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Voir la version complète : Quand les jihadistes de l’EI narguent l’armée turque à la frontière video Syrie Turqu



harroudiroi
29/10/2014, 18h27
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Capture d'écran d'une vidéo tournée par une agence de pesse kurde, montrant des combattants de l'EI en train de discuter avec des militaires turcs à la frontière syro-turque.



http://youtu.be/jjtA3uLTOcM

La vidéo de combattants de l’organisation de l'État islamique échangeant avec des soldats turcs près de Kobané a été diffusée récemment sur les réseaux sociaux. Des images qui ont suscité la colère des activistes kurdes, qui y voient la preuve d’une collusion entre les forces armées turques et le groupe jihadiste. Mais la scène semble davantage être le résultat d’une provocation de la part de combattants de l’EI.

Une zone disputée entre les jihadistes et les combattants kurdes

La vidéo a été tournée par les membres d’une agence d’information kurde appelée DIHA, le 22 octobre 2014, non loin de Tel al-Chair. Cette colline située à l’ouest de Kobané a changé de mains plusieurs fois depuis le début des combats, en septembre dernier, entre les jihadistes et les combattants kurdes des Unités de protection du peuple (YPG).



La zone filmée est un no man’s land situé à la frontière entre la Syrie et la Turquie, où des centaines de réfugiés kurdes ont laissé leurs voitures et autres engins agricoles avant de passer en Turquie, les autorités de ce pays ne leur permettant pas d’emporter leurs véhicules.

S’il n’est pas établi que les jihadistes tiennent toujours cette zone mercredi 29 octobre, une source au sein du groupe de l'État islamique a confirmé avoir pris le contrôle de la zone au moment de la vidéo. Une information confirmée par le porte-parole du YPG à Kobané, Hassan Charous, joint par téléphone. Appuyé par l’aviation de la coalition, les combattants kurdes ont réussi à en reprendre le contrôle le lendemain, soit le 23 octobre, ajoute-t-il. Le rapport de force reste toutefois très mouvant sur le terrain.

Des jihadistes qui signalent leur présence

La vidéo, éditée par l’agence DIHA, s’ouvre sur deux hommes armés - un en tenue afghane kaki et un autre portant un sweet-shirt noir - en train de brûler un objet au milieu du no man’s land. Les deux hommes se dirigent par la suite vers des véhicules abandonnés, où ils retrouvent d’autres combattants de l'EI. À 1’13’’, l’homme au sweet-shirt noir effectue des signes en direction de la frontière. À 1’41’’, on aperçoit cinq hommes en train de discuter près d’une camionnette chargée de marchandises. Puis, un peu plus tard, les deux jihadistes se dirigent à pieds vers la frontière turque. À 2’32’’, les deux hommes recommencent à faire des signes de la main comme pour se signaler aux militaires turcs puis se rapprochent, armes à la main, de la barrière barbelée qui délimite la frontière. Un véhicule militaire turc arrive alors sur les lieux. Quatre soldats descendent rapidement, enfilent des gilets pare-balles et se dirigent vers les deux jihadistes. La scène a lieu derrière le camion. On devine qu’une discussion s’engage mais le son de la vidéo étant de mauvaise qualité il n’est pas possible d’en connaitre la teneur.


Sınırda IŞİD ve Türk Askeri par imctv

Sur cette autre version plus longue de la vidéo relayée par un autre média kurde, un des soldats fait des signes aux jihadistes visiblement juste après leur échange pour leur demander de s’éloigner [3’13’’]. Avant de partir, les deux hommes répondent aux soldats avec le geste de ralliement des jihadistes l’index levé vers le ciel, puis crient "allahou akbar. […] La ilaha illa Allah (Dieu est grand […]. Il n’y a de Dieu qu’Allah)."

Ce n’est pas la première fois que des combattants de l’EI réalisent de telles incursions depuis le début des combats à Kobané. Des réfugiés kurdes ont aperçu à plusieurs reprises des jihadistes dans le no man’s land près de la frontière turque, où ils se sont emparés de plusieurs véhicules appartenant à des civils kurdes.

"Rien de suspect" dans cet échange

La Turquie est soupçonnée depuis plusieurs mois par de nombreux militants kurdes de soutenir en sous-main les combattants de l’EI. Plusieurs sites d’information kurdes ont donc présenté cette vidéo comme étant une preuve de cette "coopération". Pourtant, pour Saradar K., un activiste kurde de Kobané, l’attitude des soldats turcs n’a rien de suspect. "Les jihadistes sont plutôt venus narguer les militaires turcs, parce qu’ils venaient de prendre le contrôle de cette zone à l’ouest de Kobané. Et il est tout à fait normal que les militaires turcs ne réagissent pas face à cette provocation. Ils ne peuvent pas intervenir comme ça dans un autre pays, la Syrie, sans qu’ils en aient reçu l’ordre au plus haut niveau."

Le Parlement turc a voté début octobre une résolution autorisant l’intervention de la Turquie, au côté des forces de la coalition, contre l’EI en Syrie et en Irak. Mais aucune opération n’a eu lieu depuis, les forces armées turques se contentant d’être postée à la frontière. Une stratégie qui s’explique en partie par le fait que la Turquie ne veut pas soutenir le YPG, une émanation en Syrie du PKK, groupe armé autonomiste kurde que la Turquie considère comme un groupe terroriste.

Ankara a toutefois autorisé les peshmerga, les combattants kurdes d’Irak, à transiter par la Turquie pour aller se battre contre l’organisation de l’EI à Kobane. Les premiers peshmergas sont arrivés dans la nuit du mardi 28 au mercredi 29 octobre en Turquie, pour rejoindre la ville syrienne kurde assiégée par les jihadistes depuis le 16 septembre.