Rwanda : la France ne participera pas aux commémorations du génocide

Le Monde.fr avec AFP | 05.04.2014 à 19h07 • Mis à jour le 05.04.2014 à 23h34






Le gouvernement français a décidé d'annuler sa venue aux commémorations du vingtième anniversaire du génocide rwandais, après les déclarations du président Paul Kagame l'accusant d'avoir participé aux massacres.

« La France est surprise par les récentes accusations portées à son encontre par le président du Rwanda » qui « sont en contradiction avec le processus de dialogue et de réconciliation engagé depuis plusieurs années entre nos deux pays », a précisé samedi 5 avril un porte-parole du Quai d'Orsay.
« Dans ces conditions, Mme Taubira, garde des sceaux, ne se rendra pas ce lundi à Kigali », a-t-il ajouté, alors que la ministre avait été choisie par François Hollande pour représenter le pays aux cérémonies.
« La France regrette de ne pouvoir prendre part aux commémorations du vingtième anniversaire du génocide, car elle tient à s'incliner devant la mémoire des victimes et à s'associer au deuil des familles et du peuple rwandais », déclare également le Quai d'Orsay.

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LES SOLDATS FRANÇAIS « COMPLICES » ET « ACTEURS »
Dans un entretien à paraître dimanche 6 avril dans l'hebdomadaire Jeune Afrique, le président rwandais Paul Kagame accuse une nouvelle fois la France de« participation » à l'« exécution » du génocide de 1994.
Evoquant la question des responsabilités, le président rwandais dénonce le « rôle direct de la Belgique et de la France dans la préparation politique du génocide et la participation de cette dernière à son exécution même ».
Il accuse les soldats français de l'opération militaro-humanitaire Turquoise, déployée en juin 1994 sous mandat de l'ONU dans le sud du pays, d'avoir été« complices certes » mais aussi « acteurs » des massacres. Ces accusations ont été maintes fois démenties par Paris.
En 2008, la commission d'enquête avait déjà évoqué l'affaire du village de Bisesero, où jusqu'à 50 000 Tutsis avaient trouvé refuge, accusant l'arméefrançaise « d'avoir retardé sciemment de trois jours le sauvetage de près de 2 000 survivants afin de laisser le temps aux tueurs de les achever ».
« DÉFENDRE L'HONNEUR DE LA FRANCE »
Ces accusations ont été maintes fois démenties par Paris. Dans une première réaction, la présidence française avait jugé samedi que les nouvelles déclarations de M. Kagame n'allaient « pas dans le sens de l'apaisement ».
« J'appelle le président de la République et le gouvernement français à défendresans ambiguïté l'honneur de la France, l'honneur de son armée, l'honneur de sesdiplomates », a demandé samedi soir Alain Juppé sur son blog.
Le premier ministre, qui dit connaître les exigences de la « Realpolitik » et le rôle économique et politique important que le Rwanda joue dans la région des Grands lacs et comprendre le choix qui a été fait de la réconciliation avec ses dirigeants, estime que cela ne peut se faire « à n'importe quel prix ».
« Pas au prix de la falsification de l'Histoire qui ne cesse de se propager à l'encontre de la France, de ses dirigeants politiques, de ses diplomates et de son armée », selon Alain Juppé.
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