Le pouvoir fédère l’opposition contre sa démarche
Haute Instance indépendante de surveillance des élections (HIISE)
le 30.10.16 | 10h00
La décision de la présidence de la République de consulter les partis politiques autour
de la nomination de l’ancien ministre, Abdelwahab Derbal, à la tête de la Haute instance
indépendante de surveillance des élections (HIISE) n’a pas eu l’effet escompté.
Abdelwahab Derbal,
président de la Haute instance de surveillance des élections
Voulant donner une certaine légitimité à cet organisme décrié, dès
l’annonce de sa création, par les formations politiques regroupées
au sein de l’ICSO, les tenants du pouvoir ont réussi, par cette
démarche, à les fédérer pratiquement tous contre leur initiative. En
effet, quelques jours après avoir envoyé ses missives aux chefs des
partis, le pouvoir reçoit des réponses cinglantes. Talaïe El Houriat de
Ali Benflis, le RCD, le FFS, le PT, le MSP et la majorité des partis
traditionnels se prononcent contre non pas la personne nommée à
la tête de cette instance, mais contre la «manœuvre du pouvoir» qui
risque de reproduire le scénario «des élections à la Naegelen».
«Le régime politique en place a toujours préféré le soliloque à la
concertation et au dialogue sur tout ce qui engage le présent et l’avenir
de la nation. Et s’il rompt avec cette solide tradition aujourd’hui, c’est
pour des consultations sur la présidence d’une instance dont la
performance, quelle qu’elle soit, ne changera rien aux cours discrédités
des processus électoraux nationaux», avait noté le président de Talaïe
El Houriat dans sa réponse à la Présidence. Ali Benflis estime que
«l’instance de surveillance des élections n’est pas conçue comme un
instrument de prévention et de dissuasion de la fraude».Elle n’a pour
raison d’être que de la perpétuer sous de nouvelles formes qui sont
vouées à être de nul effet sur la sincérité, l’intégrité et la transparence
des scrutins à venir», affirme-t-il, précisant que le pays a «besoin d’un
changement qui lui ouvre de nouveaux horizons». Pour sa part, le
Rassemblement pour la culture et la démocratie relève aussi des
incohérences dans la démarche du pouvoir, à commencer par le mode
choisi pour la désignation du président de la HIISE. «Consulter, c’est
demander des avis afin de faire le bon choix. Or, à travers la terminologie
utilisée dans ce courrier, il nous est demandé de porter un jugement sur
une personne physique sur la base d’un curriculum vitae la présentant
comme un commis de l’Etat au service de l’Exécutif depuis 1999», écrit
le président du RCD, Mohcine Belabbas, dans sa réponse à la présidence
de la République. Etant la première formation politique à avoir exigé la
création d’une instance indépendance de gestion des élections, le RCD
réitère sa contestation de la HIISE.
«Commenter une nomination, un non-sens»
Le Front des forces socialistes (FFS) n’a pas manqué de critiquer la
démarche «En l’absence des pré-requis politiques et institutionnels qui
feraient de la mise en place de la commission de surveillance des élections,
et donc des conditions dans lesquelles ladite commission devra effectuer
ses missions, un apport effectif à l’amélioration de l’exercice électoral dans
notre pays, le FFS n’estime pas utile d’apporter un jugement sur la personne
quand c’est sur la démarche ayant présidé à la création de la structure que
portent ses réserves.» Pour le FFS, «commenter une nomination à la tête
d’une structure est un usage qui n’a de sens que si on cautionne les conditions
de mise en place de la structure en question, qui émane d’une Constitution non consensuelle». Dans ce sens, le parti appelle à «un changement des pratiques
politiques en usage depuis des décennies qui font de la consultation politique
un formalisme sans prolongement dans les pratiques effectives du pouvoir».
Le Parti des travailleurs, le MSP et d’autres formations politiques saisies par
la présidence de la République n’ont pas rendu publiques leurs réponses. Mais
dans des déclarations à la presse, ils remettent en question la création de cette instance.
Madjid Makedhi