On connaissait l'exception culturelle française, on découvre désormais l'exception portugaise en matière de droits de transmissions télévisées pour le championnat de football local.En effet, contrairement aux autres pays européens, où ces droits sont centralisés par chaque ligue de football national et ensuite vendus par lots afin de maximiser leur rentabilité – en Angleterre la dernière vente en date a permis d’atteindre la somme record de près de 7 milliards d’euros pour trois saisons, alors que pour la même période l’Espagne a enregistré 2,6 milliards d’euros de recettes –, sur le marché portugais on se dirige tout droit vers le « chacun pour soi », à savoir une négociation directe entre chaque club et les différents opérateurs télévisés présents sur ce marché.A qui la faute ?
Au jeu des accusations, c’est la ligue portugaise de football qui est pointée du doigt de façon quasi-unanime puisque celle-ci a été incapable de fédérer les clubs locaux et notamment les trois grands – SL Benfica, FC Porto et Sporting Clube du Portugal – autour d’un projet commun qui soit financièrement suffisamment alléchant pour tous.
Résultat : Benfica, qui voilà deux ans avait déjà fait preuve d’émancipation en décidant de commercialiser sur sa propre chaîne les matches joués à domicile par son équipe principale (revendiquant au passage plus de 300 000 abonnés !), vient de frapper de nouveau un grand coup en annonçant au début du mois de décembre la signature d’un contrat avec l’opérateur NOS (l’un des deux leaders sur le marché portugais de la télévision payante) pour la cession des droits de transmission des matches de football disputés à domicile par l’équipe A de l’historique club, ainsi que des droits de transmission et de commercialisation de sa chaîne, au Portugal et à l’international. L’accord, qui peut s’étendre sur dix ans, devrait rapporter au total 400 millions d’euros au club, un record pour le marché portugais.Au-delà de sa valeur inédite, ce contrat marque peut-être le premier acte d’une bataille qui semble se dessiner entre les différents opérateurs présents sur le segment de télévision payante, prêts à utiliser le pouvoir du football – une véritable passion dans ce pays – pour gagner des abonnés (ou à en voler à la concurrence). Ainsi, selon rapporte la presse portugaise, le groupe Portugal Telecom, désormais détenu par le groupe Altice de Patrick Drahi (propriétaire, entres autres actifs, de SFR-Numéricable), aurait déjà répliqué à l’initiative de NOS en signant des contrats avec des clubs de seconde ligne, comme Boavista ou Vitória de Guimarães, pour une diffusion exclusive de leurs matches sur sa plateforme Meo.
Et il n’est pas exclu que d’autres « soldats » prennent part à cette guerre puisque, toujours la presse locale, d’autres opérateurs seraient également intéressés par l’acquisition de droits télévisés. Quand on sait que 85% des foyers sont abonnés à une offre de TV de payante, on comprend mieux cet engouement. Reste que cette stratégie de fragmentation divise les analystes : si certains se congratulent que le contrat obtenu par Benfica va permettre aux autres clubs de négocier à la hausse leur prochaine cession d’image, d’autres en revanche voient là l’illustration de la faiblesse du championnat portugais (et de ses dirigeants), incapable de s’unir afin d’obtenir le meilleur prix.L’avenir donnera son verdict...
Sujet fusionné.