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yazidnic
29/01/2013, 15h50
Mis à jour le 29.01.13 à 17h42
Un tribunal de Kiev a condamné mardi à la réclusion à perpétuité un ancien général de la police pour avoir assassiné en 2000 le journaliste d'opposition Guéorgui Gongadzé, sans cependant régler la question cruciale du commanditaire. Dans cette affaire criminelle, la plus retentissante de l'histoire de l'Ukraine post-soviétique, «la Cour a conclu à la nécessité de condamner (Olexi) Poukatch à la réclusion à perpétuité», selon le texte du verdict lu en présence de la presse par le juge Andri Melnik.

Olexi Poukatch, vêtu d'un pull gris, a écouté le jugement depuis une cage de fer gardée par quatre policiers cagoulés, avant de mettre en cause dans cette affaire l'ancien président Léonid Koutchma, qui a maintes fois nié toute implication. Lorsque le juge lui a demandé s'il avait bien compris le jugement, Olexi Poukatch a lancé: «je vais le comprendre quand Koutchma et Litvine (chef de l'administration présidentielle à l'époque, ndlr) seront assis ici avec moi!»

Arrêté en 2009, Olexi Poukatch a reconnu avoir étranglé le journaliste Guéorgui Gongadzé. Il dirigeait au moment des faits le département des recherches criminelles au ministère de l'Intérieur. L'ex-général a néanmoins assuré n'avoir voulu qu'intimider sa victime en lui mettant une ceinture autour du cou et l'avoir serrée trop fort accidentellement, selon le texte du jugement. «Le prévenu a indiqué qu'il n'entendait pas tuer Gongadzé (...). Selon lui, sa mort était accidentelle», affirmation toutefois rejetée par le tribunal, dit ce texte.

Pendant pratiquement tout l'énoncé du verdict qui a duré plus de quatre heures, l'accusé a gardé les yeux baissés, tenant à la main un petit livre avec des images de saints. L'avocat d'Olexi Poukatch a aussitôt annoncé qu'il allait faire appel de cette décision, jugée trop sévère.

Assassinat commandité?

Valentina Telitchenko, avocate de la veuve de la victime, Myroslava Gongadze, a également déclaré qu'elle allait faire appel, estimant que la cour aurait dû reconnaître le caractère «commandité» de l'assassinat. «Nous allons insister sur l'enquête (...) concernant les commanditaires», a-t-elle déclaré aux journalistes. La question sur les commanditaires de ce crime suscite toujours une controverse, des proches de la victime continuant d'accuser Léonid Koutchma. Lors de son procès dont la majeure partie s'est déroulée à huis clos, Olexi Poukatch a affirmé avoir reçu l'ordre d'assassiner le journaliste de Iouri Kravtchenko, alors ministre de l'Intérieur et qui s'est suicidé en 2005 dans des circonstances mystérieuses, et que ce dernier l'avait reçu de Léonid Koutchma.

Le parquet avait engagé en mars 2011 des poursuites contre Léonid Koutchma dans cette affaire sur la base d'enregistrements sonores réalisés secrètement par un garde du corps du président ukrainien d'alors. Sur ces bandes, une voix ressemblant à celle de Léonid Koutchma suggérait de faire enlever le journaliste qui avait «dépassé les bornes». La justice ukrainienne a finalement mis fin aux poursuites visant l'ex-président, arguant que les preuves l'impliquant avaient été obtenues de manière illégale.

Olexi Poukatch a également reconnu avoir décapité le corps du journaliste, âgé alors de 31 ans, pour cacher les traces de son crime. Un crâne reconnu par le Parquet comme étant celui de Gongadzé n'a été retrouvé qu'en 2009, après l'arrestation de Olexi Poukatch. L'ex-général a organisé la filature du journaliste et dirigé un groupe de policiers qui ont enlevé Guéorgui Gongadzé le 16 septembre 2000 et l'ont tué.

En 2008, trois anciens policiers, qui avaient agi sous les ordres de Olexi Poukatch, avaient déjà été condamnés à des peines de 12 et 13 ans de prison pour ce meurtre. La mort de Guéorgui Gongadzé avait provoqué un énorme scandale dans cette ancienne république soviétique lorsque l'opposition avait mis en cause le président Koutchma. Guéorgui Gongadzé dont les articles ne touchaient à l'époque qu'un public restreint, était le fondateur et directeur du quotidien en ligne Ukraïnska Pravda, devenu depuis un des médias les plus influents en Ukraine. Sa dépouille n'est toujours pas enterrée, la mère du journaliste refusant de la reconnaître comme celle de son fils.

Avec AFP