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Voir la version complète : Or : la Fed va-t-elle ruiner les épargnants ?



soltan009
08/01/2013, 16h04
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Jusqu’à présent, les supposées largesses de la Federal Reserve (comprendre le financement monétaire du déficit public américain) étaient perçues comme la raison fondamentale d’acheter de l’or. A terme, le gonflement du bilan de la Fed deviendrait insoutenable, il entraînerait une poussée inflationniste contre laquelle l’or offrirait la meilleure couverture. Et si le lien entre l’inflation américaine et la variation du prix de l’or n’était pas respecté, peu importait : l’affaiblissement du dollar viendrait soutenir le cours du métal jaune.
Le graphique ci-dessous illustre bien le propos : la corrélation entre l’or et l’inflation n’existe pas. Le dollar et l’or sont en revanche très fortement liés, en particulier depuis 2004, date du début du rally sur le métal précieux (l'once est passée de 415 dollars à 1 645 aujourd’hui).
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En d’autres termes, cela veut dire que l’on peut chercher toutes les explications possibles.
1. Hausse de la part de l’or dans les réserves des banques centrales émergentes (ce mouvement semble s’essouffler après une hausse drastique de 4 400 tonnes en 2006 à 6 200 en 2012).
2. Achats structurels de l’Inde et de la Chine qui représentent à elles-deux un bon tiers de la demande mondiale. Malheureusement le gouvernement indien, qui fait face à un déficit extérieur grandissant, a posé des restrictions quantitatives et tarifaires aux importations d’or.
3. Propriétés supposées de diversification de l’or : le "beta" – ou lien – avec les autres actifs risqués est faible, mais positif, ce qui limite en réalité l’intérêt de l’or dans un portefeuille diversifié. En outre, la volatilité du métal jaune est très forte, bien supérieure à celle des actifs soi-disant sans risque comme les bons du Trésor américain.
4. La hausse de l’usage de l’or dans certaines transactions : comme devise parallèle au Vietnam, pour les échanges contre du pétrole entre la Turquie et l’Iran...
5. L’introduction de l’or dans les ratios de liquidité des banques (réglementation de Bâle 3), tout en sachant que le comité de Bâle a repoussé le week-end dernier la date d’introduction et de mise en conformité des banques avec les fameux liquidity coverage ratio.
On a beau chercher toutes les explications possibles, tant que l'on n’a pas de véritable vue sur le dollar, on ne peut pas avoir de vue sur l’or. Le graphique ci-dessous montre que la corrélation de court terme entre l’or et le dollar connait parfois des ruptures mais que celles-ci sont en générales assez brèves.
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La plus récente s'est produite dans un contexte un peu particulier où se télescopaient :
- Des négociations sur le "mur budgétaire" qui ont abouti sur une désormais habituelle décision "de la onzième heure". Face au risque, les investisseurs ont soit opté pour l’or, soit pour le dollar (celui-ci reste une valeur refuge) : ceci explique la corrélation temporairement positive.
- Un changement politique majeur au Japon, avec l’arrivée d’un premier ministre (Shinzo Abe) prêt à manipuler et instrumentaliser la BoJ (Banque du Japon) pour arriver à ses fins : un yen plus faible (et un financement monétaire du déficit public). Le taux de change USD/JPY a considérablement augmenté, un mouvement qui n’a que partiellement été suivi par l’or (comme on le voit ci-dessous, le niveau de l’USD/JPY pourrait justifier un cours de l’or plus proche de 1 400 USD que des 1 645 actuels).
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- Des dissensions internes au sein de la Réserve fédérale (qui a changé de mandat en choisissant de conditionner le réglage de l'inflation au niveau du taux de chômage), visibles à la publication de ses dernières Minutes. En jeu ? L’opportunité et surtout la durée du programme d’achat de bons du Trésor et d’obligations foncières (mortgage backed securities) par la banque centrale. Traduction pour les opérateurs : l’assouplissement quantitatif s’arrêtera peut être plus tôt que prévu, un mauvais signal pour l’or.
Beaucoup pensent que les dissensions internes de la Fed ont été exagérées. Et il est vrai que les nouveaux membres du board des gouverneurs (Stein, Powell) de la Fed, ainsi que les véritables "leaders" (Bernanke et Yellen) ne sont pas des faucons, c’est-à-dire des banquiers centraux très axés sur le risque inflationniste.
Pourtant, sans constituer un virage radical, cette inclinaison de la Fed reflète une économie qui, en dépit des risques budgétaires à venir, va mieux. Mais l’opportunité de soutenir l’activité avec une expansion rapide du bilan de la Banque centrale est de plus en plus critiquée.
Cette amélioration du climat économique, combinée à la certitude que la Fed ne poursuivra pas sa politique non-conventionnelle ad vitam aeternam, s’accompagne en outre d’un rééquilibrage des déséquilibres macroéconomiques. On pense en particulier aux comptes extérieurs. Sans nécessairement "acheter" la thèse de l’indépendance énergétique, il est clair que la dépendance extérieure s’amenuise à vue d’œil. Les deux graphiques ci-dessous, qui représentent les importations (nettes) de pétrole et (brutes) de gaz naturel, l’illustrent parfaitement.
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Paradoxalement, si l’or devait augmenter de nouveau, ce serait en raison de cette corrélation négative, et parfois difficile à expliquer, entre la bonne performance des marchés risqués et des matières premières d’une