Opposé à la mesure, le gouvernement a le pouvoir de revenir dessus lors de la navette parlementaire.
Le Monde | 14.01.2016 à 21h49
Mis à jour le 15.01.2016 à 09h29
La suppression de la publicité dans les programmes
pour enfants de France Télévisions
Les députés ont voté ce jeudi la suppression de la publicité dans les programmes
pour enfants de France Télévisions, contre l’avis du gouvernement et du groupe PS
opposé à cette proposition de loi écologiste en raison de la perte
de recettes financières qu’elle entraînerait pour le groupe public.
La proposition, votée par le Sénat fin octobre, prévoit à partir du 1er janvier 2018
la suppression de la publicité commerciale durant les programmes de la
télévision publique destinés aux enfants de moins de douze ans, ainsi que durant
les 15 minutes qui les précèdent et qui les suivent.
L’adoption du texte a été possible en raison du faible nombre de députés socialistes
présents dans l’hémicycle jeudi soir. Le texte n’a toutefois pas été adopté conforme,
ce qui laisse la possibilité au gouvernement et au groupe PS
de revenir sur sa suppression lors de la navette parlementaire.
La ministre de la Culture et de la Communication Fleur Pellerin a d'ailleurs fait part
de son mécontentement, dans un communiqué. «Comme je l’ai dit dans l’hémicycle,
je ne laisserai pas fragiliser le service public de l’audiovisuel, ses salariés, ses missions,
son soutien à la création», a déclaré la ministre. «Le vote de ce soir ne clôt pas le débat.
Je continuerai à me battre (...) pour conforter les moyens
et l’indépendance du service public de l’audiovisuel», a-t-elle dit.
Fleur Pellerin et le président PS de la commission de la Culture Patrick Bloche, dont les
visages trahissaient un certain désarroi, ont tenté de faire traîner les débats mais cela
n’a pas suffi face à la mobilisation du groupe écologiste, dont les 18 membres étaient
presque tous présents, aidée par deux députés radicaux de gauche alors que les bancs
du PS, de la droite et du Front de gauche, tous opposés à la suppression, étaient quasi-vides.
Les écologistes ont fait «un coup de force», selon l’UDI Rudi Salles, en rétablissant par
des amendements la version initiale du texte qui avait été vidé de sa substance en commission
à l’initiative du groupe PS pour ne devenir qu’une simple demande
de rapport sur «l’impact» de la suppression de la publicité.
«La situation financière de France Télévisions est préoccupante. Les recettes publicitaires ont
diminué de 100 millions d’euros entre 2010 et 2014 et ce dispositif se traduira par un manque
de 15 à 20 millions d’euros», a répété, en vain, Fleur Pellerin au cours des débats.
Une mesure qui profiterait aux chaînes privées, dit Marie-George Buffet
La rédactrice de la proposition, l’écologiste Michèle Bonneton, avait argumenté que la jeunesse
«pâtit physiquement et psychologiquement d’une surexposition aux messages publicitaires».
Elle avait en revanche été vivement critiquée par la communiste Marie-George Buffet.
«Les enfants de moins de 12 ans regardent principalement les chaînes privées TF1, M6 et Gulli»,
lui a-t-elle fait remarquer. «Les annonceurs du secteur alimentaire pour la catégorie "enfants"
investissent d’abord dans les chaînes privées: TF1 reçoit 83 millions d’euros, M6, 48 millions d’euros»,
a-t-elle dit, en jugeant «immoral» que ces chaines privées bénéficient
d’une suppression de la publicité sur France Télévisions.
Le groupe socialiste s’était dit de son côté favorable à «l’autorégulation» alors que
l’UDI Rudi Salles jugeait ce texte «inutile».Le texte oblige par ailleurs le Conseil supérieur
de l’audiovisuel (CSA) à rendre compte chaque année devant le Parlement
de ses travaux sur la publicité télévisuelle dans les programmes
pour enfants des chaînes publiques et privées.