A LA UNE/Violences contre les enfants
le 11.03.16 | 10h00
Vous aussi, vous pouvez aider
Signaler une violence physique ou psychologique sur un enfant
est un devoir. Aujourd’hui, il existe un dispositif très élaboré pour dénoncer
les maltraitances et protéger ceux qui ont le courage de dénoncer.
Le signalement se fait quand on détecte une quelconque agression ou maltraitance sur un enfant.jpg
El Watan Week-end vous explique la démarche à suivre. «Trop peu de cas de signalement
d’enfants en situation de danger sont portés à la connaissance des autorités concernées»,
regrettent les représentants des organismes de police et de gendarmerie. Selon eux,
«on voit bien que les gens ont peur de s’immiscer dans la vie privée des autres, ont peur
de représailles, ou ne veulent pas avoir de problèmes avec les services de sécurité
en cas de fausse alerte».Pourtant, «le signalement devrait être de la responsabilité de tous
et tout le monde doit se sentir concerné. Il faut impérativement instaurer cette culture du
signalement pour le bien de nos enfants», ont-ils martelé lors d’une conférence de presse
organisée par l’Unicef et le ministère de la Solidarité nationale.
Meriem Chorfi, représentante du ministère de la Justice, affirme : «Tout le monde doit se sentir
concerné par le signalement. Qu’ils soient enseignants, éducateurs, professionnels de la santé
ou même voisins. Tous doivent prêter attention aux signes distinctifs d’un enfant en difficulté
et le signaler au plus vite». Bref, tout le monde a le devoir de le faire. Mais comment s’y prendre ?
- Quand est-ce que je dois me manifester ?
«Le signalement se fait quand on détecte une quelconque agression ou maltraitance sur un enfant.
Cette maltraitance peut être physique, morale ou sexuelle. Il peut aussi s’agir d’un abandon»,
explique Meriem Chorfi. Les représentants de la police et de la gendarmerie assurent que
«le signalement doit se faire à l’instant où l’on soupçonne qu’un enfant est en danger».
- Vers qui me tourner ?
Vers les services de sécurité (police ou gendarmerie), les services sociaux, mais pas uniquement.
On peut aussi s’adresser au délégué national pour la protection des enfants ; ce dernier est accessible
dans les tribunaux. «Nommé par décret présidentiel, c’est lui qui est chargé de recevoir
les signalements et de les analyser», précise Meriem Chorfi.
Selon elle, «ce dernier a ensuite la responsabilité de transférer ces signalements aux services spécialisés
pour enquêter et prendre les mesures nécessaires pour chaque affaire. Les services du milieu ouvert
à l’exemple de la Direction de l’action sociale (DAS) qui se trouvent dans tout le pays sont chargés
de suivre la situation des enfants en danger afin de les aider.
Leur mission consiste à établir un diagnostic à travers les enquêtes effectuées sur le terrain auprès
de l’enfant en question et de son représentant légal. Lesdits services s’assurent aussi que l’enfant
n’est pas en contact avec une quelconque personne qui pourrait le menacer. Par ailleurs,
les services du milieu ouvert se chargent aussi de la coordination entre les différents organismes
et institutions publiques chargés de la protection de l’enfant», ajoutera Meriem Chorfi.
- Comment signaler ?
Le signalement se fait de différentes manières. «Il peut se faire à l’aide de lettres de dénonciation,
par e-mail à l’adresse électronique des services de sécurité : ppgn.mdn.dz, ou par téléphone
au 15-48, le numéro vert de la Sûreté nationale, ou au 10-55, le numéro vert de la Gendarmerie nationale»,
explique Fatma Zohra Bouteldja, représentante du Commandement de la Gendarmerie nationale.
Elle poursuit : «On peut aussi se rendre directement au niveau des différents organismes chargés de
la protection de l’enfant : les services de protection de l’enfant ou brigades de service juvénile,
disponibles dans chaque commissariat ou caserne de gendarmerie. Ces brigades se trouvent dans
les 48 wilayas, au commissariat ou à la caserne de gendarmerie la plus prochesde chez vous,
à la Protection civile, aux urgences, au département de médecine légale, ou encore au niveau
des services sociaux.»
- Quels sont les moyens mis en place pour la protection de l’enfant ?
Concernant les moyens consacrés à la lutte contre les violences à l’égard des enfants,
Kheira Messaoudene, chargée du bureau national de la protection de l’enfance à la DGSN,
explique : «Les services de police ont mobilisé 50 équipes spécialisées dans le domaine
de la protection de l’enfance dans tout le pays pour traiter
les affaires de violence sur les enfants.
Chaque wilaya compte une équipe, hormis la capitale qui en dispose de 3».
Pour Fatma Zohra Bouteldja, représentante du Commandement de la Gendarmerie Nationale,
«la spécificité du traitement de cette catégorie d’âge requiert des acteurs formés dans
le domaine de la protection de l’enfance». Huit brigades de protection des mineurs ont été créées
autour de deux missions : la prévention et la répression.
Par ailleurs et afin d’inculquer la culture du signalement chez la population, notamment les enfants,
«des campagnes de sensibilisation sont fréquemment organisées dans les établissements scolaires.
Les services de police participent aussi aux émissions de radio et de télévision dans le but de casser
les tabous et signaler tous les cas enregistrés de maltraitance sur les enfants», assure Kheira Messaoudene.
- Que garantit la loi aux personnes qui dénoncent des violences ?
«Si avant l’entourage de l’enfant avait ‘‘peur’’ de signaler un acte de violence sur un enfant,
désormais la législation algérienne assure sa protection, même dans le cas où c’est une fausse alerte»,
confie Meriem Chorfi. Selon elle, «toute personne qui a procédé au signalement d’un quelconque cas
de violence sur un enfant, même s’il s’agit d’une fausse alerte, est protégée par les articles 18
et 31 de la loi 15-12 et n’est pas inquiétée par les services».
De son côté, Kheira Messaoudène affirme que «la loi de protection de l’enfance protège les gens
qui signalent ces crimes, même dans la mesure où l’alerte est fausse». Selon elle, cette loi encourage
les personnes à signaler tout abus, en créant l’Institution nationale pour la protection et la promotion
des droits des enfants à procéder à l’acte de signaler des crimes.
- Ce que dit la loi
En Algérie, le droit à la protection est garanti aux enfants par la Constitution et par
la Convention relative aux droits de l’enfant et ses protocoles additionnels.
L’arsenal législatif, notamment le code pénal, protège l’enfant contre toute atteinte
à sa personne, à son patrimoine, à son intégrité physique et morale
et à sa vie privée ou familiale.Tout enfant qui naît sur le territoire algérien doit être
obligatoirement déclaré dans les 5 jours suivant la date de l’accouchement à l’officier
d’état civil du lieu de naissance. La législation fixe également l’âge minimum
de recrutement à 16 ans au moins et interdit l’emploi des mineurs dans des travaux
dangereux, insalubres et nuisibles à leur santé ou préjudiciables à leur moralité.
- Elle a dit
Les statistiques des violences contre les mineurs ne représentent pas la réalité du phénomène.
Il existe des cas non signalés.»
Kheira Messaoudène. Commissaire divisionnaire et chef du bureau de protection de l’enfance
à la Direction générale de la Sûrete nationale (DGSN).
- Punir physiquement un enfant, une mauvaise habitude
Selon une étude de l’Unicef, la prévalence de la discipline violente envers les enfants est restée
pratiquement la même entre 2006 et 2013. 86% des enfants ont reçu une fois une forme
de punition physique ou psychologique le mois précédant l’enquête.
Les punitions psychologiques sont les plus fréquentes (81%), suivies par les punitions
physiques mineures (71%). 23% des 2-14 ans ont reçu une punition physique sévère.
La prévalence de la discipline violente envers les enfants reste marquée par
des disparités territoriales : les taux les plus élevés sont enregistrés dans l’Est en 2006
et dans le Nord et le Sud (90-91%) en 2012.Les taux les moins élevés sont relevés dans
le Sud pour les 2 ans. C’est encore dans le Sud que l’acceptation de
la violence domestique est la moins répandue.
Sofia Ouahib