Tout débute un jour de cette année 1999, un peu avant le bug qui devait arrêter le monde. Bertrand Piccard vient de boucler un tour du monde en ballon, après 3 tentatives, dont l’une fut avortée à cause d’une fuite de kérosène.
Le ballon Breitling – crédits : bertrandpiccard.comIl se demande alors s’il est possible de s’affranchir de ce combustible pour n’utiliser que l’énergie solaire. Tout s’enchaine de façon régulière, à la manière d’une horloge Suisse. En 2003, il rencontre André Borschberg (avec qui nous avons eu la chance de discuter), pilote de chasse des forces aériennes suisses sur 3 types d’avions et pilote d’hélicoptère.C’est lui qui, plus tard, traversera le Pacifique, en Solo, accomplissant un vol record continu de 117 heures et 52 minutes.Après avoir trouvé quelques investisseurs, Bertrand et André se tournent vers l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne pour estimer la faisabilité du projet. Le concept est développé pendant 6 ans pour aboutir au premier prototype nommé HB-SIA (SI pour Solar Impulse) présenté le 26 juin 2009, soit 7 ans presque jour pour jour avant la traversée de l’Atlantique avec le Solar Impulse II par Bertrand.Plusieurs essais sont faits, dont un de 26 heures et 9 minutes sans interruption (incluant donc une nuit entière en vol continu) le 7 juillet 2010 et un autre, le premier vol international, de 13 heures et 630km reliant l’aérodrome militaire de Payerne à l’aéroport de Bruxelles (une fois).Evidemment, l’objectif était de faire le tour du monde. Et cela, en moins d’une année, tout en incluant les fameuses traversées des océans Pacifique et Atlantique.Mais entamé le 9 mars 2015 à Abu Dabi, le tour n’est toujours pas achevé à l’heure où ces lignes sont écrites. Ce n’est pas un échec, loin de là et nous allons expliquer pourquoi. Mais avant, nous devons aborder brièvement la conception de l’avion.Le poids plume plus large qu’un 747 et moins confortable qu’un tank
Il y a en fait 2 avions Solar Impulse. Le premier (le HB-SIA) mesurait 63,40 mètres d’envergure, alors que le second (HB-SIB) mesure 72 mètres. Oui 72 mètres, soit 3,5 mètres de PLUS qu’un Boeing 747.Les évolutions des concepts technologiques utilisées sont la cause des différences physiques entre les deux avions.
La capacité des 4 batteries a ainsi pu être augmentée (de 240 Wh/kg à 260 Wh/kg sur le SI 2) grâce à un travail de la société Solvay sur les électrolytes. Ceci s’est soldé par un poids plus important. L’avion volant à maximum 90km/h (soit 8 fois moins qu’un avion commercial), il est donc hyper sensible aux turbulences.Afin d’assurer la stabilité, l’envergure a été augmentée (ce qui justifie les 72 mètres) d’autant plus que la surface gagnée a permis d’y placer plus de panneaux photovoltaïques (pour un total de 200m2). Cela s’est traduit par un prise de poids du joujou qui est passé de 1600 kg à 2300 kg pilote compris. C’est 153 fois moins qu’un 747.Passons aux quatre moteurs électriques, offrant une puissance globale sur 24 heures de 15Cv (soit moins de la moitié d’un scooter MP3 de 500 cm3). Mine de rien, ces moteurs peuvent fonctionner 120 heures de suite, la limite que s’est donnée l’équipe, limite qui tient également compte des capacités physiques des pilotes. C’est 9 fois plus qu’un moteur Rolls-Royce Trent 900 monté sur certains Airbus A380.Le Solar Impulse 2 n’est pas vraiment un « avion » comme on se plait à l’imaginer en pensant aux vols commerciaux. Il ne peut embarquer qu’une seule personne : le pilote.Contrairement au premier avion, le SI2 permet au pilote de s’allonger un peuOubliez les bagages, les passagers, et même le copilote…Oui, ça pourrait être l’intérieur d’une des voitures du prochain Fast & Furious
Ajoutez une vingtaine d’ingénieurs (à ce jour, le projet réunit 70 personnes) se relayant jour et nuit pour palier tout risque d’accident et régler tout problème, notamment en anticipant tout changement météorologique. Et oui, le Solar Impulse n’aime ni les turbulences, ni les jours de pluie.Donc vous l’avez compris, le SI 2 est plutôt un laboratoire flottant qu’un avion.