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harroudiroi
18/03/2013, 11h23
« Aux urgences, c'est la haine »


C’est ce que titre Le Journal du Dimanche, qui publie sur une page un reportage aux urgences de l’hôpital Nord de Marseille : « Insultes, menaces, coups… Les faits de violence ont doublé depuis 2006 à l'hôpital. [...] Le personnel encaisse. Jusqu'à quand? ». Le journal relate une « scène de violence verbale ordinaire. […] Scène d'incompréhension entre une blouse blanche soucieuse de faire appliquer les règles (un visiteur par personne souffrante pour ne pas perturber les soins) et une famille nombreuse accourue au chevet d'un malade ».


« Scène banale dans tout l'Hexagone : 5.760 faits de violence ont été signalés en 2011 dans les établissements de santé, selon l'Observatoire national des violences en milieu de santé. On en comptait 2.690 en 2006 », poursuit Le Journal du Dimanche. Rachel Ferrari, directrice de l’Observatoire, remarque ainsi que « les gens insultent et même frappent de plus en plus le personnel, parfois avec des armes, mais il faut relativiser cette radicalisation car la déclaration des incidents est encouragée par le ministère de la Santé ». La responsable ajoute qu’« un nombre croissant d'établissements se dote de plans antiviolence et des liens plus étroits se tissent entre commissariats et services d'urgences ».


« Pas assez vite aux yeux des personnels », continue le journal, qui cite le Dr Philippe Jean, chef de service des urgences, « effondré par un incident plus grave que la moyenne (le frère d'un patient a détruit une porte à coups de poing avant de frapper un vigile), [et qui] a décidé d'alerter les médias ». Le praticien déclare : « D'habitude, on se tait. Parler de notre stress ne changera peut-être rien, mais je voulais que les gens qui s'indignent pour tout un tas de choses sachent et s'indignent. Ça craque à Roubaix, à Grenoble. Il est temps de faire un plan Marshall pour les urgences ! ».


Le Dr Philippe Cano note de son côté : « L'angoisse de la maladie crée de la tension. Mais cela n'explique pas tout : il y a notre époque de l'immédiateté et de l'individu roi. Il y a aussi la défiance envers l'institution. Les gens ne respectent plus le service public. L'autre problème, c'est la crise. Faut voir dans quelles conditions vivent les gens ».


Le Journal du Dimanche relève que « tout en espérant des mesures à l'échelle nationale, les urgentistes marseillais ont planché sur une réorganisation. […] La création d'une paroi de séparation entre la salle d'attente et la partie soins, la présence d'un vigile et celle de caméras de vidéosurveillance ne suffisent plus ? La direction va installer un écran géant pour occuper les longues plages d'attente, repeindre les murs de couleurs plus apaisantes. Le chef de service, lui, aimerait former son personnel à la gestion des conflits et remettre des médiateurs issus du quartier au cœur des urgences ».


Le journal livre en outre un entretien avec Claude Leicher, président de MG France, qui remarque qu’« en matière de violence, il y a une convergence entre les urgences et la médecine de ville. Comme les hospitaliers, les généralistes sont de plus en plus fréquemment exposés aux insultes, aux menaces, à la violence physique parfois. Toute la médecine de premiers recours reçoit de plein fouet la tension croissante qui gagne la société ».


« Au-delà des violences, les généralistes sont devenus des cibles pour la petite délinquance. On braque la recette des consultations comme autrefois on braquait une banque ! Le médecin est un des derniers professionnels à avoir de l'argent liquide. C'est pourquoi j'ai demandé à Marisol Touraine de généraliser le tiers payant. […] Il faut aussi supprimer l'argent chez les généralistes », continue le responsable.