Seul boxeur algérien à avoir remporté deux médailles en Championnats du monde, Mohamed Flissi est aujourd’hui, à 26 ans, le mieux placé des pugilistes algériens pour décrocher une distinction olympique le mois prochain à Rio.


Son petit gabarit de 1,62 mètres et ses 52 kilos n’ont pas empêché l’enfant de Boumerdès de devenir l’un des meilleurs boxeurs de sa catégorie. Mieux, la boxe a souvent été une histoire de défi pour Mohamed Flissi, comme le jour où il a enfilé une paire de gants pour mettre au tapis un enfant de son âge. Cela a lui a suffi par se faire remarquer par l’entraîneur Lounès Hammadache. «Je me rappelle, il y avait le fils de mon oncle qui pratiquait la boxe.
J’avais à l’époque douze ans. Je l’accompagnais souvent à l’entraînement et, comme mes amis, on voulait tester les gants et porter des coups. Mais je dois préciser que je n’ai jamais été un grand passionné de boxe. C’est venu juste comme ça. A ce jour, je ne me considère pas comme quelqu’un qui aime la boxe. Quand je quitte la salle de sport, je me déconnecte complètement avec tout ce qui touche avec cette discipline.»
Retrait
C’est durant la saison 2002/2003 que le jeune boxeur de Boumerdès a fait ses débuts dans la boxe, sous la coupe de Lounès Hammadache. L’entraîneur a très vite décelé chez lui une grande marge de progression. «J’ai commencé à boxer de manière officielle en 2004. Je pesais à l’époque 36 kilos et cela ne m’empêchait pas de gagner souvent par KO», précise t-il. En 2005, il décide de mettre un terme à sa carrière de boxeur après avoir été convaincu d’avoir été privé de la victoire en championnat d’Algérie à Sétif en 2004.
Les sollicitations des gens de son entourage et les personnes de sa région ne l’ont pas fait fléchir. Finalement, il est revenu à de meilleurs sentiments en 2008. Il était à l’époque junior. En 2009, il s’est lancé un défi : celui d’être champion d’Algérie et intégrer l’équipe nationale de boxe. Sous la coupe du coach Slimane Belounis, Mohamed Flissi a beaucoup progressé. Il remporte ainsi le titre de champion d’Algérie et rejoint l’équipe nationale en 2010.
Équipe nationale
Participant à sa toute première compétition internationale, à Pékin en 2010 lors des Mondiaux, le natif de Boumerdès réussit à décrocher sa première médaille. Elle était en bronze. «Dès que j’ai rejoint l’équipe nationale du temps de Azzedine Aggoune, je me suis investi corps et âme en me consacrant uniquement à la boxe. En 2011, j’ai pris part aux Jeux africains où j’ai décroché la seconde place. Je me suis également classé second en Championnat arabe. La même année, il y avait aussi les qualifications pour les Jeux olympiques.
C’est lors de cette compétition qui s’est déroulée au Maroc que je me suis fait connaître. J’ai battu en finale un boxeur marocain qui était champion d’Afrique.» Les JO de Londres n’ont pourtant pas laissé de grands souvenirs pour Mohamed Flissi. L’Algérien a été éliminé dès le premier tour par le Thaïlandais Kaeo Pongprayoon, qu’il avait pourtant déjà battu. Le pugiliste algérien s’est remis en question et a pu revenir en force. «Le fait que je perde devant un boxeur que j’avais l’habitude de battre et qui arrivé en finale m’a beaucoup motivé, car je savais que je pouvais faire nettement mieux», affirme Flissi.
Consécration
L’année 2013 a été celle de la consécration. Il arrache une médaille d’or au Jeux méditerranéens de Turquie. Deux mois plus tard, il parvient à décrocher la médaille d’argent lors du Championnat du monde qui a lieu au Kazakhstan, face à un boxeur local, Birzhan Zhakypov, dans la catégorie des 49 kg. «Il y avait vraiment de place pour s’imposer, mais on m’a fait perdre devant un boxeur qui jouait chez lui.
J’étais tout de même content de ma performance, car ça faisait 18 ans que l’Algérie n’était plus remontée sur le podium. Mon père était surpris. Pour lui, les champions du monde, C’était à la télé, avec Floyd Joy Mayweather. Alors qu’à présent, il y avait un vice-champion du monde chez lui, à la maison ! Mais il a fallu beaucoup de travail et de sacrifices pour y arriver», raconte Flissi.
Cette médaille d’argent est la seconde médaille algérienne après celle décrochée par Noureddine Medjhoud, en 1995. Cette performance n’a, par contre, pas surpris son coéquipier en sélection nationale, Chouaïb Bouloudinet ,qui affirme : «Flissi travaille beaucoup. Lors des compétitions, quand il monte sur le ring, il se transforme en véritable guerrier. Il veut toujours gagner.»
Préparation
Le natif de Boumerdès a su garder le cap en parvenant à se maintenir au plus haut niveau.En 2015, il est successivement médaillé d’or au Championnat d’Afrique de Casablanca et à Brazzaville, aux Jeux Africains. Au Championnat du monde amateur, à Doha, il décroche la médaille de bronze. Il devient ainsi le premier boxeur algérien à ramener deux médailles de deux championnats du monde différents.
A présent, il se concentre sur les Jeux olympiques 2016, qu’il va disputer pour la seconde fois. Il est, à l’instar de ses coéquipiers de la sélection— Réda Benbaâziz Zoheir Keddache, Abdelkader Chadi, Lyes Abbadi, Abdelhafid Benchabla et Chouaïb Bouloudinet — en constante préparation. Après le Kirghizistan et Cuba, les boxeurs ont effectué un regroupement au complexe sportif Sveltesse de Dély Ibrahim. Actuellement, le groupe de boxeurs peaufine sa préparation aux Etats-Unis. «C’est lui dirige habituellement les entraînements. Il est très conscient de la tâche qui l’attend et il sait ce qu’il cherche. C’est un vrai professionnel», nous a confié l’entraîneur adjoint Rabah Hammadache.
Podium
«J’ai plus d’expérience par rapport à l’édition de 2012. J’espère qu’elle me sera utile», avoue Flissi. Son coach, Mechouad Bahous, estime que son poulain a de sacrées qualités qui lui permettent d’espérer être sur le podium : «Il n’a peur de personne et il a une belle technique en boxe. C’est aussi un frappeur et il a de la force.
Et, en même temps, il est intelligent. Toutes ces des qualités lui permettront d’aller loin dans la compétition», déclare le coach national. De son côté, le directeur technique national de la Fédération algérienne de boxe, Mourad Meziane, table sur une médaille lors de ces Jeux. Nombreux, comme lui, estiment qu’il est temps que l’Algérie renoue avec le podium olympique après la dernière médaille de Mohamed Allalou à Sidney, en 2000. Mohamed Flissi pourrait être le bon candidat pour en accrocher une nouvelle.
Farouk Bouamama