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Voir la version complète : L'Algérien aime-t-il son pays juste le temps d'un match de foot ?



ironman
23/06/2017, 19h17
http://images.huffingtonpost.com/2017-06-10-1497131452-1367668-AlgeriaSoccerWCup.JPEG0bb5e-thumb.jpg (http://images.huffingtonpost.com/2017-06-10-1497131452-1367668-AlgeriaSoccerWCup.JPEG0bb5e.jpg)

Petite devinette : Il est le premier à crier haut et fort un slogan chanteur commençant par "one, two, three... ", acclamant sa nation quand son équipe nationale de foot est en compétition. Il est le seul à incruster son drapeau dans des matchs ne concernant en aucun cas son pays. Il est nationaliste au plus haut point et peut cogner celui qui critiquera son pays. Qui est-il ?

Evidemment, c'est bel et bien l'Algérien pur et dur qui sait faire les choses à la perfection. Sa devise est claire et concise : "Fais ce que je dis, ne fais pas ce que je fais" » ou plus clairement : l'Algérien a le droit de critiquer son pays, le pays d'autrui, mais l'autre ne critiquera point l'Algérie. C'est un peu ce que je ressens, en tout cas...

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Moi, je pense à l'Algérie tout le temps, quand j'y suis et quand je n'y suis pas. Je croyais ne jamais pouvoir la quitter bien que j'ai toujours rêvé de partir ailleurs... Mais le moment venu, j'ai eu l'une des plus importantes déchirure de ma vie. Qui l'aurait cru ?
Avant de partir, nos familles nous préviendront toujours en disant : "Balek ! El ghorba waa'ra... " (Fais gaffe ! L'exil est rude...). Cette phrase culte que connaissent tous ceux dans le même cas que moi, ceux qui ont tout quitté pour pouvoir vivre leur rêve ou seulement se débarrasser du "gouffre" dans lequel ils s'enfonçaient peu à peu...

J'ai déjà cerné vos questionnements, je vous vois venir avec vos interrogations. "Pourquoi quitter son pays quand on l'aime tant ? Pourquoi ne pas supporter les "coups de blues" ? Cela arrive à tout le monde après tout... Pourquoi ne pas persévérer et essayer de changer les choses ?" Personnellement, il me faudrait tout un roman pour vous expliquer l'impossibilité de résister à l'appel de l'ailleurs.

J'aime mon pays plus que tout, mais cela ne veut pas dire que je dois absolument y vivre. On ne quitte pas forcément un pays parce qu'on ne l'aime pas, ou qu'on ne l'aime plus... On quitte aussi son pays pour des priorités, des rêves, un désir de conquérir le monde, de changer, d'aller de l'avant...

L'Algérie est ce pays qu'on adore un jour et qu'on hait le lendemain, ce pays qui nous rend heureux un matin, puis triste le soir... Ce pays qui nous fait tant mal, mais qui nous procure aussi, à des moments, un bien-être intérieur inégalable.



Cependant, c'est tellement différent quand il n'y a pas d'issue... Après une longue réflexion, j'ai réalisé que pour cet Algérien lambda qui n'a pratiquement aucune chance de quitter son pays ( mais qui désire ô combien partir - les plus téméraires sont harragas ), il est important pour lui de trouver son refuge, une solution de rechange, celle qui lui fera tout oublier... Certains plongent dans la consommation de drogues, d'autres s'occupent en reluquant les demoiselles ( oui oui, il s'agit bien des fameux "hittistes" dont je parle là ), mais tous ont un point commun, un refuge, une valeur sûre qui touche toutes les générations à tous les niveaux de la société: le football. Presque personne n'y échappe!

Honte à toi, père de famille qui ne sait pas de qui est constituée l'équipe nationale de foot.
Honte à toi, jeune étudiant qui préfère réviser au lieu de regarder le match sur cet écran data- show que les jeunes du quartier ont installés sur le mur d'un immeuble. Honte à toi, l'amoureux transi qui préfère parler à sa belle au téléphone plutôt que de rejoindre la troupe pour fêter la victoire en défilant, arpentant toutes les rues de la ville.
C'est dans ces moments festifs que l'amour de l'Algérie se fera sentir partout, du littoral au grand désert, en passant par les djebels. L'équipe nationale de football attise le nationalisme et les grandes envolées patriotiques quand habituellement, le championnat local alimente le chauvinisme.

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Pour l'Algérien, l'amour de son pays, le temps d'un match international de foot, va crescendo avec le nombre de buts marqués. Le sort d'un pays est entre les mains des onze joueurs sur le terrain...

Et bien évidemment, vous comprendrez que si le football est certes un facteur majeur de la fréquence affective pour l'Algérie, il ne s'agit pas seulement de sport. Car même s'il ne l'avoue pas, l'Algérien est subjugué par la beauté de cette terre qui le fait vibrer, l'enivre, lui manque. Chose que l'on ne réalise véritablement qu'une fois loin de sa terre natale.



Parce qu'il vous faudra avoir vu un lever de soleil sur la baie d'Alger, les premiers rayons de lumières se faufilant à travers la brume de mer, frappant ensuite les grands cubes blancs qui servent d'immeubles montant vers les hauteurs algéroises. Il faudra avoir respiré cette bouffée d'air frais dans les montagnes imposantes de Kabylie, pour ensuite découvrir les intenses vagues de sable du Sahara aux portes des Oasis pour l'aimer d'un amour indélébile.

Telle est sa manière d'aimer son pays à cet Algérien rêveur et grincheux. Sincère.
Et s'il ressent parfois de la haine pour ce pays, elle ressemble drôlement à de l'amour.