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Voir la version complète : Face à Google, l'incroyable faiblesse de la Commission européenne Le Monde.fr | 10.03



edenmartine
10/03/2014, 10h59
http://s1.lemde.fr/image/2014/02/07/534x267/4362530_3_952f_ill-4362530-c270-474893_b323c68da5cc76b850aa5de977654ad8.jpgAu nom d'une Union européenne (http://www.lemonde.fr/union-europeenne/) dont il est censé servir (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/troisieme-groupe/servir) l'intérêt, le commissaire à la concurrence Joaquín Almunia se targue avec ostentation d'avoir (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/auxiliaire/avoir) trouvé un arrangement avec la société Google (http://www.lemonde.fr/google/) pour remédier (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/rem%C3%A9dier) à certaines pratiques anticoncurrentielles.En contrepartie d'engagements largement dénoncés comme insuffisants, voire contre-productifs, le géant du net échapperait à une lourde amende et pourraitcontinuer (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/continuer) sereinement à trafiquer (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/trafiquer) les résultats des recherches des internautes.
En réponse aux critiques qui commencent à se faire (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/troisieme-groupe/faire) jour, y compris de la part deses (http://www.lemonde.fr/bourse/nyse-euronext-paris-equities/ses/) collègues commissaires et du Parlement européen, M. Almunia a expliqué que les opposants à son arrangement étaient soit ignorants, soit de parti pris.
Pour un petit artisan de la recherche Internet comme moi, auteur d'une technologie hybride originale tuée par Google en 2007, l'insulte était violente. Trop c'est trop.
Sur la méthode tout d'abord : M. Almunia a échangé si souvent avec Eric Schmidt, le président de Google, qu'il ne se souvenait même plus lors de sa conférence de presse du 7 février s'il l'avait vu ou pas à Davos deux semaines plus tôt.
DE GRAVES ABUS QUI PÉNALISENT LE CONSOMMATEUR ET SACRIFIENT LES START-UP FRANÇAISES ET EUROPÉENNES
Sur le fond ensuite. Après quatre années d'enquête (http://www.lemonde.fr/enquetes/), la Commission européenne a quand même confirmé que Google manipule depuis 2007 les résultats présentés comme « naturels » de son moteur de recherche pour avantager (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/avantager) la visibilité de ses propres services (http://www.lemonde.fr/services/), et exclut délibérément ses concurrents petits et grands des mêmes résultats « naturels ».
Ces pratiques sont graves car elles étouffent le développement de moteurs de recherche (http://www.lemonde.fr/moteurs-de-recherche/) innovants et la création de valeur associée : emplois, retombées fiscales, émergence ou soutien de filières, dynamisation d'un des secteurs les plus prometteurs pour notre économie.
Les inquiétudes les plus fortes concernent l'asphyxie des moteurs de recherche spécialisés aussi divers que les comparateurs de prix ou les moteurs de recherche d'images ou d'articles de presse, par exemple. Nombre des entreprises (http://www.lemonde.fr/entreprises/)innovantes du secteur sont européennes, et la créativité française fait plaisir à voir (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/troisieme-groupe/voir)- ce n'est pas un hasard si une bonne partie des plaignants contre Google sont des acteurs français de la Net économie.
L'usage de ces moteurs spécialisés a connu une croissance de 8% en 2013, notamment grâce à l'essor du mobile, quand les moteurs généralistes connaissaient une baisse de 3% du nombre de requêtes. L'avenir (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/troisieme-groupe/avenir) de la recherche Internet est aux moteurs spécialisés, et Google le sait mieux que quiconque.
UN ARRANGEMENT QUI BLANCHIT GOOGLE ET SANCTUARISE SES MARCHÉS PRÉSENTS ET FUTURS
En soi-disant connaissance de cause, que s'apprête à faire (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/troisieme-groupe/faire) M. Almunia ? Tout simplement à donner (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/donner) quitus à Google de l'immense majorité de ses pratiques illicites. L'arrangement, paradoxalement rendu public par Google, est tellement mal ficelé qu'il va sanctuariser (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/sanctuariser) ses marchés. Au passage Google va même devoir (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/troisieme-groupe/devoir)s'enrichir (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/deuxieme-groupe/enrichir), une première mondiale en matière d'antitrust.
Toutes les entreprises plaignantes ou consultées par la Commission européenne ont demandé à ce que Google procède à un référencement et à un affichage non discriminatoire et loyal de l'ensemble des moteurs de recherche spécialisés (ou « verticaux »), les siens comme ceux de ses concurrents. Or (http://www.lemonde.fr/bourse/forex-data-lite/gold-united-states-dollar/), aux termes de l'arrangement brillamment négocié par M. Almunia, Google continuera d'afficher (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/afficher) en premier ses réponses commerciales, quelle que soit leur pertinence au regard de son propre algorithme de choix.
Seuls les moteurs de recherche commerciaux concurrents (shopping, voyages, réservation d'hôtels et de restaurants) les plus riches pourraient « bénéficier » d'un affichage payant de leurs résultats à côté de ceux de Google. Ces moteurs représentent moins de 5% des recherches sur le Net. Google aura encore plus qu'aujourd'hui droit de vie et de mort sur ses concurrents dans les autres thématiques (actualités, images, vidéos (http://www.lemonde.fr/centenaire-14-18-videos/), cartes, livres (http://www.lemonde.fr/centenaire-14-18-livres/), musique, brevets, etc…), qui représentent plus de 75% des recherches.
Même dans la sphère commerciale, cet arrangement tuera forcément les concurrents moins riches, et notamment toutes les start ups qui travaillent sur de nouvelles formes de solutions de recherche qui pourraient à terme menacer (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/premier-groupe/menacer) la« suprématie » technologique de Google. C'est un peu comme si l'Autorité de régulation des télécommunications (Arcep) avait délégué à Orange (http://www.lemonde.fr/orange/) l'autorisation de la quatrième licence mobile.
A l'opposé de la politique (http://www.lemonde.fr/politique/) courageuse des Commissions nationales informatiques et libertés européennes (Cnil (http://www.lemonde.fr/cnil/)), qui n'ont pas hésité à punir (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/deuxieme-groupe/punir) le géant du Net, l'arrangement de M. Almunia constitue un renoncement. Quand en janvier 2013 la Federal Trade Commission américaine a clos son enquête contre Google sansprendre (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/troisieme-groupe/prendre) d'action sur le volet recherche (une décision pas forcément surprenante pour qui connait les riches relations de Google avec l'administration Obama), M. Almunia a déclaré qu'il n'aurait pas de mal à faire (http://conjugaison.lemonde.fr/conjugaison/troisieme-groupe/faire) mieux.
A l'époque l'affirmation ne semblait pas bien risquée, mais avec le recul elle apparaît d'une folle arrogance. Il est urgent que les acteurs de la Net économie française et européenne se soulèvent contre le désastre qui se profile.




Bruno Guillard (fondateur de la société 1plusV)