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Voir la version complète : Aafiya Siddiqui, torturée et condamnée à 86 ans de prison



soltan009
21/01/2014, 18h54
Au Pakistan, elle est devenue un emblème pour la défense de la dignité humaine et des droits de l’homme. En France, son cas ne nous dit peut être pas grand chose, pourtant l’histoire de cette jeune pakistanaise de 38 ans, mère de 3 enfants, ne peut que nous interpeller. Condamnée le 23 septembre dernier par le tribunal fédéral de New York à 86 ans de prison, accusée de tentative d’homicide volontaire sur un des soldats américains qui la détenaient en Afghanistan, Aafiya Siddiqui est le symbole de l’injustice américaine.
Elle n’a commis aucun crime, ni acte terroriste qui puisse justifier une peine aussi lourde. Pourtant pendant cinq ans, Aafiya a été victime d’actes de torture et de maltraitance, perpétrés par des militaires américains. La logique voudrait que ce soient ses bourreaux qui soient condamnés à la prison ferme.
Alors qu’il n’existe pas la moindre preuve contre elle, elle est accusée depuis 2004 d’être une militante terroriste d’Al Qaida. Aafiya a déploré le déroulement de son procès et a estimé que faire appel serait « une perte de temps » (les dés avaient effectivement l’air d’être jetés). Elle a également confié : « Je fais appel devant Dieu ».
Aafiya Siddiqui ou la face cachée de la « justice » américaine
Jeune pakistanaise diplômée en neurosciences de la prestigieuse université du Massachussets Institute of Technology (MIT), Aafiya Siddiqui est retournée à Karachi en 2001 pour s’y installer. En mars 2003, les services secrets pakistanais l’ont arrêtée ainsi que ses 3 fils, lors d’une opération antiterroriste, puis l’ont confiée à des soldats américains. Ceux-ci l’ont directement placée dans la prison de Bagram en Afghanistan, isolée de ses enfants.
Pendant près de 5 ans jusqu’en 2008, sa soeur Fawzia, affirme qu’elle n’a pu trouver aucune trace d’elle. Et pour cause, Aafiya endurait sous un silence étouffant (les autorités américaines à Washington n’ayant rien dit de son transfert) tortures, abus sexuels et violentes persécutions de la part des soldats américains. Dans un rapport de Stephen Lendman, il est spécifié qu’aucun avocat n’était autorisé à venir la voir, elle était enfermée toute la journée dans une pièce froide, dormant à même le sol, ne sortant que pour être ruée de coups.
Le Grand Soir rapporte d’un ancien détenu de la prison ayant réussi à s’évader, qu’il voyait régulièrement la jeune victime enchainée, trainée par les militaires américains le long du couloir de la prison et «ils la ramenaient ensuite dans sa cellule, elle avait l’air d’être devenue folle, elle pleurait et tapait frénétiquement à coups de poing contre la porte de sa cellule ».
En juillet 2008, elle a été de nouveau arrêtée puis convoquée en Afghanistan à un interrogatoire pendant lequel des militaires américains et des agents du FBI l’ont accusée de terrorisme. Ceci bien que cette femme, très affaiblie par les sévices subis, n’ait cessé de crier son innocence. Désemparée, elle saisit une arme et tira dans le vide, ne visant ni ne blessant personne. Un des militaires la blessa de deux balles en pleine poitrine. Suite à cela, Aafiya Siddiqui (le teint pâle, ne pesant alors plus que 40kg) fut jugée coupable en février dernier.
Pourtant, c’est bien elle qui avait été touchée, mais la légitime défense n’est apparemment valable que pour les soldats américains.
Soulignant l’état de santé inquiétant de celle que les médias américains nomment « la prisonnière 650 », l’avocate Elisabeth Fink a déclaré en 2008:
Le cas de Aafia est une histoire terrifiante, qui nous plonge dans un abîme jamais atteint par la justice de notre pays. Nous, ses défenseurs, avons l’intention de nous battre par tous les moyens devant les tribunaux fédéraux et devant l’opinion publique nationale et internationale pour que justice soit enfin rendue à cette femme victime de la violence d’État.
Depuis 2008, quand l’affaire a pris une tournure médiatique, jusqu’à aujourd’hui, les autorités américaines ont toujours nié avoir incarcéré avant cette date la jeune femme, puis l’avoir torturée et violée. Et cela a provoqué de vives tensions diplomatiques entre Washington et Islamabad.
Abdul Basit, porte parole du ministère des affaires étrangères du Pakistan a indiqué vendredi dernier (24/09) : Nous poursuivons nos efforts pour faire rapatrier Aafia Siddiqui au Pakistan ». Islamabad tente tant bien que mal d’établir des accords avec Washington afin d’obtenir du président Barack Obama, la grâce présidentielle.
La foule pakistanaise révoltée descend dans la rue : « Justice For Aafiya »
Suite au verdict ahurissant du juge Richard Berman, des millions de manifestants ont exprimé leur indignation vendredi 24 septembre dans les villes de Karachi et de Lahore.
Très en colère contre le gouvernement américain, des membres du parti islamique pakistanais « Jami ’at Islami » montraient des affiches sur lesquelles était inscrit « Honte à l’Amérique, Soutien à la fille de la nation, Dr Aafiya Siddiqui » ou encore « Paix pour Aafiya Siddiqui ». Il y a eu des échauffourées entre certains pakistanais et La police qui tentait d’assurer la sécurité de la manifestation. Celle ci a fini par envoyer des bombes lacrymogènes pour dissiper la foule. Le cortège s’est tenu jusque devant l’ambassade des États-Unis.
Tandis qu’à Lahore, deuxième ville la plus peuplée du Pakistan, c’est l’ancien champion du monde de cricket, Imran Khan, devenu chef du parti politique Tehrik-e-Insaf (Mouvement pour la justice) qui a tenu à manifester son soutien.
Des sites de soutien se multiplient sur la toile, à l’image de « Justice For Aafia » afin de sensibiliser et de mobiliser le plus grand nombre à la terrible injustice que subit cette femme. Ils veulent également dénoncer les atrocités que les soldats américains commettent en toute impunité, sur des otages pour la plupart musulmans (d’Irak, du Pakistan, d’Afghanistan etc..) dans des prisons comme Guantanamo, ou Abou Ghraib. Des prisons dont les conditions de vie ne peuvent être décrites, tant elles sont inhumaines.
Les enfants de Aafiya Siddiqui ne sachant pas eux-même où se trouve leur mère, ni dans quelles conditions elle vit, sont pris en otages par les militaires américains. Eux non plus n’ont donné aucune nouvelle depuis leur interpellation par les services pakistanais en 2003.

http://www.sanabil.fr/biographies-detenus/aafiya-siddiqui-torturee-et-condamnee-a-86-ans-de-prison/