edenmartine
23/04/2014, 10h51
non-lieu pour Bayerhttp://s1.lemde.fr/image/2011/06/16/534x267/1537225_3_70d7_une-abeille-domestique-apis-mellifera_13fd4a696b0fc781b314a2da2e5422a8.jpg
Une abeille domestique "Apis mellifera". | Fabien Virey - OPIE« La communauté scientifique n'a pas démontré l'existence d'un lien de causalité entre l'introduction du Gaucho dans les cultures agricoles et l'augmentation de la mortalité des abeilles », a tranché, dans une décision datée du 1er avril, le juge d'instruction chargé de l'enquête (http://www.lemonde.fr/enquetes/) sur la responsabilité du pesticide commercialisé par le groupe Bayer (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/bayer) dans la disparition des butineuses.Depuis 2001, le groupe faisait l'objet d'une information judiciaire concernant son produit, soupçonné de provoquer (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/provoquer) la disparition de cheptels d'abeilles, et qui fait aujourd'hui l'objet de restrictions en Europe (http://www.lemonde.fr/europe/).
D'AUTRES FACTEURS RESPONSABLES
L'instruction a conclu que d'autres facteurs que ce seul insecticide intervenaient dans la mortalité des abeilles, tels que des parasites comme le Varoa, le frelon asiatique ou la perte de diversité des cultures. Si les apiculteurs reconnaissent la multiplicité des causes, ils soutiennent que les pesticides en sont la principale.
L'Union nationale de l'apiculture française (UNAF), partie civile dans cette affaire, a dit avoir (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/auxiliaire/avoir) fait appel de ce non-lieu. Le dossier sera donc de nouveau examiné par la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris (http://www.lemonde.fr/paris/).
Les plaignants accusaient également Bayer (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/bayer) d'avoir (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/auxiliaire/avoir) caché la toxicité réelle du pesticide lors de l'obtention des premières autorisations de mise sur le marché. Mais pour les experts judiciaires sur lesquels s'appuie le juge, « les éléments objectifs du dossier ne permettent pas de dire (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/troisieme-groupe/dire) que la société Bayer (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/bayer) a été à l'origine d'une rétention d'information ». Pour le juge « appréhender les troubles du cheptel apicole sous l'angle pénal apparaît d'emblée malaisé ».
Déclin des abeilles : les mots qui fâchenthttp://s2.lemde.fr/image/2011/10/04/534x267/1581827_5_1b96_ill-1581827-71ba-ill-1353843-5083-abeille-butine_bd21c6b0d8982ee2e64dd85d670e3133.jpg
D.R.C’est une étude fascinante qu’a rendue publique, le 7 avril, la Commission européenne. Conçue par Bruxelles et conduite par un laboratoire de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (http://www.lemonde.fr/securite-sanitaire/) française (Anses), cette enquête (http://www.lemonde.fr/enquetes/) a essentiellement consisté à mesurer (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/mesurer) la mortalité des abeilles domestiques (Apis mellifera) dans 17 pays européens.Mais le plus intéressant n’est pas le résultat obtenu. Le plus intéressant est le résultat qui n’a pas été obtenu.
Lire : En Europe, le déclin des abeilles frappe lourdement les pays du Nord (http://www.lemonde.fr/planete/article/2014/04/07/en-europe-le-declin-des-abeilles-frappe-lourdement-les-pays-du-nord_4396816_3244.html)
Pourquoi ? Simplement parce que le protocole choisi visait à restreindre (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/troisieme-groupe/restreindre) la recherche des causes des mortalités observées aux uniques pathogènes naturels : seules les grandes maladies d’Apis mellifera ont été recherchées dans les ruchers visités.
Nous ne saurons donc pas quels résidus de pesticides se trouvaient dans les colonies les plus touchées. Et ce, alors même que des travaux académiques toujours plus nombreux montrent les effets délétères des nouvelles générations de pesticides et des mélanges de substances actives sur la survie des abeilles et des pollinisateurs.
Nous sommes donc dans le cadre d’un exercice assez étrange, qui met le discours et la pratique scientifiques au service de contingences extérieures à la science. Il faut chercher (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/chercher), mais dans la « bonne » direction. Il faut trouver (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/trouver), mais pas trop. Pour, surtout, éviter (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/%C3%A9viter) toute découverte indésirable.
Lire aussi (éditions abonnés) Un mal mystérieux décime les ruches ariégeoises (http://www.lemonde.fr/planete/article/2014/04/07/un-mal-mysterieux-decime-les-ruches-ariegoises_4396817_3244.html)
Les architectes de l’étude arguent du coût qu’il y aurait eu à prélever (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/pr%C3%A9lever) des échantillons dans toutes les ruches visitées. C’est de bonne guerre. Mais lisons les trente pages du rapport rendu public : le mot « pesticide » n’y figure pas. Le mot « insecticide » non plus, pas même une litote aussi bénigne que « produit phytosanitaire ».
On cherche, en vain, les mots « agriculture », « pratiques agricoles »… On se frotte les yeux. C’est un peu comme si une étude épidémiologique sur les causes du cancer (http://www.lemonde.fr/cancer/) du poumon avait non seulement omis de questionner (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/questionner) les participants sur leur consommation (http://www.lemonde.fr/consommation/) de tabac (http://www.lemonde.fr/tabac/) mais que, de surcroît, les mots « cigarette » ou « tabagisme » aient été exclus de son compte rendu.
UNE PUDEUR SÉMANTIQUE DE CIGARETTIER
« Des analyses (http://www.lemonde.fr/analyses/) ultérieures exploreront les liens statistiques entre la mortalité des colonies et des facteurs de risques incluant la prévalence (http://www.lemonde.fr/valence/) de maladies, l’utilisation de traitements vétérinaires, le contexte (http://www.lemonde.fr/contexte/) apicole et d’autres paramètres », écrivent les auteurs, rassemblant sous l’énigmatique « autres paramètres », tout ce qui a trait à l’agrochimie et au modèle agricole dominant.
Cette pudeur sémantique rappelle celle des vieilles études financées par les cigarettiers américains, qui attribuaient d’abord le cancer du poumon à la pollution atmosphérique, au radon, aux prédispositions génétiques et, éventuellement, au…« mode (http://www.lemonde.fr/mode/) de vie » – c’est-à-dire à la cigarette.
Que la science se pratique dans un contexte où il n’est pas possible d’énoncer un fait aussi trivial que le caractère nocif des insecticides pour les insectes devrait nous porter (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/porter) à une profonde inquiétude. Pas forcément pour les abeilles mais, surtout, pour ce que cela dit de notre société.
Une abeille domestique "Apis mellifera". | Fabien Virey - OPIE« La communauté scientifique n'a pas démontré l'existence d'un lien de causalité entre l'introduction du Gaucho dans les cultures agricoles et l'augmentation de la mortalité des abeilles », a tranché, dans une décision datée du 1er avril, le juge d'instruction chargé de l'enquête (http://www.lemonde.fr/enquetes/) sur la responsabilité du pesticide commercialisé par le groupe Bayer (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/bayer) dans la disparition des butineuses.Depuis 2001, le groupe faisait l'objet d'une information judiciaire concernant son produit, soupçonné de provoquer (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/provoquer) la disparition de cheptels d'abeilles, et qui fait aujourd'hui l'objet de restrictions en Europe (http://www.lemonde.fr/europe/).
D'AUTRES FACTEURS RESPONSABLES
L'instruction a conclu que d'autres facteurs que ce seul insecticide intervenaient dans la mortalité des abeilles, tels que des parasites comme le Varoa, le frelon asiatique ou la perte de diversité des cultures. Si les apiculteurs reconnaissent la multiplicité des causes, ils soutiennent que les pesticides en sont la principale.
L'Union nationale de l'apiculture française (UNAF), partie civile dans cette affaire, a dit avoir (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/auxiliaire/avoir) fait appel de ce non-lieu. Le dossier sera donc de nouveau examiné par la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris (http://www.lemonde.fr/paris/).
Les plaignants accusaient également Bayer (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/bayer) d'avoir (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/auxiliaire/avoir) caché la toxicité réelle du pesticide lors de l'obtention des premières autorisations de mise sur le marché. Mais pour les experts judiciaires sur lesquels s'appuie le juge, « les éléments objectifs du dossier ne permettent pas de dire (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/troisieme-groupe/dire) que la société Bayer (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/bayer) a été à l'origine d'une rétention d'information ». Pour le juge « appréhender les troubles du cheptel apicole sous l'angle pénal apparaît d'emblée malaisé ».
Déclin des abeilles : les mots qui fâchenthttp://s2.lemde.fr/image/2011/10/04/534x267/1581827_5_1b96_ill-1581827-71ba-ill-1353843-5083-abeille-butine_bd21c6b0d8982ee2e64dd85d670e3133.jpg
D.R.C’est une étude fascinante qu’a rendue publique, le 7 avril, la Commission européenne. Conçue par Bruxelles et conduite par un laboratoire de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (http://www.lemonde.fr/securite-sanitaire/) française (Anses), cette enquête (http://www.lemonde.fr/enquetes/) a essentiellement consisté à mesurer (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/mesurer) la mortalité des abeilles domestiques (Apis mellifera) dans 17 pays européens.Mais le plus intéressant n’est pas le résultat obtenu. Le plus intéressant est le résultat qui n’a pas été obtenu.
Lire : En Europe, le déclin des abeilles frappe lourdement les pays du Nord (http://www.lemonde.fr/planete/article/2014/04/07/en-europe-le-declin-des-abeilles-frappe-lourdement-les-pays-du-nord_4396816_3244.html)
Pourquoi ? Simplement parce que le protocole choisi visait à restreindre (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/troisieme-groupe/restreindre) la recherche des causes des mortalités observées aux uniques pathogènes naturels : seules les grandes maladies d’Apis mellifera ont été recherchées dans les ruchers visités.
Nous ne saurons donc pas quels résidus de pesticides se trouvaient dans les colonies les plus touchées. Et ce, alors même que des travaux académiques toujours plus nombreux montrent les effets délétères des nouvelles générations de pesticides et des mélanges de substances actives sur la survie des abeilles et des pollinisateurs.
Nous sommes donc dans le cadre d’un exercice assez étrange, qui met le discours et la pratique scientifiques au service de contingences extérieures à la science. Il faut chercher (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/chercher), mais dans la « bonne » direction. Il faut trouver (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/trouver), mais pas trop. Pour, surtout, éviter (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/%C3%A9viter) toute découverte indésirable.
Lire aussi (éditions abonnés) Un mal mystérieux décime les ruches ariégeoises (http://www.lemonde.fr/planete/article/2014/04/07/un-mal-mysterieux-decime-les-ruches-ariegoises_4396817_3244.html)
Les architectes de l’étude arguent du coût qu’il y aurait eu à prélever (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/pr%C3%A9lever) des échantillons dans toutes les ruches visitées. C’est de bonne guerre. Mais lisons les trente pages du rapport rendu public : le mot « pesticide » n’y figure pas. Le mot « insecticide » non plus, pas même une litote aussi bénigne que « produit phytosanitaire ».
On cherche, en vain, les mots « agriculture », « pratiques agricoles »… On se frotte les yeux. C’est un peu comme si une étude épidémiologique sur les causes du cancer (http://www.lemonde.fr/cancer/) du poumon avait non seulement omis de questionner (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/questionner) les participants sur leur consommation (http://www.lemonde.fr/consommation/) de tabac (http://www.lemonde.fr/tabac/) mais que, de surcroît, les mots « cigarette » ou « tabagisme » aient été exclus de son compte rendu.
UNE PUDEUR SÉMANTIQUE DE CIGARETTIER
« Des analyses (http://www.lemonde.fr/analyses/) ultérieures exploreront les liens statistiques entre la mortalité des colonies et des facteurs de risques incluant la prévalence (http://www.lemonde.fr/valence/) de maladies, l’utilisation de traitements vétérinaires, le contexte (http://www.lemonde.fr/contexte/) apicole et d’autres paramètres », écrivent les auteurs, rassemblant sous l’énigmatique « autres paramètres », tout ce qui a trait à l’agrochimie et au modèle agricole dominant.
Cette pudeur sémantique rappelle celle des vieilles études financées par les cigarettiers américains, qui attribuaient d’abord le cancer du poumon à la pollution atmosphérique, au radon, aux prédispositions génétiques et, éventuellement, au…« mode (http://www.lemonde.fr/mode/) de vie » – c’est-à-dire à la cigarette.
Que la science se pratique dans un contexte où il n’est pas possible d’énoncer un fait aussi trivial que le caractère nocif des insecticides pour les insectes devrait nous porter (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/porter) à une profonde inquiétude. Pas forcément pour les abeilles mais, surtout, pour ce que cela dit de notre société.