A LA UNE/ACTUALITÉ
05.06.2015|16h33
Boukrouh, version "Penseur"
Décryptage
La conférence-débat animée, lundi dernier, par Noureddine Boukrouh, au Forum de « Liberté »,
n’est pas passée inaperçue.
Ses déclarations fracassantes ont été relayées par plusieurs médias et ont suscité plusieurs réactions.
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Ce jour là, d’aucuns avaient remarqué que l’ex-chef de parti (PRA, de 1989 à 1997) essuyait d’un revers de main toute question relative à l’actualité politique et économique. Se voulant au dessus de la mêlée, Noureddine Boukrouh se présente actuellement avec la casquette de « penseur», ne se consacrant qu’aux débats d’idées. Liberte-algerie.com revient sur ses déclarations,
dont certaines sont passées presque inaperçues, pourtant elles sont loin d'être anecdotiques.
Le « ghachi » et Ferhat Abbas
Lors de son intervention, Noureddine Boukrouh, et après avoir longuement critiqué la situation dans laquelle se retrouve l’algérien lambda, a eu un temps d’arrêt pour revenir à une formule, la sienne. Celle qui le poursuit depuis 25 ans, quand il avait utilisé le terme de « ghachi » pour parler des algériens. Depuis, ce mot est souvent utilisé avec la mention « dixit Boukrouh ». Une « relation » qui déplaît à ex-candidat de l’élection présidentielle de 1995 « on m’a collé cette accusation alors que je n’avais insulté personne » affirma-t-il avec dépit (il s’en expliqua dans une contribution publiée sur les colonnes de quotidien « le Soir d’Algérie », datée du 18 mars 2014. Lire ici). Il compara cet exemple avec ce qu’avait « subi » le premier Président du GPRA, Ferhat Abbas ; suite à sa fameuse phrase concernant l’Algérie dans l’histoire. Boukrouh précisera que celui qu’on avait surnommait « le pharmacien de Sétif » avait été également mal compris. Le « crime » de Ferhat Abbas était un passage d’un article publié, en février 1936, dans le journal « L’Entente » où il indiquait que « l´Algérie en tant que patrie est un mythe. Je ne l´ai pas découverte. J´ai interrogé l´histoire; j´ai interrogé les morts et les vivants; j´ai visité les cimetières: personne ne m´en a parlé...».
La UNE du journal « l’Entente » du 27 février 1936/©D.R.
Des phrases interprétées comme une approbation de l’assimilation par Ferhat Abbas . Une accusation que semble réfuter Noureddine Boukrouh, qui, sans trop s’attarder sur le sujet, rappellera que l’article en question était une réponse de Ferhat Abbas à un autre, publié sur les colonnes du journal “Le Temps”, l’ancêtre du “Monde”. Un autre pan de l’Histoire algérienne encore flouté pour des considérations “historiques”.
Pour revenir au mot « Ghachi », il a fait son chemin et a été déjà inclus dans des mémoires de recherche universitaires. Il est lié en premier lieu au nom de Boukrouh .
Définition de « ghachi » incluse dans le mémoire d’une thèse de magistère au département de langue française de l’université de Constantine (2003)/©Salim KOUDIL
L’ijtihad Boukrouhien face aux réactionnaires !
Comme tout Bennabiste qui se respecte, Noureddine Boukrouh n’a pas omis d’aborder un sujet qui lui tient à cœur, celui de la réforme de l’Islam. « Une thématique que je porte en moi depuis des décennies » dira-t-il en répondant à une question d’un journaliste. Il mentionnera qu’il a déjà lancé une « première étape » avec ses dernières contributions, écrites et télévisuelles. Il en annonce d’autres, malgré « le grand bruit » suscité par ses sorties « surtout la presse arabophone ».
A propos de sa « présence multimédia » de ces derniers mois, il l’explique par l’opportunité « J’ai pensé que le moment était venu et que les algériens pourraient, peut-être, accepter quelques idées ». Des idées qu’il présente comme un « Ijtihad », le sien : « j’ai fais mes recherches, ce sont mes idées, je ne les ai volées de personne, et ce sont des idées qui, jusqu’à présent, n’ont jamais été soulevées dans l’histoire du monde musulman ».
Il est vrai que dernièrement, Noureddine Boukrouh avait été sévèrement critiqué dans une certaine presse arabophone. Il lui a été reproché d’avoir « osé » soulever des questions théologiques. La dernière en date, c’est sa demande de revoir le classement des sourates du Coran. Cependant, alors qu’il argumente avec des données précises, il avait en face lui des détracteurs plus proches des réactionnaires que des "dialogueurs" .
Toutefois, Boukrouh semble ne pas prendre en considération les critiques, et avoue vouloir aller de l’avant! Son action tous azimuts s’étale jusqu’aux librairies. Depuis quelques jours deux de ses livres, édités en 2013, réapparaissent sur les étals (voir image en dessous).
Voulant toucher le maximum de personnes, Boukrouh est également présent sur les réseaux sociaux. Il possède sa propre page Facebook (vraisemblablement géré par son fils) avec plus de 5000 fans et un compte Twitter avec 443 followers.
Les dirigeants algériens ne veulent pas adhérer à l’OMC!
Le nom de Noureddine Boukrouh est, entre autres, lié à l’OMC (Organisation mondiale du Commerce). C’est en référence à la période allant de 2002 à 2004. Deux années durant lesquelles, il a porté le « chapeau » de ministre du Commerce. Il chapeautait le dossier d’accession de l’Algérie à l’OMC. A son époque, il était au 7e round de négociations. Onze ans après, son successeur au poste, Amara Benyounes, a participé, en mars dernier, au…12é round et a promis que l’adhésion est « au dernier virage ». Une situation étrange sur laquelle est revenu Noureddine Boukrouh, lors du Forum de Liberté,avec une critique acerbe contre les gouvernements successifs (voir vidéo en dessous)
A la question de savoir pourquoi l’Algérie n’a pas encore rejoint l’OMC, il répond sans ambages « parce que l’économie qu’on utilise, on l’utilise a des fins politiques » avant d’ajouter que « pour que ceux qui gouvernent ici restent seuls au commandes. Pour que l’’Algérie demeure la leur, au sens patrimonial ».
« (...) même pas comme Don Quichotte »
Noureddine Boukrouh ne cessait pas de répéter lors de son intervention au Forum de Liberté qu’il ne tarderait pas à rejoindre l’asile psychiatrique. Ses écrits, depuis 45 ans, n’auraient finalement pas contribué à changer les choses ! A ce demander, s’il n’était pas finalement découragé et lassé de se battre contre des moulins à vent.
Alors, Boukrouh est-il un Don Quichotte algérien ? Liberte-algerie.com lui a posé la question en marge du Forum. Il refusa catégoriquement la comparaison, donnant même l’air d’avoir été offusqué. Toutefois l’ex-ministre « daignera » revenir à de meilleurs sentiments en affirmant « humblement » que c’était lui faire trop honneur. Il lâcha cette réponse « je ne me considère même pas comme Don Quichotte. Lui, au moins, il a été un héros d’un roman. »…
A espérer que la comparaison soit fausse. Le héros de Miguel Cervantès, en l’occurrence Don Quichotte, n'est-il pas devenu clairvoyant à la fin du roman! Une « qualité » que les algériens espèrent ne pas retrouver chez Boukrouh quand il affirme “Nous avons eu 200 000 morts durant la décennie noire et je m’engage devant l’histoire que nous aurons 2 millions de victimes pendant cette décennie »...
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