fekri92
14/03/2013, 05h38
Le Conseil national du numérique (CNN) a remis, mardi 12 mars, son avis sur la neutralité du Net à la ministre de l'économie numérique, Fleur Pellerin. L'institut consultatif s'est prononcé à l'unanimité en faveur d'une loi sur le principe de neutralité des réseaux, censé garantir l'accès universel aux contenus en ligne. Plus qu'une nouvelle loi, le Conseil recommande une modification de la loi de 1986 sur la liberté de communication.
Plus précisément, le principe de la neutralité des réseaux stipule que tout utilisateur doit pouvoir accéder à tout contenu, sans discrimination. Les fournisseurs d'accès, en tant que "tuyaux" par lesquels passent les données, devraient ainsi se contenter de les transmettre, sans les identifier. Pour le Conseil, il s'agit de "la non-discrimination des informations transmises par un réseau de communication ouvert au public".
PERMETTRE LA GESTION DU RÉSEAU
Ce principe se heurte pourtant au besoin de garantir la qualité du réseau, qui passe notamment par le fait de donner priorité à un flux (vidéo, courriels...) par rapport à un autre selon les besoins. La député UMP Laure de la Raudière le reconnaissait d'ailleurs dans sa proposition de loi sur le sujet, qui laissait une grande marge de manœuvre à cette "gestion", qui peut passer par les "services gérés".
Un service géré est, comme la télévision par Internet actuellement, un service supplémentaire à la connexion Internet même, pour lequel un débit minimum est garanti. Un FAI, pour garantir la qualité de services populaires (comme YouTube ou Steam) pourrait donc choisir de négocier avec leurs propriétaires un passage en "service géré", notamment pour gagner un avantage face aux concurrents limités à la connexion Internet. Pour le CNN, la gestion du réseau "ne doit pas entrer en conflit avec l'intérêt des usagers" ; cette demande vague irait donc à l'encontre de l'instauration massive de ces services gérés.
Il reste à savoir si des décisions récentes de fournisseurs d'accès, comme Orange, qui éditent eux-mêmes des services liés à l'abonnement Internet, serait contraire à ce principe large de neutralité des réseaux.
Lire : L'Internet 'ouvert' d'Orange ferme ses portes
En outre, le Conseil demande à ce que ce principe s'étende "au-delà de la vision concurrentielle comme la traduction numérique du principe d'égalité, assurant l'accès à l'information pour l'ensemble des usagers". Tout internaute doit ainsi pouvoir accéder à l'information dans de bonnes conditions. De même, il faudra donc garantir une meilleure transparence des abonnements à Internet. Des indicateurs du "niveau de neutralité des réseaux", français et européens, pourraient également être mis en place.
UNE NEUTRALITÉ DES SERVICES
Pour le Conseil, "Internet n'est plus seulement un réseau physique mais aussi et surtout un ensemble de services. Il est inutile d'imposer la neutralité en amont si on ne change pas les règles en aval". Le CNN souhaite donc étendre cette neutralité aux services Internet populaires, à savoir "les moteurs de recherche, des réseaux sociaux, les détenteurs d'APIs [outils pour développeurs] essentielles". Pour l'institution, "les services d'accès et de communication sont des services incontournables. Il doivent garantir la liberté d'expression, d'innovation et de création", même si cela ne doit pas entraver "la liberté d'innovation".
En clair, les services dont sont dépendants le reste des entreprises numériques – comme les résultats de recherche de Google ou le bouton "J'aime" et les publicités de Facebook – seraient tenus de ne pas favoriser une information ou une société face à une autre. Les résultats de certaines entreprises, notamment des magasins en ligne, sont ainsi très liés au placement du site dans les résultats de Google ou de leur affichage dans les flux d'actualité de Facebook. De même, ils sont devenus essentiels dans l'information en ligne. Le caractère "essentiel" d'un service sera donc sûrement à déterminer par le régulateur.
OBLIGER GOOGLE À LA NEUTRALITÉ
L'une des obligations les plus sensibles est celle de neutralité des moteurs de recherche, pour par exemple éviter que Google ne favorise ses propres services face à la concurrence, ce dont il est régulièrement accusé. Pour sa part, la firme de Mountain View se défend de modifier manuellement les résultats de son moteur, se retranchant derrière son algorithme de recherche, secret, et subissant des modifications quotidiennes... Et donc impossible, en l'état, à contrôler pour un pouvoir public.
Comme le notait la Hadopi dans son rapport sur la lutte contre le téléchargement, le moteur est également modifié manuellement pour répondre à certaines requêtes, notamment pour des cas de racisme ou d'atteintes au droit d'auteur. Ce qui ouvrirait la porte à d'autres demandes.
Cette extension de la neutralité à Google ou Bing est un serpent de mer qui a notamment émergé en 2010, lors de la consultation publique sur la neutralité du Net ouverte par la ministre de l'économie numérique de l'époque, Nathalie Kosciusko-Morizet. Depuis, cet argument est largement défendu par les entreprises concurrentes de certains services de Google, comme la comparaison de prix. Il pourrait également être utilisé par le gouvernement dans sa fronde contre les pratiques concurrentielles et fiscales des géants américains du numérique.
Pour le collectif de défense des libertés numériques La Quadrature du Net, la neutralité du Net proposée par le Conseil national du numérique serait une "neutralité neutralisée". "A tenter de régler des problèmes différents en un seul coup de baguette magique, cet avis risque de donner lieu à une neutralité neutralisée qui ne réglera aucun problème", estime ainsi son porte-parole Jérémie Zimmermann. Pour le militant, "la France doit prévo[ir] des sanctions dissuasives contre les opérateurs qui restreignent de manière illégitime nos communications en ligne".
Plus précisément, le principe de la neutralité des réseaux stipule que tout utilisateur doit pouvoir accéder à tout contenu, sans discrimination. Les fournisseurs d'accès, en tant que "tuyaux" par lesquels passent les données, devraient ainsi se contenter de les transmettre, sans les identifier. Pour le Conseil, il s'agit de "la non-discrimination des informations transmises par un réseau de communication ouvert au public".
PERMETTRE LA GESTION DU RÉSEAU
Ce principe se heurte pourtant au besoin de garantir la qualité du réseau, qui passe notamment par le fait de donner priorité à un flux (vidéo, courriels...) par rapport à un autre selon les besoins. La député UMP Laure de la Raudière le reconnaissait d'ailleurs dans sa proposition de loi sur le sujet, qui laissait une grande marge de manœuvre à cette "gestion", qui peut passer par les "services gérés".
Un service géré est, comme la télévision par Internet actuellement, un service supplémentaire à la connexion Internet même, pour lequel un débit minimum est garanti. Un FAI, pour garantir la qualité de services populaires (comme YouTube ou Steam) pourrait donc choisir de négocier avec leurs propriétaires un passage en "service géré", notamment pour gagner un avantage face aux concurrents limités à la connexion Internet. Pour le CNN, la gestion du réseau "ne doit pas entrer en conflit avec l'intérêt des usagers" ; cette demande vague irait donc à l'encontre de l'instauration massive de ces services gérés.
Il reste à savoir si des décisions récentes de fournisseurs d'accès, comme Orange, qui éditent eux-mêmes des services liés à l'abonnement Internet, serait contraire à ce principe large de neutralité des réseaux.
Lire : L'Internet 'ouvert' d'Orange ferme ses portes
En outre, le Conseil demande à ce que ce principe s'étende "au-delà de la vision concurrentielle comme la traduction numérique du principe d'égalité, assurant l'accès à l'information pour l'ensemble des usagers". Tout internaute doit ainsi pouvoir accéder à l'information dans de bonnes conditions. De même, il faudra donc garantir une meilleure transparence des abonnements à Internet. Des indicateurs du "niveau de neutralité des réseaux", français et européens, pourraient également être mis en place.
UNE NEUTRALITÉ DES SERVICES
Pour le Conseil, "Internet n'est plus seulement un réseau physique mais aussi et surtout un ensemble de services. Il est inutile d'imposer la neutralité en amont si on ne change pas les règles en aval". Le CNN souhaite donc étendre cette neutralité aux services Internet populaires, à savoir "les moteurs de recherche, des réseaux sociaux, les détenteurs d'APIs [outils pour développeurs] essentielles". Pour l'institution, "les services d'accès et de communication sont des services incontournables. Il doivent garantir la liberté d'expression, d'innovation et de création", même si cela ne doit pas entraver "la liberté d'innovation".
En clair, les services dont sont dépendants le reste des entreprises numériques – comme les résultats de recherche de Google ou le bouton "J'aime" et les publicités de Facebook – seraient tenus de ne pas favoriser une information ou une société face à une autre. Les résultats de certaines entreprises, notamment des magasins en ligne, sont ainsi très liés au placement du site dans les résultats de Google ou de leur affichage dans les flux d'actualité de Facebook. De même, ils sont devenus essentiels dans l'information en ligne. Le caractère "essentiel" d'un service sera donc sûrement à déterminer par le régulateur.
OBLIGER GOOGLE À LA NEUTRALITÉ
L'une des obligations les plus sensibles est celle de neutralité des moteurs de recherche, pour par exemple éviter que Google ne favorise ses propres services face à la concurrence, ce dont il est régulièrement accusé. Pour sa part, la firme de Mountain View se défend de modifier manuellement les résultats de son moteur, se retranchant derrière son algorithme de recherche, secret, et subissant des modifications quotidiennes... Et donc impossible, en l'état, à contrôler pour un pouvoir public.
Comme le notait la Hadopi dans son rapport sur la lutte contre le téléchargement, le moteur est également modifié manuellement pour répondre à certaines requêtes, notamment pour des cas de racisme ou d'atteintes au droit d'auteur. Ce qui ouvrirait la porte à d'autres demandes.
Cette extension de la neutralité à Google ou Bing est un serpent de mer qui a notamment émergé en 2010, lors de la consultation publique sur la neutralité du Net ouverte par la ministre de l'économie numérique de l'époque, Nathalie Kosciusko-Morizet. Depuis, cet argument est largement défendu par les entreprises concurrentes de certains services de Google, comme la comparaison de prix. Il pourrait également être utilisé par le gouvernement dans sa fronde contre les pratiques concurrentielles et fiscales des géants américains du numérique.
Pour le collectif de défense des libertés numériques La Quadrature du Net, la neutralité du Net proposée par le Conseil national du numérique serait une "neutralité neutralisée". "A tenter de régler des problèmes différents en un seul coup de baguette magique, cet avis risque de donner lieu à une neutralité neutralisée qui ne réglera aucun problème", estime ainsi son porte-parole Jérémie Zimmermann. Pour le militant, "la France doit prévo[ir] des sanctions dissuasives contre les opérateurs qui restreignent de manière illégitime nos communications en ligne".