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Mystère du "hiatus global" : ce sont les alizés qui refroidissent la Terre

Par Loïc ChauveauSciences et Avenir

Publié le 11-02-2014 à 19h00

Leur renforcement au centre et à l'est du Pacifique expliquerait pourquoi les températures n’augmentent plus depuis quinze ans, marquant une "pause" dans le réchauffement climatique.

La Coface tient ce mardi une conférence pour faire le point sur les risques pays et sectoriels dans le monde. (c) Sipa


MYSTÈRE. C’est un mystère qui est en passe d’être levé. Une équipe australo-américaine affirme dans Nature climate change du 9 février avoir déterminé la cause de la déconnection entre la teneur des gaz à effet de serre dans l’atmosphère toujours croissante et la stagnation des températures moyennes mondiales.
Le "hiatus global" : les températures stagnent alors que la teneur des gaz à effet de serre augmente

Ce "hiatus global" qui dure depuis 1998 a beaucoup excité les climato-sceptiques et intrigué les climatologues du GIEC. Ceux-ci ont invoqué tour à tour une activité solaire plus faible, la diminution de la vapeur d’eau dans l’atmosphère ou encore l’augmentation des aérosols réfléchissant le rayonnement solaire.
CRÉDIBLE. En septembre 2013, deux chercheurs du Scripps Institute(San Diego, Californie) tiennent cependant un coupable plus crédible (voirSciences et Avenir n°800). La température de surface des eaux aux équateurs des régions est et centrale du Pacifique a diminué de 1°C depuis la fin du 20e siècle, provoquant par absorption de la chaleur atmosphérique, une baisse des températures mondiales moyennes de 0,29°C.
L’Océan est affecté par "l’oscillation interdécennale du Pacifique" qui fait alterner eaux chaudes et eaux froides sur l’ensemble du Pacifique sur de longues périodes. Ainsi, entre 1950 et 1980, la dernière période négative avait provoqué une stabilité des températures mondiales. Or, après une phase positive de forte augmentation des températures, une phase négative est repartie à la fin de la décennie 90. Ce phénomène pourtant connu n’était pas pris en compte par les modèles climatiques. La réintroduction de ce paramètre a permis aux chercheurs du Scripps de parfaitement reproduire la stagnation des températures.
Les alizés auraient refroidi de 0,1 à 0,2°C la température moyenne du globe pour la seule année 2012

ALIZÉS. Mais quels mécanismes sont en cause ? C’est là qu’intervient le travail des chercheurs de l’université de South Wales et du CSIRO (Australie) et du Centre de recherche atmosphérique de Boulder (Colorado), de la NOAA et de l’université d’Hawaï (États-Unis). Cette équipe vient de montrer qu’un renforcement prononcé des alizées sur le Pacifique lors des deux dernières décennies – non pris en compte dans les données observées nourrissant les modèles climatiques - est suffisant pour expliquer un refroidissement de la surface.
Ces alizés poussent d’est en ouest des eaux de surface chaudes qui plongent au large de l’Australie vers la thermocline, la zone de transition entre couches superficielles et couches profondes. De là, ces eaux repartent vers l’ouest grâce à un courant équatorial de profondeur. Les chercheurs ont ainsi constaté pour 2012 un net gain de température au-dessous de 125 mètres de profondeur et une diminution de la chaleur présente entre la surface et cette limite.
ACCÉLÉRATION. L’effet net de ces vents anormalement forts est un refroidissement de 0,1 à 0,2°C de la température moyenne du globe pour la seule année 2012, ce qui explique une bonne partie du hiatus global. Les chercheurs estiment que ce phénomène pourrait bien encore durer tout au long de cette décennie si cette tendance d’alizées forts se confirme. Cependant une accélération du réchauffement climatique est attendue dès le retour d’une période positive de l’oscillation interdécennale du Pacifique.


Sur le web: Le réchauffement climatique causé par les humains, dit l'OMM