Nous avons fait descendre vers toi un Livre béni afin qu’ils méditent sur ses versets et que les doués d’intelligence réfléchissent» (Coran, «Sâd», v. 28) ; «Ne méditent-ils pas sur le Coran ?» («Mohammed», v. 24) ; «A Nous ensuite incombera son explication» («al-Qiyama», v.19).

    Supposons un livre composé d’un certain nombre de chapitres d’inégale longueur que son auteur confie à un éditeur. Celui-ci le publie après avoir unilatéralement pris l’initiative de changer l’ordre des chapitres, mettant les plus longs en premier. Qu’adviendra-t-il du livre ? C’est le même titre, le même nombre de chapitres, de pages, de paragraphes, de lignes et de mots mais peut-on affirmer qu’il s’agit du même, au plan du sens, et qu’il aura les mêmes effets sur le lectorat que s’il était resté dans l’ordre où il a été conçu ? C’est ce qui est arrivé avec le Coran, et c’est la problématique que nous soulevons ici.
    Le Coran que nous avons entre les mains n’est pas le Coran tel que l’a reçu le Prophète (QSSSL) tout au long de la Révélation. C’est la même matière, le même nombre de versets et de sourates, mais l’ordre dans lequel il est «descendu» a été changé par les hommes une quinzaine d’années après sa mort. En révélant le Coran au Prophète, Dieu ne lui a pas demandé d’en réunir les versets et les sourates sous forme de Livre, sinon on aurait trouvé trace de cette injonction dans le Coran. Et lui n’a pas recommandé à ses compagnons d’en faire un corpus, sinon on en aurait trouvé mention dans les hadiths. Par contre, on sait qu’il a expressément ordonné que ses paroles, les hadiths, ne soient pas écrites pour ne pas être confondues avec les versets du Coran.
    L’ordre dans lequel ont été révélés les versets groupés en sourates est celui d’une série numérique allant de 1 à 114 sourates, alors que l’ordre dans lequel il est imprimé, édité et lu depuis quatorze siècles est le suivant : 96, 68, 73, 74, 1, 111, 81, 87, 92, 89, 93, 94, 103, 100, 108, 102, 107, 109, 105, 113, 114, 112, 53, 80, 97, 91, 85, 95, 106, 101, 75, 104, 77, 50, 90, 86, 54, 38, 7, 72, 36, 25, 35, 19, 20, 56, 26, 27, 28, 17, 67, 11, 12, 15, 6, 37, 31, 34, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, 51, 88, 18, 16, 71, 14, 21, 23, 32, 52, 67, 69, 70, 78, 79, 82, 84, 30, 29, 83, 2, 8, 3,33, 60, 4, 99, 57, 47, 13, 55, 76, 65, 98, 59, 24, 22, 63, 58, 49, 66, 64, 61, 62, 48, 5, 9, 110. Seules trois sourates ont conservé leur position dans l’ordre initial et actuel : «Sâd» (38), «Nûh» (71) et «al-Infitar» (82).
    Le Coran n’a pas été révélé en bloc, en une seule fois. Dans sourate «al-Qadr» (25e dans l’ordre chronologique - 97e dans l’ordre actuel, verset 1) on lit : «Nous l’avons fait descendre pendant la nuit d’al-Qadr.» Il faut comprendre par là que le Coran est «descendu» du lieu où se trouve son prototype (au «septième ciel» selon le Coran) vers la région de l’univers («premier ciel») où se trouve la Terre. De là, il a été délivré par l’Ange Jibril (Gabriel) au Prophète par morceaux (versets) sur une période de plus de vingt ans pendant lesquels ces fragments étaient notés au fur et à mesure par des «secrétaires de la Révélation» sur des parchemins, des peaux et des omoplates de chameaux. Les sourates mecquoises ont été révélées entre 610 et 622, et les sourates médinoises entre 622 et 632.
    Ceci est confirmé par les versets «Nous avons fait descendre un Coran que Nous avons fragmenté pour que tu le lises lentement aux gens. Et Nous l’avons fait descendre graduellement» («al-Îsra», 50e-17e, v. 106) et «En vérité c'est Nous qui avons fait descendre sur toi le Coran graduellement» («al-Insân», 98e-76e, v. 23). Les plus connus parmi les copistes qui ont transcrit les versets coraniques sont Ali ibn Abi Talib, Abdallah ibn Abbas, Ubayy ibn Kâab et surtout Zayd ibn Thâbit dont le nom est attaché à la recension du texte sacré pour la part qu’il y a prise sous les califes Abou Bakr puis Uthman. Les musulmans contemporains du Prophète ont donc vécu pendant une quinzaine d’années au moins sans disposer du Coran tel que nous le connaissons. Selon le célèbre traditionniste Anas ibn Malik, quatre compagnons du Prophète seulement ont mémorisé intégralement le Coran de son vivant : Ubay ibn Kâb, Muaz ibn Djabal, Zayd ibn Thâbit etAbu Zayd. Selon une autre source, ils seraient neuf.
    Ce qui renseigne sur le très petit nombre de personnes qui connaissaient le Coran par cœur dans sa totalité et justifie les craintes de Omar qui, le premier, eut l’idée de réunir en un «mashaf» les supports sur lesquels étaient consignés les versets avant que leurs détenteurs et les «huffadhs» (ceux qui l’avaient appris par cœur en partie ou totalement) ne disparaissent. Il la proposa à Abou Bakr, qui refusa de faire une chose que le Prophète n’avait pas faite, mais Omar eut raison de sa résistance en lui répliquant: «Quel mal y a-t-il à le faire ?» Les musulmans commenceront à sortir de leur impasse le jour où la réplique d’Omar deviendra un réflexe chez eux.
    Abou Bakr chargea le plus qualifié des scribes, Zayd ibn Thâbit, de procéder au recensement des supports disparates. Zayd, dit la tradition, était au courant des changements intervenus après la dernière révision du Coran faite par le Prophète dans la dernière année de sa vie avec l’Ange Jibril sous le nom de «al-ârdha al-akhira » (la dernière révision). Le travail fut fait, tous les versets furent copiés sur des feuilles et l’ensemble donna ce qu’on a appelé «mashaf Hafsa». Mais ni le calife Abu Bakr ni Omar n’ont voulu l’imposer à la communauté comme référent unique car d’autres versions circulaient en toute liberté comme celles établies par Ali et Ibn Mas’ûd.
    A la mort d’Abou Bakr, Omar lui succéda et ne s’inquiéta pas, pendant son califat qui dura dix ans, du sort du travail de Zayd et de ses collègues. Il était dans le même état d’esprit qu’avant sur le sujet, à savoir n’imposer aucune vulgate. Il faudra attendre l’avènement de Uthman pour que soit prise la résolution de doter la communauté d’un Coran unifié et consensuel.
    Il demanda à Hafsa, la fille de Omar, l’exemplaire en sa possession et le confia à un groupe composé de Zayd, Abdallah ibn Zubayr, Sa’ad ibn al-As et Abderrahman ibn al-Harith. Zayd dira plus tard : «Si on m’avait chargé de déplacer une montagne, cela m’aurait paru moins pénible que de compiler le saint Coran.»
    La recension du Coran n’a donc pas été le fait de Dieu, du Prophète ou des deux premiers califes mais d’une commission composée de quatre compagnons auxquels n’était reconnue aucune qualité d’infaillibilité. Ils avaient pourtant tout pouvoir d’accepter ou de récuser les versets qui leur parvenaient, le critère étant qu’il y ait au moins deux personnes pour corroborer la formulation d’un verset. Quelques-uns, proposés par des personnalités aussi éminentes que Ali et Omar, auraient été rejetés lors de la première recension.
    Il y a dans le Coran des versets où il est question de la «réunion» du Coran par Dieu : «Ne remue pas ta langue pour hâter sa récitation ; c’est à Nous qu’incombent sa réunion (djam’âhou) et sa diction. Quand donc Nous le récitons, suis sa récitation. A Nous ensuite de l’exposer clairement» («al-Quiyama» v. 16 à 20). D’abord, ces versets font partie d’une sourate révélée en 31e position (75e dans l’ordre actuel), donc au début de la Révélation, alors que le Coran est encore en cours d’«exposition», et non à sa fin, à l’heure de son «rassemblement». Ensuite on peut «réunir» des matériaux dans un ordre ou un autre. Or, c’est le problème que nous soulevons ici : le Coran qui a été réuni à la fin de la Révélation et fait l’objet de plusieurs révisions entre le Prophète et l’Ange Jibril est celui-là dont l’ordre a été modifié indépendamment des motivations et explications qui viendront le justifier.
    Les traditionnistes affirment aussi que le Coran a été partiellement classé par ordre de longueur décroissant des sourates par le Prophète avec l’accord de l’Ange Jibril, tout comme il aurait ordonné le transfert de certains versets d’une sourate à une autre. Mais on observe que même ce critère n’est pas respecté. En prenant le nombre de versets comme critère de classement des dix premières sourates, hors «al-Fatiha», (de 2 à 11), on n’obtient pas un résultat décroissant mais en dents de scie, en courbe sinusoïdale : 286, 200, 176, 120, 165, 206, 75, 129, 109 et 123. En prenant la deuxième dizaine (de 12 à 21) on a le même résultat : 111, 43, 52, 99, 128, 111, 110, 98, 135 et 112. Il en va de même pour la troisième : 78, 118, 64, 77, 226, 93, 88, 69, 60 et 34. Et ainsi de suite, jusqu’à la dernière sourate.
    Le classement des sourates dans un ordre autre que celui de leur révélation ne pouvait pas s’effectuer sans affecter, à terme, la perspective globale et l’économie du Coran. La règle des trois unités (unité de temps, de lieu et d’action) qui vaut pour tout ouvrage, divin ou humain, a été rompue, obligeant à un détour par les «sciences religieuses» pour comprendre le sens d’un verset ou saisir les raisons d’une disposition juridique. Il ne renseigne plus sur la succession des évènements, quel fait est survenu avant l’autre et dans quelle succession sont venues les obligations et les interdictions. Alors que si l’ordre chronologique avait été gardé, n’importe qui, même le non-musulman, aurait pu accéder avec plus de facilité au sens propre et figuré des versets du Coran et connaître les circonstances dans lesquelles un verset est venu. Les opinions divergent entre les traditionnistes sur le nom des sourates dont certaines en possèdent plusieurs (cas de «al-Fatiha », de «Fatir», d’«al-Moutaffifin» et d’«at-Tawba»), sur la date et le lieu de révélation d’autres sourates («ar-Râad», «al-Insân», «al-Bayyina», etc), ainsi que sur le nombre de versets de quelques-unes d’entre elles. Des sourates mecquoises hébergent des versets médinois et, dans une proportion moindre, des sourates médinoises abritent des versets mecquois ou révélés entre les deux villes ou ailleurs. Le titrage des sourates n’est pas non plus le fait de la Révélation mais des hommes, tandis que certaines portent des titres qui les couvrent peu, comme «n-Nahl» (2 versets sur 128), ou pas du tout comme «ach-Chûra» où il n’est pas question de cette notion à l’intérieur de la sourate mais dans une autre, «al-Imrân», au verset 159.
    Ce faisant, ce qui était à la fin de la Révélation a pu se retrouver à son début, ce qui visait une circonstance particulière pouvait devenir une règle générale, et ce qui s’adressait à une communauté passait pour être destiné à toutes. Quelques exemples : on rencontre dès la 2e sourate de l’ordre actuel les versets relatifs aux obligations (djihad, pèlerinage, jeûne…) et aux interdictions (vin, jeux de hasard, usure…), alors qu’ils ont été révélés en 87e position, dans la treizième année de la prédication et au-delà ; on trouve la codification des ablutions (wûdhû’) et l’amputation de la main en cas de vol dans la 5e sourate de l’ordre actuel, alors qu’elles ont été prescrites dans la 112e ; un verset est très aimé des musulmans mais ils évitent de le citer intégralement, préférant le faire débuter à partir de «Quiconque» : «C'est pourquoi Nous avons prescrit pour les enfants d'Israël que quiconque tuerait une personne non coupable d'un meurtre ou d'une corruption sur la terre, c'est comme s'il avait tué tous les hommes. Et quiconque lui fait don de la vie, c'est comme s'il faisait don de la vie à tous les hommes» («al-Ma’ida», v. 32).
    Qu’en est-il du Coran tel qu’il est actuellement par rapport au modèle «conservé auprès de Dieu» ? L’Archétype qui se trouve en quelque lieu de l’univers ou même en-dehors (théorie des multivers) est-il le même que celui que nous avons entre les mains ? Logiquement non, puisque celui qui était appris par cœur et psalmodié par les musulmans au temps du Prophète (celui «réuni» par Dieu) n’était plus, quinze ans après, le même.
    Dieu décrit en ces termes ce prototype : «C’est un Coran glorifié, préservé sur une Tablette auprès d’Allah» («al-Burûj», 27e-85e, v.21,22) ; «Et c’est certainement un Coran noble, dans un Livre bien gardé» («al-Wâqi’â», 46e-56e, v. 77 à 80) ; «C’est Nous qui avons fait descendre le Coran et c’est Nous qui en sommes les gardiens» («al-Hijr», 54e-15e, v.9) ; «Nous en avons fait un Coran arabe afin que vous raisonniez. Il est auprès de nous, dans l’Ecriture-Mère (le prototype), sublime et rempli de sagesse» («az-Zûkhrûf », 63e-43e, v. 2 à 8) ; « Il est consigné dans les feuilles honorées, élevées, purifiées, entre les mains d’ambassadeurs nobles, obéissants» («Abassa», 24e-80e, v. 13 à 16). De même qu’il se trouve sur terre, dans l’histoire humaine, «dans les Feuilles anciennes, les Feuilles d’Ibrahim et de Mûsa» («al-Â’la», 8e-87e, v. 18 et 19). Une question : on sait que Mûsa (Moïse) a reçu les «Tables», la «Thora», mais quelles «Feuilles» a reçu Ibrahim ?
    Le Coran n’est presque jamais évoqué nommément ou par sous-entendu sans être suivi de la mention qu’il est un «Rappel», donc une version de la Révélation primordiale faite périodiquement aux hommes depuis Adam. Il est d’ailleurs plus souvent désigné par «Rappel» que par son nom ; il n’est pas adressé aux seuls Arabes mais «aux humains» («Ce n’est qu’un Rappel pour les humains» («al-Moudathar», 4e-74e, v 31) ; il ne s’adresse pas à la terre seulement mais à l’univers («Ceci n’est qu’un Rappel pour les mondes» («at-Takwir» (7e-81e, v. 27 et 28).
    Mais s’il n’est qu’un «Rappel» en langue arabe adressé à une communauté qui n’avait rien reçu jusque-là («C’est une révélation de la part du Tout-Puissant, du très Miséricordieux, pour que tu avertisses un peuple dont les ancêtres n’ont pas été avertis» («Yâ, Sîn», 41e-36e, v. 5, 6) ; «Voici un livre béni que nous avons fait descendre, confirmant ce qui existait déjà avant lui, afin que tu avertisses La Mecque et les gens alentour» (« al-An’âm», 55e- 6e, v. 90, 92), une question se pose : que penser de la partie historique du Coran, la partie factuelle où est relatée l’histoire de la prédication mohammadienne, où sont rapportés les évènements qui ont marqué sa vie et son apostolat comme les batailles de Badr et du «Fossé» et des noms de personnes comme ceux d’Abou Lahab et de Zeyd (fils adoptif du Prophète) ? Figure-t-elle, cette partie historique, dans l’«Ecriture primordiale» révélée aux anciennes communautés ?
    Dieu ne demande pas aux hommes d’adorer le Coran, de rester pétrifiés devant sa splendeur mais de l’étudier, le méditer, chercher à travers ses descriptions, ses allusions, ses paraboles, ses métaphores et ses allégories les clés des mystères de la création, de l’univers et de Dieu lui-même. Dans la seule et très belle sourate «al-Qamar» (37e-54e), il est une demi-douzaine de fois répété : «Nous avons rendu le Coran facile pour la méditation. Y a-t-il quelqu'un pour réfléchir ?» Tout comme Il ne leur demande pas d’adorer le Prophète mais de le suivre dans la «Direction» qui lui a été révélée et qui est celle du bien des hommes.
    Il les presse de s’élever en savoir, incite les «doués d’intelligence» parmi eux à réfléchir sur Ses signes («ayates»), les met au défi de trouver dans le Coran des contradictions et de composer des versets semblables. Il les a exhortés des dizaines de fois à étudier l’histoire des anciens peuples, ce qui ne peut être valablement fait qu’avec le concours de l’archéologie, l’anthropologie, l’histoire et d’autres disciplines scientifiques.
    Il leur a enjoint de se lancer à la conquête de l’espace : «Ô peuple des djinns et des hommes ! Si vous pouvez sortir du domaine des cieux et de la terre, alors faites-le. Mais vous ne le ferez qu'au moyen d'un grand pouvoir» («ar-Rahman», 97e-55e, v. 33).
    Le Coran aurait connu aussi des changements dans son contenu, des versets ayant été abrogés tout en ayant été laissés dans le Texte : «Quand Nous faisons remplacer un verset par un autre, et Allah sait mieux ce qu’il fait descendre, ils disent : «Tu n’es qu’un menteur !» Mais la plupart d’entre eux ne savent pas» («an-Nahl», 70e-16e, v. 101). C’est dans cette sourate qu’il est question pour la première fois d’«abrogation» (naskh), sans autre précision sur les versets abrogés. On lit dans «al-Baqara» (87e-2e, v. 106) : «Si nous abrogeons un verset quelconque ou que nous le fassions oublier, nous en apportons un meilleur ou un semblable» ; ou encore : «Allah efface ou confirme ce qu'Il veut et l'Ecriture primordiale est auprès de Lui» («ar-Râad», 96e-13e, v. 39).
    Se fondant sur un verset connu sous le nom de «verset du sabre», les tenants du littéralisme (ceux qui prennent le sens des versets à la lettre, sans se soucier du contexte dans lequel ils ont été révélés) considèrent comme annulées plusieurs dizaines de versets (114 issus de 48 sourates selon Ibn Hazm, 140 et plus selon d’autres) au motif que ledit verset, faisant partie de l’avant-dernière sourate à être révélée, annule ceux qui recommandaient patience et tolérance envers les non-convertis. Le voici : «Après l’expiration des mois sacrés, tuez les polythéistes où que vous les trouviez. Capturez-les, assiégez-les et tendez-leur des embuscades. Si ensuite ils se repentent, accomplissent la salat et acquittent la zakat, alors laissez-leur la voie libre car Allah est clément et miséricordieux» («at-Tawba», 113e-9e, v. 5). On trouve le même verset, à quelques nuances près, dans une sourate antérieure : «Et combattez-les jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de polythéisme et que la religion soit entièrement à Allah. Puis s’ils cessent, ils seront pardonnés car Allah observe bien ce qu’ils font… Et s’ils inclinent à la paix, incline vers celle-ci toi aussi» («al-Anfal», 88e-8e, v. 39 et 61).
    A l’autre bout, des modernistes ont également voulu se prévaloir de la théorie de l’abrogation pour demander l’abolition des versets médinois relatifs au djihad et à la femme. Que veut dire au juste abroger des versets ? Les retirer du Coran ? Cela n’a pas été fait et ne pourrait être fait. Les déclarer inapplicables ? Par qui et comment ? Les soumettre à un «moratoire» (suspension provisoire) comme a proposé un jour Tarik Ramadan au sujet des châtiments corporels appliqués aux femmes ? Il y a aussi d’autres manières d’arriver aux mêmes résultats que l’abrogation : par abus, en soumettant des versets à une acception qui n’est pas la leur, ou de facto, en ne les appliquant pas comme font la plupart des Etats musulmans.
    Quelle différence, en effet, entre une loi non appliquée et une loi abrogée ? Les littéralistes et les fondamentalistes qui prônent le retour aux origines en toute chose devraient être, en vertu de leur propre logique, les premiers à réclamer la remise en ordre du Coran. Car qu’est-ce qui, aux yeux de n’importe quel musulman, peut paraître plus grave que de toucher au Coran, d’en modifier l’ordre céleste au risque de bouleverser sa philosophie, sa structure et sa cohérence ? Il n’est pas indifférent, comme on l’a vu dans les exemples donnés, que le Coran soit lu dans un ordre ou un autre. Les hommes qui ont pris cette décision ne jouissaient d’aucune once de sainteté, ne se prévalaient d’aucune autorité et leur acte n’a pas pris la dimension d’un évènement capital dans l’histoire de l’Islam alors qu’il l’est car ils ont quand même disposé de la parole de Dieu. Ils l’ont mise dans l’ordre que leur ont dicté leur bonne foi et leur conscience sans qu’un schisme éclate ou qu’ils soient désavoués ultérieurement.
    Il n’est même pas sûr que le commun des musulmans d’aujourd’hui le sache ou s’en soucie. Rappeler ces faits, ces vérités historiques, peut par contre être pris en ces temps d’ignorance pour une atteinte à l’Islam. Aussi étonnant que cela puisse paraître, il est maints domaines et maintes preuves, dont celle-là, où les musulmans du 1er siècle de l’Hégire (VIIe) étaient infiniment plus tolérants, ouverts et pragmatiques que ceux du XVe (XXIe). Pourquoi sont-ce les versets «durs» qui sont réapparus à notre époque et non les versets «doux» alors que le Prophète ne cessait de dire : «Ce qu’il y a de plus doux dans votre religion est ce qu’il y a de meilleur» ? Parce que les musulmans sont en guerre depuis plus d’un siècle : guerres de libération, guerres israélo-arabes, guerre contre l’ancienne URSS et les USA, guerre contre des régimes despotiques, guerre entre chiites et sunnites… Dans ces conditions, ils recourent tout naturellement à l’arsenal de versets révélés pendant les guerres qui opposaient l’Islam à ses opposants mecquois, médinois et juifs pour mobiliser et justifier leurs actes. Mais aussi parce l’islamisme a asséché les cœurs et durci les sentiments d’un grand nombre de musulmans entre eux d’abord, envers les autres ensuite.
    La vision du monde de l’Islam ne peut pas être la même selon qu’on soit au premier siècle ou au quinzième siècle de l’Hégire. Peut-on dire des sciences humaines ou exactes qu’elles sont les mêmes qu’il y a seulement une génération? Il ne devrait pas, sensément, y avoir une interprétation unique, contraignante, autoritaire et définitive du Coran en dehors des dispositions relatives au rite car aucune exégèse ne peut prétendre être valable éternellement.
    Des hommes ont eu la latitude d’interpréter à leur guise le Coran en s’appuyant sur le savoir de leur temps, mais on ne peut pas imposer à leurs successeurs, des siècles après, de s’y soumettre. A chaque palier d’évolution des connaissances humaines, au moins une fois par siècle, comme le recommandait indirectement le Prophète, on devrait pouvoir réinterpréter le Coran en ayant à l’esprit les dernières «révélations» de la science.
    La manière dont le Coran a été rassemblé et unifié à l’époque de Uthman a été conduite comme un acte d’Etat, un acte politique, visant le bien de la communauté et dans lequel ni Dieu ni le Prophète n’ont eu une part. Ce qui libère l’initiative car s’il est admis que l’affaire est strictement humaine, pourquoi des institutions multilatérales qualifiées ne pourraient-elles pas, quatorze siècles après, remettre le Coran dans l’ordre où il est venu pour retrouver sa perspective inaugurale ? Cela est-il envisageable ? Oui et non. Oui, car cela faciliterait l’adaptation de l’ancien «tafsir» aux temps que nous vivons et ceux à venir. Non, car il est irréaliste de songer à retirer de la circulation le Coran dans le monde entier et dans toutes les langues de la terre pour le remplacer par un nouveau.
    Non pas que la chose soit techniquement impossible, mais parce que la pesanteur culturelle et le poids des traditions sont plus forts que la vérité et l’intérêt de la «umma» ; parce que l’esprit d’initiative dont ont fait montre Omar, Abou Bakr, Uthman, Zaïd et de simples croyants du commun ne peut apparaître dans un milieu dominé par l’ignorance et la violence, dans un monde musulman où c’est la rue qui décide de l’orientation de la pensée et régule les mouvements de respiration de la société. D’aucuns pourraient répliquer que la civilisation islamique a pu naître, prendre son essor, durer plus de sept siècles et rayonner sur les trois continents connus de l’époque en dépit du chamboulement de l’ordre du Coran.
    Oui, mais c’est par la suite, à cause du «tafsir» qui en a découlé que des aérofreins ont été installés dans sa mécanique, dans son cerveau, limitant sa liberté de pensée et son rayon d’action. Des civilisations à base religieuse beaucoup plus vieilles qu’elle à l’instar de l’hindouiste (Inde), la judaïque (Israël), la bouddhique (Chine et Corée du Sud), la shintoïste (Japon) et la chrétienne (Europe, Etats-Unis) la dominent du haut de leur supériorité dans tous les domaines parce qu’elles ne portent pas d’œillères, qu’aucun dogmatisme ne cadenasse l’esprit de leurs élites ou ne canalise les énergies sociales vers l’au-delà plutôt que vers la résolution des problèmes immédiats. Elle traîne la savate dans les souks, n’ayant rien d’essentiel à faire que de traquer les manquements, surtout féminins, à l’«orthodoxie».
    Les musulmans aiment penser qu’il n’existe pas d’Eglise et de clergé dans l’Islam. Mais que sont ces cohortes d’ulémas, chouyoukh, da’iya, télécoranistes, mollahs et autres ayatollahs qui encadrent et supervisent le moindre frémissement dans leur pensée ou leur existence, sinon une autorité de fait, un clergé informel, quand ce n’est pas carrément un pouvoir théocratique ? Le Coran parle des «savants» sans les associer une seule fois à l’exercice religieux. Ils sont distingués pour leurs facultés intellectuelles et n’allaient pas tarder à apparaître partout où était parvenu l’Islam pour poser les jalons de la science moderne et propulser loin devant la civilisation islamique. Jusqu’à ce que les «ulémas» les rattrapent, usurpent leur titre et les chassent de la réflexion sur la religion.
    Non satisfaits du titre, ils se sont institués en «héritiers des Prophètes». Les musulmans ont trop compté sur Dieu (at-tawakkûl) et pas assez sur eux-mêmes (ijtihad et tajdid) alors qu’il leur a plusieurs fois signifié dans le Coran qu’«Allah ne modifie pas un bienfait dont il a gratifié un peuple avant que celui-ci ne change ce qui est en lui-même» («al-Anfal», 88e-8e, v. 53) ou qu’«Allah ne change rien à l’état d’une communauté tant que celle-ci n’a pas changé ce qu’il y a en elle» («ar-Râad», 96e-13e, v. 11). Il s’agit dans l’esprit du Coran du changement de nos idées, tandis que les ulémas ont compris qu’il s’agissait de notre façon de nous habiller et de gérer notre pilosité. Wallahou â’lam !

    Dernière modification par zadhand ; 22/12/2014 à 10h02. Motif: Réflexion : Remettre le coran à l’endroit
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