L'utilisation d'un robot-tueur, un tournant historique
Fusillade de Dallas
AFP,publié le 09/07/2016 à 10:35
mis à jour à 10:45
Pour neutraliser Micah Johnson suspecté d'avoir abattu plusieurs officiers,
les forces de l'ordre américaines ont eu recours à une machine armée d'une bombe.
Vendredi à l'aube, un sniper suspecté d'avoir tiré sur des policiers et retranché depuis
des heures dans un bâtiment est finalement tué par un robot télécommandé, utilisé pour
faire détoner une bombe.Micah Johnson, jeune Noir de 25 ans, avait servi dans l'armée
américaine en Afghanistan. Sur son profil Facebook, il avait publié des images avec le
slogan «Black Power» des extrémistes afro-américains des années 1960 et 1970. Il avait
également ajouté la lettre «X» entre son prénom et son nom, probablement en référence
à Malcolm X, leader noir opposé à la non-violence prônée par Martin Luther King.
Pour neutraliser ce suspect armé, la police de Dallas disposait d'un robot Northrop
Grumman Andros, conçu pour les équipes de démineurs et l'armée. La photo d'un robot de
ce type a été diffusée par le magazine américain Popular Science.«C'est la première fois
qu'un robot est utilisé de cette façon par la police», a assuré sur Twitter Peter Singer, de la
fondation New America, un groupe de réflexion spécialisé notamment dans les questions
de sécurité. Ce spécialiste des méthodes modernes de combat a précisé qu'un appareil
baptisé Marcbot «a été employé de la même façon par les troupes en Irak».
L'arrivée des robots armés dans la police?Dans l'armée américaine, les robots terrestres transforment le visage de la guerre depuis
plusieurs années déjà. Ils sont notamment capables de récupérer et désactiver une charge
explosive, à l'aide d'un bras téléguidé par des soldats restés à l'abri du danger. Ils semblent
voués à être désormais de plus en plus employés à des fins de combat. Y compris par les
forces de l'ordre.En Chine, l'université de la défense nationale a conçu un appareil baptisé
«AnBot», destiné à avoir «un rôle important à jouer pour renforcer les mesures anti-terroristes
et anti-émeutes». «La caractéristique la plus controversée d'AnBot est bien sûr son ‘outil
intégré anti-émeute électrisé' (ressemblant certainement à un Taser ou à un aiguillon pour
bétail). Il ne peut être déclenché que par les humains contrôlant Anbot à distance», écrivaient
Peter Singer avec un autre spécialiste Jeffrey Lin, en avril, dans Popular Science. «Le fait
qu'Anbot soit si grand veut dire qu'il a la place d'intégrer d'autres équipements de police,
comme des gaz lacrymogènes et d'autres armes moins létales», poursuivaient les auteurs.
Des chercheurs de l'université de Floride travaillent eux au développement de «Telebot»,
comparé dans certains articles au célèbre «Robocop» imaginé au cinéma. Destiné notamment
à assister des policiers handicapés pour qu'ils puissent reprendre le service, Telebot a été
conçu «pour avoir l'air intimidant et assez autoritaire pour que les citoyens obéissent à ses
ordres» tout un gardant «une apparence amicale» qui rassurent «les citoyens de tous âges»,
selon un rapport d'étudiants de l'université de Floride.L'arrivée de robots aux armes létales
dans la police suscite de nombreuses interrogations.L'ONG Human Rights Watch et
l'organisation International Human Rights Clinic, qui dépend de l'université de Harvard,
s'inquiétaient ainsi en 2014 du recours aux robots par les forces de l'ordre. Ces engins
«ne sont pas dotés de qualités humaines, telles que le jugement et l'empathie, qui permettent
à la police d'éviter de tuer illégalement dans des situations inattendues», écrivaient-elles dans
un rapport.Si l'emploi des robotos armés était amené à se développer, le bouleversement
anthropologique suscité serait considérable.