Quand tu vois et entends les programmes de certaines
chaînes TV dites algériennes, tu te dis que pour assai-
nir et nettoyer tout ça, faut faire appel à…… Netcom ! Fils et fille ingrats ! J’ai honte d’avoir, avec leur maman, conçu de tels enfants ! Ils ne pensent qu’à plonger leur tête de scribouillards dans des livres et des cahiers. Toujours à apprendre, à disséquer, à dessiner des cartes, et à tracer des graphes. Dehors, j’ai la hantise. Que répondre aux gens qui, d’un air goguenard, comme s’ils se doutaient de quelque chose, me demandent sur un ton faussement badin : «Et tes enfants, ils font quoi ?» Leur dire que ma descendance va à l’école ? Que mes mioches s’usent leurs fonds de culotte sur les bancs des collèges et lycées d’Algérie ? C’est au-dessus de mes forces. C’est trop me demander. Alors, de manière honteuse, je mens ! Oui, je mens. Je fabule. Je raconte avec force détails que le grand fait des trucs à droite et à gauche. Et que la petite se débrouille déjà fort bien en affaires, en petites combines qui rapportent gros. Oui, je sais, ce n’est pas bien de mentir. Mais c’est encore moins bien d’avouer que vos enfants suivent une scolarité normale, en école publique D.Z. Pourtant, j’en fais des efforts quotidiens pour les inciter à prendre une autre voie, plus normale, plus conforme à un avenir confortable pour eux et pour moi. Tenez ! L’autre jour, j’ai même laissé traîner sur la table du salon des prospectus vantant le tourisme et les voyages organisés, vachement organisés au Panama, aux îles Vierges ou à Singapour. Vous pensez que ces deux morveux y ont jeté le moindre coup d’œil ? Rien ! Pis ! Au moment où je m’apprêtais à sortir, le garçon m’a demandé de lui ramener du papier millimétré pour ses graphes et la fille m’a rappelé que son stock de crayons papier était épuisé. Lah’chouma. La totale h’chouma ! Des fois, et si je ne craignais pas d’être accusé de maltraitance envers enfants, je les prendrais par les épaules, ces deux voyous, et leur crierais fort aux oreilles : «Mais bon Dieu ! Qu’attendez-vous pour aller offshoriser comme tous les enfants de votre âge, comme tous les gosses de bonne famille ?» Une fois la colère retombée, je me résigne en me disant qu’au fond, c’est juste Dieu qui m’a maudit
en me donnant des enfants qui étudient à l’école et ne voient leur avenir que dans les livres. Et j’essaie de me consoler en fumant du thé pour rester éveillé à mon cauchemar qui continue.
H. L
|